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LE PUY. — IMPRIMERIE MARCHESSOU FILS.
SOCIÉTÉ AGRICOLE & SCIENTIFIQUE
DE LA HAUTE-LOIRE
MÉMOIRES
ET
PROCÈS-VERBAUX
1888, 1889, 1890
TOME SIXIÈME
LE PUY MARCHESSOU FILS, IMPRIMEURS DE LA SOCIÉTÉ
Boulevard Saint-Laurent, 23.
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MÉMOIRES
LE FEU AU PUY
ÉTUDE HISTORIQUE SUR L'ORGANISATION DES SECOURS CONTRE L’INCENDIB
En lisant les mémoires de Médicis, de Burel et de Jacmon, on s'étonne de la fréquence des incendies signalés par ces chroni- queurs dans la ville du Puy, et cependant combien de sinistres ont échappé à leurs investigations ?
Au temps où écrivaient ces bourgeois de notre cité, les popu- lations reculaient d’épouvante devant ce fléau contre lequel se brisaient le plus souvent leurs efforts. La nuit surtout, au bruil du tocsin sonné à tous les clochers, le spectacle des maisons embrasées, des murs croulants avec fracas, des pauvres gens disputant à l'élément destructeur les lambeaux de leur mobilier et de leur fortune, frappait de terreur la multitude.
Au Puy, l'étroitesse des rues, la hauteur des maisons, l’immense saillie des forgets (1), les façades en colombage ou en pans de bois, la rareté de l’eau (2), l’absence de moyens mécaniques
(1). On désignait autrefois sous le nom de forget la saillie en encorbellement que faisait sur la rue le toit d'une maison. Dans les rues de peu de largeur la proximité des forgets permettait de les franchir d'une toiture à l’autre; mais ce rapprochement devenait fort dangereux en cas d'incendie. Cet appendice tend à disparaître aujour- d'hui dans les constructions modernes.
(2). Médicis, énumérant les fontaines du Puy, cite celles de Montferrant, des Farges, de la Bédoire, de Saint-Jacques, du Térond, de Vienne, de Meymac, de Bourzès au
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pour la projeter, une police insuflisante, la frayeur qui paraly- sait les bras, l’affolement des habitants, tout tendait à aggraver les incendies.
Dans les maisons en simple galandage des quartiers de Cade- lade et de Pouzarot, qui contenaient des amas de paille et de bois, des ouvertures livraient passage à des fagots de garne et, si le feu éclatait par un vent violent, les flammèches semées de toutes parts le propageaient au loin.
Indépendamment des pertes matérielles, il y avait parfois à déplorer la mort de personnes enscvelies sous les décombres, car, à défaut d'engins de sauvetage, nul secours humain ne pouvait les arracher au péril. |
Comment lutter avec avantage contre l'élément dévastateur, assurer le fonctionnement des chaines quand, pour le transport de l’eau, on utilisait les ustensiles de ménage, et que les seaux en cuir ou en toile, d’un usage si commode, étaient inconnus ?
L'embrasement prenait-il de trop grandes proportions, on cou-
Portalet, du Puits de la Roche et de la Chanalcta, ces deux dernières en Pouzarot. On comptait en outre dans la ville un grand nombre de puits et de citernes. Nonobstant ces fontaines ou sources, dont la majeure partie ne fournissait qu'une faible quantité d'eau, le peu de capacité de leurs bassins ne permettait pas de s'y approvisionner suf- flsamment pour arrèter un sinistre. L'eau des fontaines arrivait au Puy dans des con- duits en bois dont la détérioration prompte, à travers des terrains humides, en dimi- nuait le volume.
Odo de Gissey (Édition de 1620, page 117) porte à dix le chiffre des fontaines du Puy. En 1712, la communauté anicienne émettait le vœu « de mettre en meilleur état les quatre fontaines de la ville dont les canaux, faits jusqu'alors de bois de pin, avaient si peu de solidité que les fonteniers étaient très fréquemment occupés à les réparer, tandis qu'on pourrait faire de nouveaux canaux de matière plus solide », (Arnaud, Histoire du Velay, t. TH, pages 299 et 300.)
De nos jours, les fontaines, abreuvoirs, bouches d'eau et bornes-fontaines, disséminés dans tous les quartiers et sur les points les plus élevés de la ville, offrent d’inappré- ciables ressources. De plus, chaque citoyen assure généralement sa demeure contre les risques du feu et, en cas de sinistre, les compagnies d'assurances l'indemnisent, sinon en totalité, du moins en grande partie, des pertes qu'il a essuvées.
Malgré les dépôts de poudre, de pétrole et autres matières inflammables dont les villes sont remplies, malgré les explosions de az qui peuvent survenir, Île feu n'est plus, comme jadis, un épouvantail pour la cité. Nos sapeurs-pompiers, pleins de dévouement et de zèle, arcourent sous la conduite de chefs expérimentés, au premier appel du clairon ou de la sénérale, Nos rues élargies, pour la plupart, rendent facile la manœuvre des pompes, échelles et instruments de sauvetage ; grâce à la profu-
sion des eaux de Vourzac, au concours toujours empressé des soldats et des habitants de graves désastres ne sont plus à redouter.
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rait à l’église voisine, et un ecclésiastique portait près de la maison en flammes le Corpus Domini. Le peuple d'alors, plein de croyance et de foi, comptait sur un miracle pour arrèter les progrès du feu.
Voici, d’après Médicis, les grands incendies dont le Puy fut le théâtre, durant une période d'environ trois siècles.
En 1239, dit-il, « fut le grant feu de la Saunerie du Puy par Roisons ».
En 1345, le couvent de Saint-Laurent brûle en partie.
En 1500, quatre maisons sont consumées derrière l’hôpital ; et onze prés du couvent de Sainte-Claire, en 1505.
Ce naïf historien relate ainsi ce dernier événement :
« L'an M. D. V. les baïles de la confrarie des maçons et char- « pentiers, que font leur patronaige de la Dédicace de l'Eglise du « Puy (qu'est le unzieme de jullet), faisant faire les aubades la « nuyt prochaine qu'ils voloient le lendemain faire leur confrarie, « ainsi qu'ils avoient acoustumé, se trouvarent devant la porte « d'ung maçon, soubs le monastère et devot couvent des sœurs « de Saincte-Claire en Posarot, et faisaient, pour faire icelles « aubades, porter à ung Jeune garson une farasse allumée. Le- «dit garson faisant là une aubade innocemment, reposa sa « farasse bien ardente contre une muraille, en laquelle avoit «ung petit fenestron que respondoit à ung galetas tout plain de « paille et prochaine dudit feu, laquelle paille, tout subitement, «se alluma, et de telle sorte s’enflama qu'il ne fut possible « remedier que unze maisons ne fussent embrasées dudit feu et « toutalement brulées. On y apporta le precieux Corpus Domini « du couvent des Carmes, et grant peuple y survint. Mais tout «le secours n’y vallut riens, car l'effort du feu estoit vehement « et espouvantable. Je prie à Dieu que vueille consoler ceulx que « ainsi y ont perdu leurs biens, et les aultres par $û douse. ct. « benigne grace en vueille garder! (1). Se
1521. Incendie de cinq maisons et d’une partie du Gent he. Sainte-Claire. Le même jour, la maison d’Ltienne Vià ae Saint-Jacques, devient la proie des flammes. Le
En 1531, le 26 septembre, huit maisons brûlent à la Chaussade.
(1) Chroniques d'Étienne Médicis, t. Ier, pages 272 ct 273,
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Un boulanger, nommé Vivier, périt écrasé par la chute d'un mur, et plusieurs personnes furent en outre grièvement blessées.
1546. Deux maisons brülérent, rue de l’Ouche du Temple, près la porte d'Avignon.
1550. Grand feu de Posarot.
Cet incendie, qui consuma un quartier du Puy, eut lieu le 25 novembre 1550. Sous l’influence du vent du midi souftlant alors avec rage, le feu, alimenté par les tas de bois, de paille et de foin dont étaient remplies les maisons de ce quartier, se développa si rapidement, grâce aux flammèches que le vent semait de toutes parts à des distances éloignées, que l’on crut un instant à l’impos- sibilité de le combattre par les moyens humains.
Le monastère de Sainte-Claire, entouré par les flammes, échappa par miracle à cet embrasement. Médicis donne de grands détails sur ce sinistre dont il dut être le témoin, car il ne mourut qu’en 1565. Écoutons sa narration (1) :
« .…. L'an de l’incarnée Divinité M. D. L. et le jour de la vierge «egiptienne saincte Catherine, de laquelle la festivité est célé- « brée le xxv° jour du mois de novembre, sur environ sept heures « de soir, Je ne scay par quel moyen, le feu se print en une mai- « son de Posarot d’ung nommé Benoict Fabre, clerc, dont en « procéda grant escandale, car le vent austral estoit ce jour si « impetueux et vehement que faisoit trembler les maisons. Et, « de faict, pour ce que les maisons de Posarot sont à petis mes- « nagiers et sont petites et mal appointées, et que, en ce temps, « estoient leurs soliers et chabanes toutes remplies de bois, de «paille, chalailles et pastures pour le norrissement de leurs bes- « tes, et que icelles maisons ont grandes ouvertures soubs leurs « toys et couverts, pourquoy, causant ledict vent, les flambes du « feu entroient facilement en icelles maisons, et tantost tout se « allumoyt, prenant lesdictes maisons à beau renc. Là se dreça «ung merveilleux bruyt, car ledict feu estre apperceu, on com- « mença à mareler les cloches de plusieurs églises, oùt le peuple, « à ceste cause, tout esmeu, couroit celle part. Et voyant icelluy « peuple, entre aultres maisons, eslre en grand dangier le devot « et religieux couvent de l'Observance Saincte-Claire, firent faire
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(1) Chroniques d'Etienne Médicis, t. 1e", pages 440 et suivantes.
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« ouverture de leur reduict. Sy en entrarent beaucop de honnora- «bles personnaiges de la ville, desirans de bon cueur leur y « secourir. À quoy ils n’y espargnarent leurs personnes, combien « que les vagues du feu, à cause du vent, leur faisoient beaucop « d’ennuy. Mais, ce nonobstant, ils deffendoient ce lieu par gran- « dissime et extreme diligence. Sy faisoit-on bien, és aultres « maisons, le mieulx qu’on pouvoit. Mais la conflagration et « embrasement, causant le vent, comme j’ay dict, estoit tant hatif « et acouru que on n’avoit espace, à grant peyne, de saulver « aulcuns biens et bestail d'icelles maisons, et ce que on en pou- « voit promptement gecter hors, hardes et bagaige, on le metoit « parmy les rues où l’on pouvoit. Et là, se trouvoit de maleureux « garnemens et meschante canaille que, faisant semblant leur y « vouloir aider, desroboyent et emportoient, quant et eulx, les « petis biens et meubles qu’on avoit saulvés, comme lynges, « vaysselles, lards, bleds, outils de laboureur et aultre diverse « nature de meubles. On y apporta le precieux Corpus Domina, « atout la clochette devant, de Sainct-George, de Sainct-Vosi « (avec le Saënct bras), de Sainct-Pierre-la-Tour, et le père « confesseur de Saincte-Claire aussi sortit Nostre Seigneur au « porche qui est à l'entrée de leur église. Z{em, les Dames reli- « gieuses Augustines de Val s’appercevans dudict feu, cuydans « que fut ès Cordeliers, marelarent leur cloche. Sy que esmeu- « rent les gens de Val, et elles-mesmes suyvoient les maisons, « leur disant : Mes amys, prenez vos eschelles, et alles secou- «rir aux Cordeliers qui brulent, et leur donnez quelque « secours ! Dont lesdicts de Val vont viste metre l’eaue au besal «du Breulh pour avoir eau à force. Sy cogneurent, en descen- «dant, que le feu estoit à la ville, ès parties de Posarot, où ils « vindrent à toute diligence. Et les Peres Cordeliers estoicent «rengés au Breulh en procession, disans devotes oraisons, et « lesdictes Dames de Val, en leur chœur, prioient Nostre Sel. «gneur pour l’appaisement de ce tant terrible feu. De vous «racompter le bruyt, les cris lamentables, pleurs et cffroyables «urlemens que faisoient iceulx poures habitants de Posarot, «hommes, femmes et enfans, il est piteux à dire, car plusieurs « demandoient la mort, n’ayant plus envie de vivre aprés telle «infelicité. Icy peult estre amené un dict de Hieremye le pro-
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« phete qui disoit, se lamentant, voyant la desolation, ruyne et « captivité de Jherusalem, ainsi qu'il est escript (Trenorum «primo cappitulo) : Audite, obsecro, universi populi, et « videte dolorem meum. Or croissoit le feu tousjours; s’y qu’il « embrasa et brula, entre aultres maisons, la maison de la reli- « gion de Mazam (oùût pour lors on tenoit et assignée estoit l’escole « mage de la ville), la maison de la religion de Doa, la maison « du seigneur de la Conche, le couvert et planchiers de la tour « Pagesa de la ville du Puy, soubs le portal de Vienna, et aul- « tres plusieurs jusques au nombre de quarante-quatre maisons. « Mais, toutesfois, pour la divine providence, le monastère des « devotes columbetes de Saincte-Claire demoura en son entier. « À Dieu en soient rendues graces, que nous garda et preserva « ce precieux reliquiare!
« Il est à racompter que en l’une de ces maisons, ce soir, on « faisoit unes fiançailles, et estans à my-table, faisant grant chere « à soper, ainsi qu'il est requis, vecy le bruit du feu qui sur- «vint dont, avant une heure et demye, ladicte maison fut ré- « duicte en cendre. Pourquoy, leur jJoye se tourna bientost en « dure tristesse... » |
Médicis évalue à quarante-quatre le nombre des maisons brû- lées, Burel à quatre-vingts (1), et M. Francisque Mandet (tome V, de son Histoire du Velay, page 23), à quatre cents. Ce dernier chiffre, évidemment exagéré, résulte sans doute d’une lecture défectueuse de l'auteur dans le manuscrit de Médicis. Comme nous l'avons dit plus haut, cet historien dut assister au grand in- cendie du Pouzarot et il était, plus qu'un autre, à même de contrô- ler l'étendue du désastre. Son témoignage, en cette occurrence, ne saurait être infirmé. Le P, Jacques Fodéré, dans sa nolice sur le couvent de Sainte-Claire du Puy, consacre les lignes suivantes à l'incendie de 1550 (2).
« Nous ne pouvons pas scavoir autres particularitez de ceste « devoste maison, combien que les bonnes méres anciennes « avoient csté fort curieuses en rediger par escrit de beaux me-
(1) Mémoires de Jean Burel, bourgeois du Puy, page 7. @) Narration historique et topographique des convens de l'ordre de Saint-E r'ançois et monastères Saincte-Claire..…… Lyon, 1619, in-8, pages 1538 et 159.
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« moires, mais ils furent esgarés, ensemble les principaux docu-
ments, par un désastreux accident, qui arriva à la cité du Puy, l'an 1530 (sic), le jour de saincte Catherine, que le feu se prit en divers endroits si violent, et plus particulierement au car- tier du Pozerot, où il fut tellement enflammé qu’en moins d'une heure et demy, quatre-vingt maisons tout à l’entour du monas- tère furent consommées et reduites en cendres sans aucun remede, dont on tient à miracle que ledit monastère en fut pre- servé, par les esclats flamboyans et les charbons ardens des maisons circonvoisines qui brusloient, sautoient et tomboient sur les couverts du convent, aussi espais comme gresle, les pauvres sœurs ne sçavoient où se ranger, car de demeurer dans les bastimens qui sont tous de bois elles craignoient y estre accablées et consommées si le feu y fut pris. Elles se voulurent retirer à leur jardin, mais la grand’flamme des maïi- sons voisines embrasées rendoit une telle et si violente rever- beration, qu’en moins de rien elles sembloient desja quasi tou- tes rousties. Les magistrats et consulat de la ville, les pressoient de sortir, jusques à vouloir user de force et d’authorité de police, mais il sembloit à ces devotes ames scrupuleuses que c'eut esté un crime inexpiable de rompre leur vœu de clausure.
« Enfin elles se Jetterent toutes dans leur cuisine qu’estoit vou- tée de pierre, ne prevoyans pas que si le feu se fut pris à leurs autres bastimens qu'estoient tous de bois, encor que Ia voute eut tenu ferme, elles y eussent esté estouffües. Mais leur P. confesseur, revestu des ornements sacerdotaux, entre dans le monastère, portant le St-Sacrement du precieux corps de Jesus-Christ, va par tous les membres et bastiments du monas- tére, y faict la bencdiction tousjours suivy des religieuses, les- quelles à tous pas prosternées en terre avec chaudes larmes imploroient l’assistance de Dieu, qu’il pleust à sa bonté et clé-
« mence infinie prendre leur maison en protection. Ce qu'il fit, « car ledit P. confesseur estant sorty du monastère fit aussi la « benediction aux ruës contre les maisons embrasées, et aussi « tost on vit abaisser le feu qui s’arresta tout court.
« Au commencement de ceste conflagration, l’on tira hors le
« monastère tous les meubles, mais en semblable accident, il y en « a tousjours qui présentent leur secours pour piller ct desrober,
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« Les pauvres religieuses y perdirent le meilleur de leursdicts « meubles et principalement les papiers passèrent par tant de « mains curieuses, que les meilleurs documens et manuscripts « des bonnes mères anciennes s’esgarérent. »
Médicis signale en outre cinq maisons brûlées, en 1557, rue Bonhomme ; treize en 1559, rue Raphaël, et plusieurs, en 1562, au faubourg Saint-Gilles.
D’après les Mémoires de Burel, en 1559 dix à douze maisons flambèrent, rue Raphaël, et notamment celles de sire Durand Ravissac, de maître Claude Giraudet, de Blaise Boniol et de Bompar. Ce chroniqueur mentionne également, en 1564, l’incen- die de la maison de dame Morète, en Pannessac, dû à la faute du locataire Jacques Gellet, pâtissier ; en 1580, celui de la maison de messire Jean Barre, « presbstre croisé de l'hôpital » ; en 1595. celui de la maison de Guyot-Thavernier, pâtissier, au devant de l’église Saint-Hilaire et, en 1605, celui de la maison de Mathieu Pellissier, dit Soupète, rue Raphaël.
Le 1‘ décembre 1633, disent les Mémoires de Jacmon, le feu prit, à six heures du soir, dans la maison de Jean Brun, maréchal, au faubourg Saint-Laurent. Cette maison fut consumée ainsi que celle des héritiers de Bonjour, teinturier. Un locataire de Brun, nommé Barrigoilz, jardinier, occasionna ce sinistre en brûlant un pourceau.
Peu d’années avant, en 1629, l'habitation de Jean Couppe était devenue la proie des flammes. D’autres incendies eurent lieu en 1634, 1635, 1610, 1642 et 1616.
Jacmon raconte en ces termes l’incendie qui dévora les écuries de l’évêque du Puy, en 1610, peu d'heures après l’arrivée dans cette ville de l’évêque de Mende :
« Ledit jour 17° aoust 1610, ledit seigneur évesque de Mande « s’en alla loger à l’évesché du Puy où il fust le très bien venu. « Lhors ayant mis pied à terre, l’on conduict sa litière avec ses « deux mulletz dans l’escurie dudit seigneur évesque du Puy, et « le reste de son traing au logis du Faulcon de Jehan de Crespon, « et estant l'heure de dix heures du soir, un pallafrenier vollant « donner à soupper à son baisthal et le pansser, il laisse une « chandelle allumée dans l’escurie, et après s’an va soupper. Lors « ladite chandelle tumbe sur quelque palhe et commence de gai-
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« gnier la fenière, la palhe, boix et se fort agrandir tellement que « les portes estant fermées, car ladite escurie est fort ésloigniée « de ladite esveché. Mais les voisins santirent le bruslé et regar- « darent deçà et delà, où ilz virent le feu à ladite escurie, qu'alors « l’on se mist à crier : Au secours, au feu! Lhors Anthoine Dol- « lezon, praticien, se trouvant en la rue du Greffe, y accourt et « monte au-dessus de une grande muralhe, et après sauta dans « la basse-court de ladite escurie pour ouvrir les portes, que ce « fust un miracle que ne se tua d’avoir faict un sy furieux sault « (presque incroyable), et après il antre dedans et sortit les che- « vaulx de Monsieur du Puy les uns après les autres à la porte, « ne se trouvant autre personne à ce fère, et quand vint à sortir «les mulletz de Monsieur de Mande, il n’y heust aucun moyen « car le feu les presset, que causset qu’ilz mordoient et ruoient « comme anragés, que causa que personne ne les osza appro- « cher. Donc ils se bruslarant dedans, où ilz heurloient comme « anragés, que c’estet furieux d’anthandre, ensanble tout ce qui « se trouva dedans se brusla hors lesdits chevaux (1). »
Enfin, dans une période de vingt ans, de 1722 à 1742, le Jour nal de Rachetin (2) énumère huit incendies dont le plus grave occasionna la perte de onze maisons situées rue du Porche, le 7 septembre 1735.
A ceux que la pauvreté de nos archives municipales étonne, il est bon de rappeler que l'Hôtel de ville du Puy brûla dans la nuit du 9 au 10 octobre 1653, et que les meubles, papiers, parchemins, chartes et privilèges qu’il contenait furent entiérement détruits. Quelques vieux livres de compte échappèrent seuls au désas- tre. Le procès-verbal de cet incendie nous paraît trop important pour le passer sous silence. En voici la teneur :
« L'an mil six cent cinquante-trois, et le mercredy dixiesme «jour du mois d'octobre, par devant nous Maurice Le Blanc, « conseiller du roy et magistrat en la sénéchaussée du Puy, dans « notre maison audit Puy, vers les dix heures du matin, s’est pré- « senté M° Peyret, bourgeois en la présente ville, syndic des
(1) Mémoires d'Antoine Jacmon, page 163. (2) Tablettes historiques du Veluy (Années 1870 et suivantes).
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« consuls d’icelle, l'année présente, et d'eux assisté, lequel nous
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a dit que la nuit passée la maison de ville a été brulée, ensem- ble tous les meubles, papiers, titres, documents, privilèges et concessions faites par les roys à cette communauté, lequel incendie est arrivé par l’imprudence où malice de César Gon- tayron et son fils, peintres, qui travailloient dans ladite mai- son de ville et qui passèrent une partie de la nuit. Ce qui a obligé lesdits consuls de bailler requeste contenant plainte et permission de faire fulminer monitoire pour savoir la vérité au sujet du susdit incendie, et demander que vérification d'ice- luy soit faite, ainsy que de la perte desdits titres, papiers, docu- ments et priviléwes de ladite communauté, pour servir à l’ad- venir en ce que de raison, et par appointement mis au pied de ladite requeste de ce jourd’huy, ladite vérification est per- mise et commise à l’un desuits consuls et magistrats en cette cour : ensuite duquel nous avons été requis de vouloir accepter ladite commission et procèder au fait d’icelle, en l'assistance de M: Pons Pinot, procureur du roy en cette cour, nous remel- tant à ces fins ladite requeste et appointement portant notre commission de teneur.
« À monsieur le Sénéchal du Puy. Nous, Le Blanc, conseiller, ayant reçu ladite commission, avons offert de procéder au fait d'icelle, et, à ces fins, en la présence et assistance et du consen- tement de M° Pons Pinot, procureur du roy, et des sieurs Ber- nard, Fornel, Guigon, Galland, Espagnon et Bertrand, consuls, et du sieur Peyret, leur syndic, avec notre scribe, nous nous sommes acheminés à la place du Martouret, où étant, nous avons fait venir M° André Giraudet, advocat, M° Jacques de Benoit, sieur de Salinets, M° Armand Barthélemy, doyen des procureurs, Jacques et Jean Portal, marchands et bourgeois, et Ms Jacques Gire, notaire royal, tous habitants de la présente ville, avec lesquels nous avons vu et visité ladite maison de ville, et constaté que le feu à entièrement brulé et con- sumé toute la maison, ensemble tous les meubles et papiers qui estoient dans icelle, jusques à la muraille de devant de ladite maison qui estoit en pierre blanche de Blavozy, taillée, qui a été abattue, sans qu'on n’aye pu sauver que quelques vieux livres de comptes qui estoient dans l'autre corps de logis sur le Poids
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« du roy : ne restant rien au grand corps de logis que les trois « murailles et la première montée des degrés en pierre de taille, « le feu ayant brulé et mis en piéces le surplus dudit degré, tout « le couvert d’iceluy degré et celuy de l’autre corps de logis, « ensemble le premier estage ayant esté brulés et consumés par « le feu. De quoy nous avons dressé notre présent verbail et fait « signer audit Pinot et autres assistants pour servir auxdits con- « suls en ce qu'ils auront à faire : et, ce fait, nous nous sommes « retirés. Ont signé : Pinot, procureur du roy, Giraudet, de « Salinets, Barthélemy, J. Portal, Jacques Portal et Gire. Le « Blanc a aussy signé l'original (1). » |
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Parmi les mesures de police usitées à Paris, ‘était celle du couvre-feu. On sait qu'à 8 ou 9 heures du soir, suivant les sai- sons, la cloche du beffroi sonnait le couvre-feu. « C’était à la fois, dit Chéruel, un moyen pour prévenir les incendies et une pré- caution contre les conspirations nocturnes (2). » Une coutume analogue existait dans d’autres villes du royaume.
Sur le rocher de Corneille, jadis couronné de murailles, veillait autrefois, nuit et jour, un guetteur. Il surveillait tous les points de l’horizon et sonnait la cloche d’alarme aux approches de l'ennemi ou à l’apparition d’un incendie. A Paris, la poiice forçait les habitants de la ville à suspendre pendant certains mois de l’année devant leur porte une lanterne allumée (3). Dans tous les quartiers il y avait un grand nombre de seaux en cuir pour assurer des secours en Cas d'incendie (4).
Un inventaire du mobilier de l'Hôtel de ville du Puy, dressé le 21 juin 1705, fait mention de « 59 ceaux de cuir bouilli servant pour les incendies où sont marqués chacun les armes de la ville que les consuls du Puy ont fait à neuf » (5). Un autre inventaire
(1) Annales de la Société d'agriculture, sciences, arts et commerce du Puy, t. XV, pages 773 et suivantes.
(2) Dictionnaire historique des instilulions, mœurs et coutumes de la France, par Chéruel, seconde partie, page 293, édition de 1870.
(3) Histoire des Français de divers états aux QUE derniers siècles, par Amans- Alexis Monteil, 1842, t. V, page 418. . (4) Zd., ibid., p. 418.
(5) Archives municipales. Registre consulaire, série BB,
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de 1718 signale encore « 50 ceaux en cuir bouly aux armes de la ville » (1).
Chéruel cite une ordonnance de police de 1670 enjoignant «aux maîtres maçons, charpentiers et couvreurs de venir au secours des maisons incendiées. Ils devaient accourir au premier signal avec leurs ouvriers, et, afin qu’on püût les appeler sans retard, il leur était prescrit de donner aux commissaires de leurs quartiers leurs noms, surnoms et adresses, et, s’ils changeaient de quartier, ils devaient en prévenir le commissaire du quartier qu'ils quittaient (2) ».
Ces mesures, prises à Paris, s’étendaient également à la pro- vince. Nous avons sous les yeux trois procès-verbaux dressés au Puy devant les maire et consuls de cette ville les 13 décembre 1767, 1°" et 2 janvier 1768, par lesquels les maîtres serruriers, maçons, menuisiers et charpentiers font inscrire leurs noms à l'hôtel de ville et s'engagent, en cas d'incendie et au premier coup de cloche, à se rendre à la maison commune, suivis chacun d’un garçon, avec les outils nécessaires pour donner un prompt secours à l'incendie. Ils jurent, la main sur les Évangiles, de se conformer à l’article 15 de l’ordonnance prise par les consuls de la cité (3).
(1) Archives municipales. Registre consulaire, série D.
(2) Dictionnaire historique des institutions..., page 577, seconde partie.
(3) Cette ordonnance, en date du 7 décembre 1767, est signée par les consuls alors cn exercice, savoir : Jean-François-Gabriel de Girardin, Antoine-Dominique Morel, Jean- Mathieu Paul, Pierre-François Esbrayat, André Lyotard et Jean-Pierre Dubois.
Les articles 14 et 15 de ce document portent :
Article 14. — Les maîtres boulangers et fourniers ne peuvent point tenir leur bois et ramille servant à chaufer leurs fours dans les appartemens de leurs maisons "où passent les tuyaux des cheminées des fours ni dans les endroits mêmes où ces fours sont placés; mais il leur est enjoint de tenir ce bois dans des endroits éloignés de toute occasion de feu.
Article 15. — I doit être nommé tous les ans par les corps des maitres menuisiers, maçons, plâtriers et serruricrs, quatre maitres de chacun de ces corps, dont les noms doivent être inscrits à l'Hôtel de ville. Ces maitres sont tenus, au premier coup de cloche, lors d'un incendie, de se rendre à l'hôtel de ville suivis chacun d’un garçon portant tous les outils nécessaires, et ils donneront un prompt secours à l'incendie...
Au Puy, chès A. Clet, imprimeur du roi et de l'hôtel de ville. Placard in-folio. (Archives municipales.)
En tête de cette pièce sont, à gauche les armes de France, à droite les armes du Puy. Sur ces dernières, on lit cette légende: Sigillum civitalis Aniciensis.
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Le procès-verbal des maîtres serruriers contient les noms de Maurice Aymard, de Jean Olier, de Thomas Regourd et d’An- toine Boyer; celui des maîtres menuisiers et charpentiers ceux de Jean-Claude Vigouroux, Pierre-Antoine Bayle, Jean-Philippe Morel et Mathieu Roure ou Rome.
Enfin, au procès-verbal des maîtres maçons ont signé Vigou- roux, Jean Boyer et Molade, le quatrième ayant déclaré ne savoir le faire (1).
Une justice à rendre aux officiers municipaux du Puy, c’est que de tout temps ils ont tenu à honneur d'assurer la salubrité de leur cité et de prévenir les incendies qui la dévastaient. L’ordon- nance du 15 septembre 1753, que nous reproduisons en entier, témoigne de la sollicitude de nos consuls à l'égard des biens et personnes de leurs administrés.
« De.par le roy, et de l'ordonnance de Messieurs les consuls, « Juges de police de la ville du Puy, et banlieue d’icelle,
« Sur ce qui a été représenté au Conseil de ville ce jourd'hui « tenu à ce sujet que contre la disposition formelle des ordonnan- « ces de police qui ont été dûment publiées et affichées partout où «besoin à été, et encore contre la teneur de l’arrèt du Conseil «d’État du roy du 10 juillet 1744, qu’il se commet des abus qui «portent un préjudice considérable aux habitans et au bien « public, et qu’il arrive souvent desincendies par l’imprudence des « propriétaires ou locataires des maisons, à tout quoy il convient, « pour ramener le bon ordre, de remédier, et lecture faite desdi- « tes ordonnances et susdit arrèt, nous ordonnons l'exécution des «ordonnances de police cy-devant rendues et expressèment de
« Celle du 19 décembre 1741, pour être exécutée suivant sa forme «et teneur.
ARTICLE I‘.
« Ce faisant, pour prévenir les incendies qui arrivent fréquem- « ment dans cette ville, nous ordonnons qu'en conformité de l'ar- «ticle rv de l’arrêt du Conseil d'État du roy du 10 juillet 1744, « tous fourniers, boulangers, patissiers et autres propriétaires
(1) Voir trois procès-verbaux aux archives municipales. FF.-37 — n° 346.
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«ayant fours dans leurs maisons pour cuire le pain et viandes, « d’avoir des fours qui soient construits d’un pied d'épaisseur, «ou tout au moins d'un demi-pied, s’ils sont adosséz à quel- «que muraille, à peine de démolition et de vingt-cinq livres « d'amende, sur la vérification qui en sera faite Faisons défenses « auxdits fourniers, patissiers et à tous autres ayant fours, de « faire aucuns magasins de fagots, de quelle espèce de bois qu’ils « soient, pour le chauffage de leurs fours, dans les maisons’ où « lesdits fours sont construits, leur enjoignant, trois Jours après « la signification de la présénte ordonnance, de faire porter les- « dits fagots dans des granges séparées, éloignées, et qui soient « à couvert du feu, pour y aller prendre la provision nécessaire, « jour par Jour, avec défenses de s'en pourvoir et d'en garder « dans leurs maisons pendani la nuit, sous la même amende de « vingt-cinq livres pour la première fois, qui sera encourue sur «la première dénonce, et, en cas de récidive, à peine d’être « poursuivis extraordinairement.
ART. II.
« Faisons pareillement défenses auxdits fourniers, boulangers, « patissiers et autres propriétaires ayant fours dans leurs maï- « sons, d'y faire à l’avenir aucuns magasins de fagots, sous les « mêmes peines.
ART. III.
« Comme il nous a été raporté que plusieurs particuliers ne « laissent pas d’enfermer dans leurs maisons de la paille, malgré «les prohibitions si souvent réitérées, il est ordonné à tous les « habitans, ayant de paille dans leurs maisons, de la faire portier, « dans trois Jours après la publication de la présente ordonnance, « dans des granges séparées, éloignées, et qui soient à couvert
« du feu, sous les mêmes peines.
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ART. IV.
« Tous les fours construits, tant dans la ville qu'aux faubourgs « d’icelle, destinez à cuire le pain et viandes, les forges des ma- « réchaux, les fours, fournaux et fonderies des potiers, fondeurs, « presseurs et autres, seront visez et vérifiez par maîtres massons «ct charpentiers, en présence des commissaires cy-après nom- « mez, pour scavoir s'ils ont êté construits suivant les règles de « l'art, et en conformité de l’arrèt du Conseil d’État du roy du «10 juillet 1744 ; et, dans le cas qu’ils ne le soient pas, enjoignons «aux propriétaires, trois Jours aprés la visite, de faire les répa- « rations qui seront jugées nécessaires, et, sur leur refus, ordon- «nons que lesdits fours, forges, fournaux et fonderies seront « démolis à leurs fraix et dépens.
ART. V.
« [l est expressément défendu à tous fourniers, boulangers, « patissiers, fondeurs, potiers, presseurs, serruriers, maréchaux, «et à tous autres ouvriers de se servir en aucune manière « d’aucuns fours, fournaux, fonderies, forges, qui ne soient con- « struits au rez-de-chaussée, et sur le pavé ou sur la terre, à peine « de cinquante livres d'amende pour la première contrevention, «et, dans le cas de récidive, d’être poursuivis extraordinaire- « ment.
ART. VI.
« Faisons pareillement défenses à tous les susdits ouvriers, et
«à tous autres qui se servent du charbon, de le tenir ailleurs
« que dans les lieux voûtés, non sujets au feu, sous les mêmes « peines.
ART. VII.
« Il est enjoint à tous marchands, vendant et débitant de pou-
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« dre à canon, soufre, bitume, poix, résine et autres matières « sulfureuses, de les tenir dans des endroits à couvert du feu, à «peine de dix livres d’amende pour la première fois, et de con- « fiscation desdites marchandises pour la seconde.
ART VIII.
« Toutes denrées, de quelle espèce et nature qu'elles soient, « seront portées et exposées en vente à la place du Plo, «avec défenses aux traiteurs, hotes et cabaretiers de les enca- « parer et achetter ailleurs que dans ladite place, après dix heu- «res, de chaque marché, pour que les bourgeois ayent le tems « de se pourvoir, et, en cas de contrevention au présent article, «les contrevenans seront condamnez en l'amende de quinze « livres qui sera encourue sur la première dénonce, et les ven- « deurs condamnez en cinq livres d'amende, dans lesquelles « défenses sont expressément compris tous les encapareurs ou « encapareuses qui iront aux avenues de la ville et plus loin, « achetter le gibier et autres denrées, de quelle espêce qu’elles « soient, contre lesquels il sera extraordinairement procédé. En- « joignons à tous les habitans de cette ville, de l’un et l’autre « sexe, de les dénoncer au bureau de police.
ART. IX.
« Nous renouvellons, en tant que de besoin, l’exécution des « ordonnances cy-devant rendues au sujet des défenses à toutes « personnes de tout état et de toute condition qu’ils soient, de « Jetter, de jour ni de nuit, dans les rues et passages, aucunes «ordures ni immondices, ni d'en souffrir devant les portes de «leurs maisons, à peine de dix livres d'amende, qui ne pourra « être réduite ni modérée et qui sera encourue sur la première « dénonce, et ce, sans préjudice des dommages de ceux sur qui « elles pourront retomber.
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ART. X.
« Comme toutes les précédentes ordonnances ont proscrit l’en- «trée des cochons dans la ville, et que nonobstant cette sage pré- « voyance, les maîtres ou gardiens des cochons y en emmenent «journellement et les laissent vaguer pendant le courant de la « Journée dans les ruës, mème les plus fréquentées, nous per- «mettons, huitaine après la publication de notre ordonnance, à «tous les particuliers qui en trouveront dans la ville, de les sai- « sir et confisquer, comme dès à présent nous le leur permettons, «et que la confiscation tourne et cède moitié au profit des confis- «cans et moitié au profit des pauvres de l’Hopital-Général.
ART. XI.
« [1 est expressément défendu aux fourniers, boulangers et « à tous autres, de tenir aucune loge à cochons dans leurs mai- «sons ni dans la ville, à peine de cinq livres d’amende et de con- «fiscation desdits cochons.
ART. XII.
« Toutes voitures, chevaux, mulets, entrant dans la ville, « seront conduits par la bride ou licol, et les charretiers ne « pourront porter dans la ville qu’un fardeau de mille livres.
« Toutes lesquelles amendes et confiscations nous attribuons «aux pauvres de l’Hopital-Général de cette ville.
« Donné au Puy, au bureau de police, le 15 septembre 1753.
Louis VANEAU, premier consul.
Jean-Joseph BERARD, consul.
Georges BLANC, consul.
Toussaints DuBois, consul.
Jaques-Antoine BLANC, consul.
Jean ASTIER, Consul.
François MOURIER, greffier neue en chef.
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« Et pour veiller à l'exécution de la présente ordonnance, le « conseil et bureau de police a nommé pour commissaires, sça- « voir, conformément à la délibération prise à l'Hotel de Ville « le 14 dudit présent mois : |
Pour la place du Martouret et la rue de Porte-Equiere, Monsieur Dugaray, bourgeois. Monsieur Richond, bourgeois. Pour les rues de la Chaussade, les Courdelaires el fauxbourg Saint-Barthélemy,
Monsieur Barthélemy, avocat. Monsieur Balme, fils, bourgeois. Monsieur André, chirurgien.
Pour les rues du Collège, Meymard el aux environs, Monsieur Clet, marchand libraire, imprimeur. Monsieur Malescot, marchand libraire, imprimeur.
Pour la Boucherie, Chevrerie, Cadelade, rue Droite
el aux environs,
Le sicur Lhostal, hôte. Le sieur Joseph Alirol, boucher.
Pour Pouzsarot et fauxbourg Saint-Jean,
Le sieur Simond Malzieu, marchand, Le sieur Claude, charpentier.
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Pour la Hanute- Ville, les Tables et Boucherie-Haute,
Monsieur Duchamp Lacroix, avocat. Monsieur Breymand, procureur. Monsieur Boulhol, procureur. Monsieur Tholance, chirurgien.
Pour les rues des Furyes, Montferrand, fauxbourg Saint-Laurens,
Monsieur de Saint-Marcel. Monsieur de Montredon, avocat. Monsieur Rousson, avocat. Monsieur Obrier, marchand.
Pour la Grange- Vieille et Louche,
Monsieur Irail, bourgeois. Monsieur Gaigne, procureur. Monsieur Breisse, procureur. Monsieur Besqueut, marchand.
Pour les rues de Panessar, Chamarlen, Consulat, Vülle- Nenve, et les autres petites rues qui traversent jusqu'à celle de la Grange-Vieille,
Monsieur Alirol, avocat. Monsieur André, procureur. Monsieur Balme, fils, marchand Monsieur Malosse, marchand.
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Pour la rue Saint-Jaques, fauxbourg, rue des Ails, le Planet | et Granonulhet,
Monsieur Pichot, avocat. Monsieur Porral, bourgeois. Monsieur Mazet, procureur.
Pour la rue Saint-Gilles, le fauxbourg, les rues «e Mourques et de l'Ange,
Monsieur Christophe Genestet, bourgeois. Monsieur Deladevèze, bourgeois. Monsieur Imbert, procureur.
Pour les rues de Raphaël, la Saunerie-Vieille et derrière la prison,
Monsieur Roche, avocat. Monsieur Espanhon, bourgeois. Monsieur Martin, procureur.
Pour les rues de la Chanabouterie et Saunerie,
Monsieur Brun, avocat. Monsieur Jacques-Vital Sahuc, bourgeois. Monsieur Jacques-Vilal Bertrand, bourgeois.
Pour la Courrerie et la place du Plo, Monsieur Lanthenas, marchand. Monsieur Dupont, marchand. Monsieur Montagne, marchand.
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+
Placard in-folio. Au Puy, de l'imprimerie d'Antoine Clet, seul imprimeur du roy, rue du Collège.
Cette pièce porte en tête : à gauche, les armes de France ; à droite, celles du Puy.
Malgré les mesures de police édictées par nos édiles, les incen- dies se multipliaient de plus en plus et semaient partout l’alarme. Le feu éclatait de préférence chez les boulangers où s’entassaient d'immenses quantités de fagots de pin. Alimenté par des matières aussi combustibles, il se développait avec une incroyable rapi- dité et détruisait en un instant des maisons entières. Les consuls, désireux de remédier à l’une des principales causes du fléau, pro- hibérent d’une manière absolue les dépots de garne dans l'inté- rieur de la cité et projetèrent l’acquisition de pompes dont on se servait déjà dans plusieurs villes.
C’est, dit Chéruel, « dans les dernières années du xvrr* UC que l'on commença à faire usage des pompes portatives qui ser- vent encore aujourd'hui à combattre les progrès du feu. Elles furent officiellement établies à Paris au mois d'octobre 1699 » (1). Avant l'invention de ces appareils hydrauliques et même long- temps après leur découverte, des villes qui en étaient dépourvues avaient eu recours à de singuliers moyens pour l'extinction des incendies. On lit dans le Dictionnaire de Trévoux, au mot ser'in- que, « que l’on s’est servi dans les incendies de grosses serin- ques pour élever des eaux en l'air ».
M. Raymond de Saint-Sauveur, dernier intendant du Roussil- Jon, dans le compte qu’il rend de son administration, en 1790, dit : « La ville de Perpignan n'avait d’autres précautions contre les incendies que douxe serinques, dont douze hommes en titre, avec des privilèges, étaient chargés, et point de seaux pour trans- porter les eaux : J'ai fait faire cent vingt seaux d'osier doublés de cuir et deux corps de pompe (2).
Une délibération du 22 janvier 1779, témoigne que les consuls du Puy agitèrent la question d'achat de pompes à incendie :
« Par devant M. Nicolas Lobeyrac, avocat en parlement, pre-
(1) Dictionnaire des institutions, page 577. (2) Compte de l'administration de M. Raymond de Saint-Sauveur, intendant du
Roussillon. Paris, 1790, in-8, page 83. — Ce renseignement nous a été fourni par M. Paul Le Blanc,
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« mier consul, maire du Puy, en présence de MM. Marthory, « Reytout et Vacheron, consuls, et de M° Martin, avocat en « parlement, procureur du roi dudit Hôtel de ville, assemblés en « conseil général publié à son de trompe dans tous les carrefours «et lieux accoutumés, MM. Demorgue et Bérard, anciens con- « suls, le chevalier de Glavenas, Dulac et de Ferraigne, écuyer, « Boudinhon, Barthélemy fils, Abrial, Besqueut, Boulhol et Mar- « thory fils, avocat, Dolezon, notaire, Souteyran oncle, Brun et « Giraud, procureurs, Laurenson aîné, Lashermes, Hedde, Mou- « ton-Labastide et Esparon, négociants, Augier, Pradier, Bonnet. « Dupont et Rocher, marchands, Besse, praticien, Vallat, chirur- «gien, Laurent, fondeur, Guérin, traiteur, Breysse, caffetier, « Mazet, maréchal, et Ventajol, tisserand..…… À été exposè par « ledit M. Marthory que les incendies arrivés les 7 et 8 courant «et dont les suites paraissaient être si considérables, devaient « déterminer la communauté à prendre un parti qui put à avenir « tranquilliser les citoyens et leur procurer les mêmes secours « dont on jouit dans la majeure partie des villes. Sur quoi, de « voix et opinion unanime, il a été délibéré que les consuls se « procureraient tous les renseignements et ensuite feraient l’ac- « quisition de cinq pompes, avec les seaux et autres effets nèces- « saires pour leur service : voulant en conséquence qu'ils se « pourvoient incessamment pour lautorisation de la présente « délibération, leur laissant néanmoins la liberté de n'avoir d’ori- « gine que trois pompes, ou tel moindre nombre qu'ils verront « bon être, et que les fonds seront pris dans la caisse de la sub- « vention, à la charge du remplacement... »
Une autre réunion ayant eu lieu à l'Hôtel de ville, le 4 novem- bre 1779, M. Marthory exposa qu'en exécution de la délibéra- tion prise le 22 janvier précédent, les consuls avaient poursuivi une ordonnance de Mur l’intendant relative aux pompes que la Communauté désirait se procurer, et requit la lecture de ce docu- ment.
« Sur quoi, l'assemblée convaincue de la nécessité urgente des- « dites pompes, a nommé MM. Brun et Barthélemy fils, avocat, « Gardés, médecin, Blanc et Dubois, anciens consuls, et Esparon, « négociant, pour commissaires à l'effet de‘désigner la qualité « desdites pompes, sceaux et autres ustensiles, et, après leur rap-
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« port fait aux consuls, l'assemblée les autorise à faire les publi- « cations et affiches ordinaires à l'effet d'obtenir de l’intendant, à « la suite du devis prescrit par son ordonnance dont lecture a « été faite, la permission de passer bail ou faire la dépense et « prendre les fonds sur la caisse de la subvention, à la charge « du remplacement : l'assemblée exhortant lesdits consuls et « commissaires à ne pas perdre de vue un objet si intéressant « pour le public (1). »
L'année 1779 avait été fertile en incendies. Le 7 janvier, le feu dévorait la maison du sieur Guérin au Martouret et, le lendemain, celle du nommé Dupuy, près de la cathédrale. Ce dernier, ayant essayé de sauver quelques débris de son mobilier, trouva la mort au milieu des flammes. Marie-Agnès Berbegi vit sa maison flam- ber le premier octobre et le feu se manifesta aussi, dans le courant de cette même année, chez deux boulangers : Pierre Sahuc, Dus- sap, et sur divers points de la ville.
Sous l’impression de ces tristes événements, les consuls jugè- rent indispensable de prendre de nouvelles mesures de sécurité, et rédigèrent, le 19 octobre 1779, l’ordonnance suivante qu’a bien voulu nous communiquer notre ami l’abbé Payrard, curé de Cayres. Cette ordonnance de police fut rendue exécutoire par le parlement de Toulouse, le 22 février 1780.
DE PAR LE ROI, ET D'AUTORITÉ DE LA SOUVERAINE COUR. DU PARLEMENT.
Ordonnance de police concernant les magasins à bois des boulangers et autres tenant four dans la ville du Puy et ses faubourgs, avec l'arrêt d'homologation en la susdile cour.
Du 19 octobre 1779.
« Sur ce qui a été remontré par le procureur du roi en l'Hôtel « de ville qu’une des parties la plus essentielle de la police, et
(1) Archives municipales. Registre consulaire, séric BB,
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sur laquelle ses magistrats doivent porter le plus d'attention, c’est sans doute celle qui tend à prévenir les incendies, quel tableau plus touchant, et quels n’en sont pas les tristes effets? la seule habitation d'un père de famille dévorée dans un instant par les flammes, sa fortune entière souvent détruite : des mal- heureux qu'un zèle plus q'héroïque appelle au secours de ce père de famille, périr eux-mêmes sous les ruines qu’elles entraînent, les flammes porter bien plus loin leur ravage, et menacer tous les voisins occupés à garantir leurs effets, et
livrés au brigandage des scélérats qui viennent se mèler dans
la foule, et ajouter à des pertes plus grandes leurs rapines détestables : tel est d’une manière bien imparfaite le spectacle que présente à l'humanité chaque incendie, tel est le spectacle qui malheureusement ne se présente que trop souvent dans cette ville. Sans recourir à des exemples anciens, la seule année qui est prête à s'écouler, l’a vu plusieurs fois se renou- veller; la maison du S' Guérin, place du Martouret, incendiée le 7 janvier, celle du nommé Dupuy, près la cathédrale, réduite en cendres, le lendemain 8, le propriétaire de cette maison consumé lui-même par les flammes pour avoir voulu sauver quelques tristes débris de ses effets; celle de la nommée Marie- Agnès Berbegi, brulée aussi le premier octobre, plusieurs autres incendies dont on a eu le bonheur d’arrèter les pro- grès ; incendie chèés Pierre Sahuc, boulanger, incendie chès M. Imbert, avocat, incendie chès le nommé Dussap, boulanger, à la Chaussade, incendie chés Claude Brau, à la Porte d'Avignon, et bien d’autres, sans doute, qui ne sont point venus à notre connoissance.
« Mais en mème temps que nous sommes obligés de vous pré- senter cette image affigeante, nous sommes forcés de rendre justice à la vertu des généreux citoyens qui sont venus au secours de ces malheureuses victimes des flammes, et que vous ne sçauriés assez récompenser, si ce n’étoit pas insulter à leur wénérosité. Vous le sçavès, Messieurs, de quels dangers vous et vos concitoyens vous avés été menacés? des édifices mal construits, la plüpart bâtis en galandage seulement, nous avons peine à concevoir qu'avec le secours de ces généreux citoyens vous soyés parvenus à mettre des bornes aux progrès des
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« flammes. C’est un éloge que nous devons à votre activité et à « votre prudence. Nous vous en devons un second pour les « sages mesures que vous avés prises du depuis pour arrêter «encore mieux à l’avenir leurs progrès et les éteindre, si cela «est possible, en même temps qu’elles se sont manifestées. Mal- « gré l'impuissance de la communauté, des délibérations d’avoir « des pompes ont été prises, et nous sçavons que vous n’avés « perdu de vue cet objet dont l'exécution fera honneur à votre «zèle; mais vous n’avés point encore assez fait, et votre ouvrage « demeureroit imparfait si vous ne portiés plus loin vos soins.
« Ce n’est point assez que d’arrêter les progrès d’un incendie «quand la maison d’un citoyen est en flammes, vous devés « encore chercher à les prévenir. Au milieu des divers incendies «que nous venons de mettre sous vos yeux, nous nous sommes « occupés à en chercher les principales causes, et nous nous « sommes apperçus avec douleur que nombre de ces incendies « prenoient leur source dans les provisions immenses que les «boulansers et autres personnes publiques ayant four dans la « ville, ont d’un bois de branches de pin, vulgairement appellé de « la garne, si combustibles de leur nature et si faciles à s’enflam- « mer, qu'une seule étincele est capable de les allumer, et dont « ces particuliers remplissent leurs maisons. C’est dans la maison « d'un boulanger que s’est manifesté l'incendie du 7 avril. C'est « à un magasin de cette sorte de bois qu’avoit commencé celui « du 9 juin dans la maison d’Ignace Dussap, boulanger ; c’est «aussi à un magasin de même bois que prit le feu dans la mai- «son de Marie-Agnès Berbegi, laquelle fut réduite en cendres «et qui fit craindre pour tout un quartier de la ville. Et com- «ment seroit-il possible que ces tristes événemens ne se renou- «velassent souvent chès ces particuliers, obligés à chaque «instant d’avoir recours à leur magasin, obligés d'y pénétrer «avec de la lumière, puisque c’est presque toujours avant le «lever du soleil qu’ils échauffent leur four, puisque la plupart «font tout à la fois d’un mème appartement un magasin à « bois et une chambre à coucher.
« N’en voilà-t-il pas assez, Messieurs, pour exciter votre zéle? « Est-il absolument nécessaire que les personnes publiques « ayant four dans la ville, fassent aussi de leurs maisons un maga-
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sin de cette sorte de bois ? Si vous exigés qu'ils le tiennent hors la ville, ce pourra être pour eux un sujet de quelque petite dépense de plus : mais cette dépense, qui ne pourra ètre que très médiocre, peut-elle être mise en balance avec la perte d'une maison incendiée, d’une homme écrasé sous ses ruines, d’une maison qui se consume, d'un père de famille dévoré lui-même par les flammes ? cette dépense peut-elle être mise en balance avec le danger de voir réduire en cendres tout un quartier de la ville, une ville tout entière? Quand il s’agit de l'intérèt public, tout motif particulier ne doit-il pas se taire ? Ces mêmes personnes que vous gènerez en apparence, ne seront-elles pas dédommagées par la douce satisfaction d’avoir mis à l'abri et leur propre foyer et celui de leurs voisins?
« Toutes ces considérations nous obligent à vous requérir d'ordonner qu'il soit fait défense à tous boulangers et autres personnes publiques ayant four dans la ville, d'y tenir aucun magasin de bois vulgairement appellé garne ou autre destiné à échauffer leur four, à peine de contravention et d'amende, sauf à eux à se pourvoir de magasin hors la viile
« MARTIN, avocat et procureur du roi, signé.
« Nous consuls maire, juges de police de la ville et banlieue, faisant quant à ce droit sur les réquisitions du procureur du roi en la police, ordonnons à tous boulangers de la présente ville de se procurer un local hors les murs d’icelle, pour y tenir leurs garnes ou autres bois propres à échauffer leurs fours, et à ceux desdits boulangers qui habitent les fauxbourgs, sem- blable local éloigné des maisons où ils ont leur dit four, et ce, dans le délai de trois mois à compter de ce jour. Faisons inhi- bitions et défenses aux uns et aux autres d'avoir à l’avenir des garnes dans leurs maisons, sauf à eux d'aller chercher, jour par jour, la quantité de fagots qui sera nécessaire pour leur fournée dans les lieux ci-dessus désignés, et ce, sous peine de vingt-cinq livres d'amende pour la première contravention, et de plus grande en cas de récidive, exhortons les habitans voisins desdits boulangers de veiller à l’exécution de la présente ordonnance, en avertissant des contraventions dont ils seront instruits, et, avant faire droit sur le surpius des réquisitions dudit S' procureur du roi, avons ordonné qu’il sera incessamment procédé à la visite
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« des maisons et magasins de bois des autres habitans qui tien- «nent four, pour ensuite être fait tel règlement qu’il appar- « tiendra.
« Avons aussi ordonné que la présente sera imprimée, lue, « publiée et affichée partout où besoin sera.
« Délibéré à l'Hôtel de ville ledit jour, dix-neufvième octobre « mil sept cens soixante-dix-neuf, par-devant M'° LoBeyRrAcC, « premier consul, maire, MARTHORY, second consul, lieutenant « de maire, LYOTARD, PORTAL, REYTOUT et VACHERON, aussi « consuls, signés à l'original.
« Collationné GUILHAUME, secrétaire-greffier. »
Extrait des registres de parlement, du 22 février 1780.
« Sur la requête de soit-montré au procureur général du roi, « présenté à la cour le jour d’hyer par les maire et consuls de « la ville du Puy, à ce que pour les causes y contenues, il plaise «à la cour ordonner que l'ordonnance rendue par les supplians «en fait de police du dix-neuf octobre dernier, sera exécutée «en tout son contenu d'autorité de la cour. Vu ladite requète « de soit-montré dudit jour, ordonnance rendue par les maire et « consuls du Puy en fait de police du 19 octobre 1779, les con- « clusions du procureur général du roi, mises au dos de ladite « requête : la cour ayant égard à ladite requête, homologue et «autorise ladite ordonnance rendue en fait de police par lesdits « maire et consuls de la ville du Puy, le dix-neuf octobre der- «nier, laquelle sera exécutée de l'autorité de ladite cour en «tout son contenu, suivant sa forme et teneur.
« Prononcé à Toulouse en parlement, le 22 février 1780
« Collationné, VERLHAC, M" DELHERM NoviTAL, rapporteur, « controllé, VERLHAC, CAUNES, procureur. »
Au Puy, de l'imprimerie de Clet, imprimeur du roi et de l'Hôtel de ville. Placard in-folio portant en tète denx écussons, dont l’un aux armes de France et l’autre aux armes du Puy.
Diverses délibérations municipales démontrent l'importance qu'attachait la ville du Puy à se pourvoir le plus tôt possible de
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pompes à incendie ; mais il fallait, comme de nos jours, compter avec les formalités administratives. Toutes les dépenses de la cité devant être autorisées par l’intendant de la province de Langue- doc, il en résultait une procédure qui retardait considérablement la solution des affaires, mème les plus minimes.
Dans une réunion consulaire du 15 avril 1780, M. Marthory, consul, dit qu’une ordonnance rendue par M. de Rachat, en l'absence de Monseigneur l’intendant, le 19 octobre dernier, permet l’acquisition de pompes à incendie et de recevoir les offres et moindittes, après avoir procédé aux publications et affiches « en la forme et manière accoutumée ». Il ajoute que le sieur Pierre Keller (il se présenta seul) a offert, aux conditions énoncées au procès-verbal d'offres, de fournir deux pompes, moyennant la somme de 2,013 livres.
Cette proposition est acceptée par l’assemblée, qui autorise les consuls à obtenir de l’intendant la permission de passer un bail avec le sieur Keller, et de prendre les fonds nécessaires dans la caisse de la subvention de la ville, à la charge du remplacement par imposition (1).
Le 5 juin 1780, nouvelle réunion à l'Hôtel de ville, dans laquelle M. Marthory, deuxième consul, annonce que le sieur Jambon, pompier de Montpellier, « instruit des démarches que faisaient « les consuls, en exécution des précédentes délibérations de la « communauté, pour être autorisée à se procurer des pompes, « a fait signifier un acte auxdits consuls, contenant sommation « de lui communiquer les offres faites à ce sujet, et inhibitions « de passer aucun bail d’adjudication sans la susdite communi- « Cation.
« Sur quoi, il a été délihéré que le premier consul écrirait à « Montpellier, pour se procurer des renseignements sur les capa- «cités dudit Jambon, d'après lesquels il serait pris telle délibé- «ration définitive qu'il appartiendrait. »
‘nfin, dans une derniére réunion tenue le 25 septembre suivant, « a été exposé par M. Marthory, deuxiéme consul, que, « par une délibération du 5 juin dernier, M. Lobeyrac, premier « consul, maire, avait été prié d'écrire à Montpellier pour se
(1) Archives municipales,
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« procurer des renseignements, tant sur les talents de Jambon « que sur le véritable prix des deux pompes que la communauté « désirait depuis si longtemps se procurer, qu’en exécution de « ladite délibération, M. le premier consul avait reçu de bons « témoignages sur la capacité de Jambon, ensemble un devis de « ce dernier et une soumission de sa part au moyen desquels il « offrait de fournir les deux pompes énoncées dans son devis et « les ustensiles pour 3,150 livres payables en deux paiements « égaux le premier, lors de la réception desdites pompes, et le « deuxième six mois après, sans intérêts, sous son offre de faire «transporter à ses frais lesdites deux pompes et ustensiles, « d'accompagner le tout, de se rendre au Puy pour enseigner la « manœuvre desdites pompes, de payer les frais du bail et de « garantir lesdites pompes pendant une année et un jour.
« Sur quoi, l'assemblée considérant qu'il serait on ne peut « plus utile pour la communauté qu’un homme de l’art put ensei- « gner les manœuvres des pompes aux gens qui seront préposés « pour les servir, a autorisé le premier consul de traiter avec « Jambon, à tels pactes, clauses, charges et conditions qu’il « trouvera convenables aux intérêts de la communauté, approu- « vant d'hors et déjà ce qui sera par lui fait, en l’exhortant de « vouloir bien, lors de son arrivée à Montpellier pour l’assemblée « des États généraux, s'occuper d’un objet qui intéresse si essen- « tiellement les habitans qui n’ont pu voir, jusqu'ici, remplir « leurs vœux d’un établissement aussi essentiel. »
En l'absence de documents, il nous est impossible de connaître l'issue des négociations entamées avec le sieur Jambon.
Le palais épiscopal devint la proie des flammes le 22 novem- bre 1782. Arnaud se contente de mentionner ce sinistre, sans en indiquer la cause. Décrivant la façade et le grand escalier de la cathédrale, cet historien dit : « Parvenu au troisième paillier, on « trouve à main gauche l'entrée d’une petiteégliscappelée l’église « du Saint-Esprit; et du même côté et au paillier supérieur est « l'entrée de l’Hotel-Dieu. A main droite, et également lelong du « perron, on vort les ruines de l'ancien palais épiscopal, qui fut « incendié le 22 novembre 1782 (1)».
(1) Histoire du Velay, t. W, page 398.
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M. Augustin Péala, mort supérieur du grand séminaire du Puy, rapporte que Mgr de Gallard pleura lors de l'incendie de l'évèché en 1781. Une note, mise au bas de son ouvrage sur les martyrs du diocèse du Puy, (1) est ainsi conçue :
« Mgr de Gallard avait été nommé, en 1784, par le roi « Louis X VI abbé commendataire de Saint-Paul de Verdun. avec «la recommandation d'employer les revenus de cette riche « abbaye à la reconstruction du palais épiscopal qui avail été « cette année-là même la proie des flammes. La Révolution éclata « lorsque ces revenus allaient recevoir leur première destination. « Au lieu de servir à relever le palais de l’évêque, ils furent le « principal fonds réservé par la providence pour l'entretien de « l’évêque lui-même pendant les jours mauvais et pour le soula. « gement de bien des malheureux ; car le prélat, qui se conten- «tait de peu pour lui, était pour les autres d'une générosité sans « bornes. »
MM. Arnaud et Péala ne s'accordent point sur la date de cet événement. Mais il résulle des pièces de comptabilité de l'évêché du Puy déposées aux archives départementales, et dont M. Jaco- tin a eu l’obligeance de nous donner communication, que la des- truction du palais épiscopal a bien eu lieu en novembre 1782 et non en l’année 1784, comme l’assure M. Péala.
D'après ces documents, la réserve faite par le roi sur les reve- nus de l’abbaye de Saint-Paul de Verdun pour servir à la recon- struction de l'évêché du Puy s'élevait annuellement à dix mille livres et devait Ôtre perçue durant vingt-cinq ans.
Après la ruine de son évêché, Mgr de Gallard trouva un asile dans la maison de Brye et dépensa pour la réparer une somme de 3,186 livres, 16 sols. Deux mille livres lui furent allouéespar le roi Louis XVT pour frais de logement. Notre prélat occupa plus tard la maison de M. Nerestan, consacra à sa réparation 102 livres, 11 sols G deniers et solda, pour frais des procès-ver- baux d'incendie et déblais occasionnés par cet événement, 515 livres. Il achela ensuite une maison attenant à l’ancien évêché,
(5) Résultat d'une conférence ecclésiastique du diocèse du Puy tenue en l'année 18354 sur les martyrs du diocèse du Puy pendant lu Révolution française. Au Puy, Gaudelet, 1845, page 195.
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au prix de 5,000 livres, et paya 429 livres 9 sols, pour frais de lettres patentes permettant la démolition de la maison Pandrau, démolition nécessaire pour la reconstruction de l'évêché (1).
Malgré notre désir de reproduire le procès-verbal d'incendie de l’évèché du Puy nos recherches dans les minutes des notaires du Puy, ainsi que dans les archives municipales et départemen- tales, ont été infructueuses.
Nous ignorons la date précise de l'acquisition des pompes par la ville du Puy. Un fait certain c’est que le 21 avril 1788, Mourier- Dumoulin, tanneur, déclara avoir reçu de M. Dolezon, second consul, la somme de six livres « pour avoir décrassé et huilé les tuyaux en cuir des pompes de la ville » (2).
Le 17 septembre 1789, par l'ordre des consuls Dolezon et Roux, M. Corbye, régisseur des droits de subvention, reçoit mandat de payer à M. Vallat, chirurgien, chargé de l'entretien des pom- pes, la somme de quarante livres qui lui a été allouée pour l’an- née 1789, par délibération de la communauté (3). Le 23 novembre de la même année, la municipalité solde à Charreyre, maître ser- rurier, un mémoire dans lequel figure le prix d’une clef fabriquée pour l'endroit où sont les pompes (4).
Le feu, redouté dansles villes, ne l’était pas moins dans les cam- pagnes où les secours faisaient presque complétement défaut. Bien que le pétrole y fût inconnu à cette époque, l'absence de ramonage des cheminées, les granges remplies de paille, de foin et de bois, offraient trop de prise à l'élément destructeur pour qu'on ne prit pas les mesures préventives les plus minulieuses et les plus sévéres.
Vital Vigier, bachelier en théologie, curé et maire de Champa- gnac, près Brioude, prend, le 22 août 1790, un arrèté dont il est curieux de rappeler quelques articles :
(1) Le 22 avril 1872, par un vent violent du midi, le feu, qui avait couvé toute la nuit, se manifesta, dès le matin, à l'évêché du Puy dans la chambre du secrétariat. Au bruit de la générale battue dans les quartiers de la ville, les citoyens se portèrent en fou!e sur le théâtre du sinistre. Le secrétariat seul fut dévoré par les flammes, mais avec lui périrent beaucoup de papiers importants, des livres et une partie des ar- chives ; on trouva au milieu des cendres plusieurs sceaux en plomb qui scellaient les bulles des papes adressées aux anciens évèques du Puy.
(2) Archives municipales, série D.
(3) Ibid.
(4) Ibid.
32 MÉMOIRES
Article 2. — Les habitants seront tenus de ramoner les chemi- nées de leurs bâtiments, et, en cas de feu, par faute d’avoir été mal ramonées, le délinquant payera 200 livres d'amende, suivant l'ordonnance du 18 février 1730.
Article 5. — Il est défendu d'entrer dans les écuries, granges, avec du feu, si ce n’est avec des lanternes bien fermées.
Article 6. — Il est défendu à toutes personnes de transpor- ter du feu d’une maison à l’autre, si ce n’est dans une lanterne, ou au mieux au fond d'un sabot, à peine d'une livre d'amende ou d'un jour de prison (1).
Avant la découverte des allumettes chimiques, dans les villes comme dans les campagnes, on conservait précieusement, du soir au lendemain, le feu sous la cendre. A Vorey, il y a trente ans à peine, des plastrons de vieilles cuirasses servaient de cou- vre-feu. Dès le matin, beaucoup de ménagères allaient chez leurs voisines réclamer un tison qu'elles portaient le plus souvent dans un sabot hors d'usage. Des brins de chanvre décortiqué, appelés chenevottes, dont l'une des extrémités avait été plongée dans un bain de soufre, mis en contact avec le tison, faisaient Jjaillir la flamme.
Un procès-verbal de police mentionne, en l’an VII, et le troi- sième jour complémentaire, la présence d’une pompe à l'incendie des bains de M. Morel, officier de santé, situés au faubourg Saint- Barthélemy. Malgré la rapidité des secours, la moitié de l'’éta- blissement brûla avec les meubles et effets qu’il contenait.
Le registre de délibération du Conseil général de la com- mune (2) donne quelques détails sur l'incendie du couvent des Capucins arrivé pendant la nuit du 16 au 17 décembre 1791. Ce monastère, dans lequel on avait entassé les livres (3), parche-
(1) Renseignements dus à notre ami Paul Le Blanc. :
Au xvie siècle, les ofliciers du chapitre de Mende faisaient défense aux habitants de porter du feu découvert. (Inventaire sommaire des archives de la Lozère. — Arch. ecclésiastiques, t. kr, p. 227.)
(2) Archives départementales de la Haute-Loire.
(3) Ces livres provenaient des bibliothèques des chapitres du Puy et de Saint-Mayol, de la collégiale de Saint-Vosy, des couvents des Jacobins, des Capucins, des Cordeliers, des Carmes, des Chartreux de Brives et de Bonnefoi, des Bénédictins du Monastier, des Prémontrés de Doue et des communautés de religieuses de plusieurs ordres.
Ce renseignement est puisé dans un manuscrit de Garde des Fauchers, déposé à la
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mins, argenterie, ornements religieux, etc., des églises, servait aux administrations du département et du district. A l’aide des gardes nationaux et de la troupe de ligne, on sauva la majeure par tie des papiers et des archives. Le premier objet de la sollicitude des citoyens, dit le rapport que nous analysons, « a été d’enlever à travers les flammes ja bannière du département, et, escortée par un détachement de garde nationale, elle a été mise en dépôt dans la maison commune ». On soupçonna comme auteurs du désas- tre « les ennemis de la chose publique », et la municipalité fit incarcérer sur le champ le concierge et les autres habitués de la maison. Des remerciements furent adressés par le Conseil général de la commune à la garde nationale et au 67° régiment d'infanterie, ci-devant Languedoc, « pour les marques éclatantes de bravoure et de patriotisme qu'ils ont données dans cette circonstance ».
Le document suivant ajoute de nouveaux détails au précédent, et cite les titres des principaux ouvrages consumés dans cet incendie :
« On étoit alors bien loin de prévoir le désastre qui est arrivé « la nuit du 16 au 17 décembre 1791, où un incendie qui s’est mani- « festé tout à coup et avec violence au galetas de la maison « occupée par les deux corps administratifs, a consumé tous les « livres qui y avoient été transportées des ci-devant maisons, « corps et communautés ecclésiastiques supprimés, et qui avaient « êté rassemblés avec tant de soin. Parmi ces livres, il en étoit « de rares, d’autres précieux, et plusieurs qui réunissoient ces « deux qualités. On y distinguoit entr'autres ouvrages : la Bible « polyglotte de Vitrai, en 9 volumes gr. in-f°; Flandria illus- « trala, deux volumes même format dont on avoit offert, il y a « quelques années, cinquante louis; l'Histoire de France, par « Mezerai, 3 vol. in-f°, estimés par les bibliographes cent écus; « l'Histoire du Languedoc, par Dom Vaissette, 5 vol. in-f°; la « Géographie de la Martinière; le Dictionnaire de Trévoux; « les Œuvres de Thormassin; Gallia Christiana ; un superbe « Saint-Auguslin, presque tous les Pères et plusieurs ouvrages
bibliothèque publique du Puy et qui a pour titre : Le sorcier encyclopédique de la Haute-Loire pour la recherche et découverte de toutes sortes de monumens et anti- quités, concernans les arts, Les sciences et belles-lettres, dans toute l'étendue de la republique par un seul et méme exemple à suivre et à imiter, In-tol. de 37 pages.
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« non moins intéressants dont aucun n’a pu être sauvé des flam- « mes. L’accés du local où étoient les livres fut d’abord interdit « au dedans par l'embrasement subit de l'escalier qui y condui- « soit du premier étage et qui malheureusement étoit construit « en bois. Au dehors, le péril n’étoit pas moins réel par l'élé- « vation des fenêtres. Il fallut donc dévorer le double chagrin « de voir brulér la bibliothèque et de ne pouvoir soustraire aucun « livre aux flammes D'ailleurs il se peut qu’à l’arrivée des pre- « miers secours on eut pu sauver les livres en tout ou en partie, « mais on courut d'abord au plus pressé: on s’occupa des « bureaux, des registres et des papiers, et lorsqu'on s’avisa de la « bibliothèque, il n’étoit plus temps. Mais quelle perte! (1) »
La nouvelle de ce sinistre fut transmise à Paris par les admi- nistrateurs du département de la Haute-Loire qui reçurent du ministre de l’intérieur la lettre suivante :
Paris, le 18 décembre 1791.
« J'ai mis, Messieurs, sous les yeux du roi, l’adresse que vous avés fait parvenir à Sa Majesté, ainsi que les pièces qui y étoient jointes relativement à l'incendie de la maison occupée par les corps administratifs au Puy.
« Sa Majesté a applaudi au zéle que la garde nationale et la troupe de ligne ont manifesté dans cette occasion pour sauver de l'incendie les papiers de l'administration, et elle a également approuvé les mesures que vous avés prises pour réparer le dé- sordre qui a été la suite de cet évenement.
« Quant à la continuation des séances du Conseil du départe- ment, que vous avés cru nécessitée par les circonstances, Sa Maiesté s’en rapporte à ce que l'assemblée nationale jugera à propos de prononcer à cet égard.
« Au surplus, Messieurs, il est à désirer que les informations qui seront faites sur la dénonciation que vous avés chargé le procureur général syndic de faire à l’accusateur public, donnent des lumières sur les auteurs de cet évenement si, comme vous
(1) Procës-verbal des séances et delibérations du Conseil général d'administra- tion du district du Puy, département de la Haute-Loire, pour l'année 1791... Au Puy, de l'imprimerie de la société typographique, 1792, page 42, in-4.
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le soupçonnés, il est l'effet d’un dessein prémédité, et je vous serai obligé de m'instruire exactement de ce qui viendra à votre connoissance à ce sujet. « Le ministre de l'Intérieur « B.C. Cahier (1). »
Un arrêté du Directoire du Puy, rendu le 23 mars 1791, sup- prima six églises paroissiales, savoir : Saint-Pierre-le-Monastier, Saint-Georges, Saint-Pierre-la-Tour, Saint-Vosy, Saint-Jean-de Jérusalem et Saint-Marcel, avec permission toutefois d'exercer le culte dans celle deSaint-Pierre-la-Tour.Le mobilier de cette église brûla en mars 1792, et cet événement est raconté en ces termes :
« Cette dernière église, » dit M. Péala, « ne désemplissait pas de « fidèles ; ils y affluaient à toutes les messes qui s'y célébraient «sans interruption sur tous les autels, depuis une heure du matin « Jusqu'à une heure du soir. Cette atfluence continuelle dans une « seule église pendant que toutes les autres, sans en excepter « celle de Notre-Dame, étaient désertes, causa un violent dépit « aux patriotes. Sachant qu’ils pouvaient tout oser impunément, « ils conçurent et exécutèrent contre elle le plus noir projet. Au « moment convenu, vers les neuf ou dix heures du soir, pendant « une nuit obscure, ils s’y introduisent furtivement, ils y portent « du bois et y mettent le feu, après avoir tout disposé de manière « à ce que rien de tout ce qui peut ètre brulé ne soit épargné. « Au son du tocsin et aux cris ou plutôt aux hurlements que «les incendiaires font entendre de tous côtés, les catholi- « ques s’empressent de porter du secours, mais ils en sont empè- « chés par les patriotes, qui leur font toute sorte d’avanies. Le « feu a bientôt tout consumé. Autels, bancs, chaises, confession- « naux, portes, fenêtres, boiseries, tout devient la proie des flam- « mes. Un seul crucifix en bois, d’une grande dimension, quelque. « précaution qu’on ait pu prendre pour le faire brûler, reste « debout et intact, comme pour dire aux fidèles que quoiqu'on « puisse leur enlever tout, biens, parents, liberté, et la vie « même, jamais on ne pourra leur ravir celui qui peut eflicace- « ment les consoler dans les plus grands maux(£). »
(1) Archives départementales. (2) Conférence sur les martyrs du diocèse du Puy... page 95.
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Si le Puy possédait des pompes, il manquait de pompiers, et le feu, chaque année, étendait de plus en plus ses ravages, faute d’agents expérimentés pour le combattre. On ne pouvait comp- ter d'une manière sérieuse sur le concours du peuple. H fallait de toute nécessité, avoir sous la main des hommes disciplinés, exercés, obéissant à une bonne direction et soldés.
Le 4 nivôse an VI (21 décembre 1797), Portal, commissaire du pouvoir exécutif pres Fadministration centrale du département de la Haute-Loire, écrivait au citoyen Boudignon, commissaire du pouvoir exécutif près l'administration municipale du Puy :
+
CITOYEN COLLÈGUE,
« Depuis quelque temps des incendies se manifestent dans cette « commune d’une maniére effrayante. Dans l'espace de quelques « mois quatre maisons ont été consumées, deux personnes ont « été la proye des flammes.
« D’après les renseignements que j'ai recueillis, 1l est certain « que ces incendies ont pour cause la plus coupable des négli- « gences. Ici, c’est un boulanger qui porte dans son grenier et à « côté des fagots appellés vulguairement garne, des charbons « mal éteints. Là, on fait un essai de poudre. Enfin, l'incendie « d’avant-hier est causé par la plus grande imprudence, puis- « qu’on m'a assuré que c’est un brasier mis dans un lit qui a « OCCasionné ce désastre.
« Placé par la Constitution comme une sentinelle vigilante et «sans cesse active auprès des magistrats de cette commune, « vous devés veiller, avec la plus sévére attention, à l’exécution « des loix et particuhiérement à celles qui ont pour but d'assurer . la tranquilité publique, la sureté des personnes et des proprié- « tés. Reportés vous donc, citoyen collègue, aux lois sur la « police intérieure des communes, sur les ordonnances et les « délibérations des municipalités qui ont précédé l’administra- «tion prés de laquelle vous venés d’être appellé en qualité de « commissaire du gouvernement. Relisés, médités les diverses « dispositions que ces actes contiennent, et provoqués, par tous «les moyens que la loi met en votre pouvoir, lexécution de cel-
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«les que vous croirés propres à assurer une bonne police et la «tranquilité publique.
« Vous trouverés dans le code rural, plus précis dans ses dis- «positions que le code municipal, les mesures à ordonner par «les administrateurs municipaux, et dans la loi du 24° août 1790, «paragraphe 5°, titre X[°, article 3°, l’'énumération des objets con- «fiés à la vigilance et à l'autorité des corps municipaux. La «mème loi leur confie, en termes généraux, le soin de prévenir, « par des précautions convenables et de faire cesser, par la dis- «tribution des secours nécessaires, les accidents et fléaux cala- «miteux, tels que les incendies, etc.
« La loi du 6 octobre 1791 fixe précisément la nature des pré- «cautions, et l’article 9 du titre 2 de cette loi veut qu’au moins, «une fois par an, on fasse la visite des fours et cheminées de tou- «tes les maisons et de tous les bätiments éloignés de moins de «cent toises d’autres habitations, et que la démolition ou répara- «tion des fours et cheminées reconnus dans un état de délabre- «ment, qui pourrait occasionner un incendie ou d’autres accli- « dents, soit ordonnée et même par voye d'amende de 6 livres «jusqu’à 24 livres.
« L'expérience, citoyen collègue, donne toujours, en ce genre, «de funestes et douloureuses leçons, et le ravage des incendies « causés par le mauvais état des cheminées, doit convaincre tou- «tes les administrations qu’elles ne doivent pas se reposer sur « l'intérêt particulier qui, trop souvent, s’aveugle ou s'endort, «mais qu'il faut placer à côté de lui la sentinelle toujours éveillée, «toujours active de l'autorité publique.
« À l'égard des délits individuels contre la sureté personnelle «et la propriété, effets prémédités dela malveillance et de la per- « versité, le devoir du magistrat se borne à la poursuite des cou- « pables; mais il n’en est pas de mème lorsque la société ou une « partie de ses membres sont menacés, moins par les personnes «que par les choses, moins par le erime qui voile et dérobe «ses projets que par l’imprudence, la néglisence et l'ignorance « qui se laissent toujours apercevoir et contre lesquelles il est « toujours facile de se prémunir. Alors les obligations du magis- « trat sont de prévoir et d'empêcher, et il est responsable de tout « le mal qu’il n’a pas prévenu.
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« Ces principes, citoyen collègue, s'appliquent à toutes les « parties de la salubrité et de la sureté ; mais, pour ne pas affai- «blir votre attention en la faisant porter sur trop d'objets à la « fois, Je ne me suis occupé, dans cette lettre, que des dangers « causés par les incendies.
« Il est donc nécessaire, et je vous recommande expressément « de requérir de l'administration près de laquelle vous êtes placé, « toutes les mesures précitées et autres convenables. Vous veil- « lerés, avec la plus scrupuleuse exactitude, à ce que les mesures « arrêtées soient strictement exécutées; vous prendrés Connais- « sance des procès-verbaux de visites remis à l’administration « par les commissaires de police qui y auront procédé, assistés « des gens de l’art, s’ils sont Jugés nécessaires. Vous vous assu- « rerés que les réparations ou démolitions ont été faites, et, en « cas de refus ou de négligence, vous poursuivrés les contreve- « nans devant le tribunal de police correctionnelle, attendu que « l'amende encourue excéde trois journées de travail.
« Enfin, citoyen collégue, je me persuade que les administra- «teurs sentiront combien il importe de mettre de surveillance « et de sévérité dans l'exécution des mesures prescrites, et que «la négligence des uns ou l’indulsence des autres aurait les « effets les plus funestes, puisqu'indépendamment de la sureté « publique qu’elles compromettent, elles entrainent l’État à des « dépenses considérables pour indemniser les incendiés.
« Pour moi, citoyen, je vous déclare que, vivement pénétré de « l'importance de cet objet, et de conformité aux instructions du « ministre de la police générale, je provoquerai, en cas d’incen- « die causé par la négligence des fonctionnaires publics à remplir «ce que la loi exige d'eux, toute la sévérité du gouvernement « contre ceux qui auront négligé leur devoir et ceux qui auront «toléré les négligences.
« Vous voudrés bien, en m'accusant réception de cette lettre, « me rendre compte de vos diligences et de leur résultat. Salut et
« fraternité. « PORTAL. »
L'effet de cette lettre fut prompt et, le 11 du même mois, Bou- dignon informait le commissaire du pouvoir exécutif qu’il prenait
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des mesures pour organiser une compagnie de travailleurs, chargée de concourir à l'extinction des incendies.
Portal répondit à cette communication par la lettre ci-après datée du 14 suivant:
« CITOYEN COLLÈGUE,
ne
« Je ne puis qu'applaudir au zèle qui vous anime pour provo- « quer des mesures propres à prévenir et arrêter les incendies. « Celle dont vous me faites part dans votre lettre du 11 de ce « mois est, à mon avis, une des principales, et je la crois efficace. « L'administration centrale, à qui j’en ai fait lecture, a applaudi « vivement aux vues sages et prudentes que vous vous proposés « de mettre à exécution, et m'a chargé, en vous témoignant sa « Satisfaction, de stimuler votre zèle sur un objet aussi important. «Je vous invite donc à vouloir engager l'administration muni- « cipale, près de laquelle vous servés, à mettre tout en usage pour « organizer cette compagnie de travailleurs, et faire l’acquisition « de tous les objets généraux nécessaires à leurs opérations. Par « des recherches exactes vous parviendrez, je pense, à découvrir «nombre de ces objets qui, appartenant à la commune, ont été « enlevés à la suite des incendies par des hommes qui profitent « de ces moments de désastres pour s'approprier ce qui est ou « la propriété commune, ou la propriété particulière. J'aime à me « persuader que vous ferés de cet avis l'usage convenable. Le «Citoyen Jean-Baptiste Pons, entrepreneur des grandes routes, «pourra vous aider dans vos recherches et connait parfaitement « les objets .dont je veux parler; son patriotisme et son zèle me « garantissent d'avance qu’il s'empressera d’adhérer à votre invi- «tation. Ce citoyen peut en outre vous donner un mode d’orga- «nizalion et de composition de la compagnie dont:il s’agit. Vous « pouvés de plus appeler le citoyen Billuer (1), ingénieur, et le « citoyen Ooffarel (2), ingénieur en chef, et les inviter à vous faire « part de leurs avis et des moyens qu'ils connaissent propres à « prévenir et arrêter les incendies,
(1) Billoer. (2) O'Farrell,
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« Voici quelques uns de ceux qui m’ont paru devoir ètre con- « sacrés par une délibération expresse et solennelle de l’adminis- « tration municipale et exécutés strictement: 1° La prompte com- « position et organization de la compagnie de travailleurs dont il « s’agit. 2 Pour y parvenir, faire un appel solennel aux ouvriers, « tels que maçons, charpentiers, couvreurs, etc., etc. 3° Dès que « cette organization sera arrêtée, il sera fait un règlement pour « l'ordre du travail dans le cas d'incendie. Ce réglement con- «tiendra les outils dont chaque ouvrier doit se munir et faire « mention des récompenses accordées au zèle, à l’activité et au « courage de ceux des ouvriers qui se seraient distingués. 4° Ce « règlement arrêté par l'administration municipale serait lu à la « compagnie assemblée, et cette lecture serait renouvelée tous «les décadis, trente de chaque mois. Chacun de ses membres « promettrait ensuite d'en remplir exactement les dispositions. « 5° Ce même jour, il serail à propos qu’il y eut une conférence, « sous la présidence d’un administrateur municipal, entre les « chefs de la compagnie, en présence des ouvriers, sur les moyens « d'arrêter les incendies. Les ouvriers seraient entendus, et il « serait fait mention de leurs propositions, quand elles le mérite- « raient. 6° Il me paraîtrait convenable d'établir un conseil chargé « d’ordonner les mesures propres à arrèter les incendies. Il serait « composé des ingénieurs en chef et ordinaire, du chef de la « compagnie et de trois travailleurs, d'un administrateur muni- « cipal et d'un commissaire de police. Les citoyens seraient invités « de faire part des procédés qu'ils savent être utiles pour arrêter « les incendies, 7° Le réglement de la garde nationale, quant à « ce qui concerne les incendies, doit, à mon avis, coincider avec « celui qui sera arrêté par les travailleurs, et, en conséquence, « le chef de la force armée pourrait être appelé, pour faire part « de son avis. 8° Dans le choix des hommes appelés à former la « compagnie dont il est question, on doit bien faire attention qu'ils « réunissent aux connaissances de leurs arts ou métiers, la pro- « bité la plus austère et le civisme le plus pur. 9° Les citoyens «appelés à former la compagnie des travailleurs doivent être «connus de leurs concitoyens : en conséquence, la liste de « chacun des membres pourait être affichée à la porte de la « maison commune, et, le décadi d’après l’organisation, l’adminis-
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«tration municipale pourrait convoquer une réunion de citoyens « pour être présents à la reconnaissance des chefs de cetle com- « pagnie et à la lecture de cette liste de tous les membres qui la « composent. Le président profiterait de ce moment pour exhor- « ter tous les ciloyens à redoubler de zèle, de soin et d’exacti- «tude pour prévenir les incendies, et, dans le cas où il s’en « manifestât, de redoubler de zèle et de courage pour en arrêter « les funestes effets.
« Les chefs et les travailleurs promettroient, en présence du « peuple, de travailler de toutes leurs forces à remplir leur « devoir. Enfin, dans le cas qu'un ou deux travailleurs, par des «manœuvres savantes, où habiles, ou courageuzes, auroient ou «empeché le feu de se propager, ou sauvé quelques personnes « de la proye des flammes, la récompense pécuniaire qu'il lui «serait accordée serait placée distinctement le premier décadi « d’après, ou la première fûte nationale.
« Toutes ces dispositions, mon cher collègue, sont sans ordre «et sans suite; mais elles peuvent vous faire naïtre l’idée des « dispositions plus convenables et plus utiles encore. Je vous les «offre telles qu’elles sont, persuadé que vous les accueillerès « comme le gage de mon amour pour l’ordre et la sureté publi- « que, et ma volonté bien prononcée de vous seconder dans toutes « les occasions où il s'agira d’assurer et le repos et la tranquilité « de mes concitoyens, et le règne des lois, et le triomphe de la « république.
« Je vous remercie de l'avis que vous me donnés que les pom- « pes sont en bon état. Veuillés, je vous prie, veiller scrupuleu- « zement à leur entretien. Salut et amitié.
« PORTAL. »
Nous ne savons si, conformément au désir de Portal et de Boudinhon, les mesures qu'ils avaient adoptées reçurentun com- mencement d'exécution, mais ilest peu probable qu’une compa- gnie de pompiers, recrutée parmi des hommes de bonne volonté et ne recevant aucune rémunération, ait pu fonctionner d'une manière régulière, et tout porte à croire que les efforts de ces deux administrateurs restérent impuissants. La ville du Puy n'ayant pas les ressources suffisantes pour solder des pompiers,
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les choses en restèrent là (1). [1 fallait cependant en finir et donner des garanties de sécurité aux personnes et aux propriétés.
Le 8 germinal an XIII (29 mars 1805), le préfet de la Haute- Loire écrivait au maire du Puy :
« La multiplicité et le danger des incendies qui se manifestent « depuis quelque tems dans cette ville, demandent des mesures « de sureté et de précaution aussi pressantes que sagement con- « certées et généralement consenties.
« Je vous invite et vous autorise en conséquence à réunir le « conseil municipal et à le faire délibérer : 1° sur un plus grand « approvisionnement de pompes et la demande à faire au gouver- « nement d'appliquer à cette partie les fonds restés libres sur le « budget de l'an XIII; 2° sur l’organisation d’une compagnie de « pompiers, ouvriers maçons, charpentiers, assujettis à un règle- « ment, divisés en escouades, reconnaissant des chefs et recevant « à titre de primes une rétribution ; 3° sur la nécessité de faire « approvisionner les propriétaires de maisons d’un nombre de « paniers d'incendie proportionné à leur fortune, pour être les- « dits paniers mis de suite à la disposition de la mairie, en cas « d'accidents; 4° sur la démolition des forgers, sous l'inspection « de la mairie et dans un temps déterminé qui ne pourra être de « plus d’une année ; 5° sur la vérification extraordinaire des murs « de séparation d'une maison à l’autre et autres mesures d'ordre « qui pourront lui être proposées par M. l'ingénieur.
« Tous ces objets sont d’un intérêt trop majeur, M. le maire, « pour ne pas appeller tout le zèle du Conseil et le vôtre. Je vous «prie de me transmettre au plus tôt possible ses délibérations et « vos vues à cet égard, etc. »
Le conseil municipal du Puy ne resta point sourd à l'appel du premier fonctionnaire du département. S’étant réuni le même jour, il prit une délibération par laquelle il décidait :
1° L'achat de deux pompes de 12 lignes environ de diamètre et allouait pour cet objet. . ............... 8,000 livres.
2° L’acquisition de 800 DanivEs d'osier, Garnis en toile imperméable ou en basane, à raison de qua-
(1) Le 22 frimaire an XIII (13 décembre 1804), le feu dévoraplusieurs maisons dans Ja rue Grangevieille,
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tre hvres piéce (lus ui oetiret 1200 » 3° La formation d’une compagnie de pompiers-secou-
reurs composée de 25 hommes recevant annuellement,
ätitre de prime, savoir : le chef, 100 livres; les autres,
DUTIVPOS LE eus Huet eds es Lades aus 2e 1000 ) 4° Achat de 25 haches et 25 casques pour les pom-
piers et secoureurs, à 15 francs environ chaque, outils
pour incendie, tels que crochets, cordages, échelles,
ærandes cuves, elc. .... ee. ses oo ous. R000 » 9° Entretien des pompes et autres objets imprévus. . 1200 »
TOTAL........... 13700 »
6° Le Maire, Messieurs O’ Farrell et Billoer, membres du con- seil, sont nommés pour rédiger les règlements que devront suivre les pompiers et autres secoureurs dans les cas d'incendie, et pour l'exercice et la surveillance des pompes et autres objets desti- nés à arrêter ce fléau ; ladite commission demeurant aussi auto- risée à nommer les individus qui doivent composer la compagnie de pompiers et secoureurs, et l’invitant, au nom du bien public,
(1) A défaut de paniers, on avait employé jusqu'alors, pour le transport de l'eau ‘dans les incendies, des cornues et sceaux en bois, ainsi que l’atteste la délibération des consuls du 11 mai 1731, conçue en ces termes :
« Souteyran, consul, expose que lors des incendies arrivés rue du Consulat et place « des Tables, ils forcèrent les particuliers de Chamarlenc à fournir des cornues « et sraux en bois dont ils font commerce, partie desquels se sont perdus et d'autres « 80 sont brisés, qu'il convient de dédomager ces particuliers. Sur quoi l'assemblée « à l'unanimité, décide de prendre sur les imprévus pour dédomager lesdits par- «ticuliers. (Archives municipales.)
Le 13 ventôse an XIII (4 mars 1805), le maire du Puy présente au conseil un travail du sieur Brun, directeur des travaux de la commune, sur le moyen d'arrèter les incendies. « Cet objet étant de la plus grande importanee a été renvoyé à l'exa- men de la commission qui est invitée de faire un rapport circonstancié afin que l'as- semblée puisse, par l'adoption des mesures aussi sage que promptes, prévenir les malheurs souvent incalculables qu'entraine ordinairement la manifestation de ce fléau. » (Archives municipales.)
À la date du 14 germinal an XIII (4 avril 1805), le conseil municipal vote une somme de cent francs au sieur Brun, en reconnaissance des services qu'il a rendus, et notamment du zèle et du courage qu'il a montrés lors des deux derniers incendies qui se sont manifestés dans cette ville. (Archives municipales.)
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de s'occuper sans retard del’exécution des mesures confiées à ses SOINS ;
7° Les propriétaires des maisons sont invités par la mairie de se pourvoir d'un nombre de paniers pour incendie proportionné à leurs facultés. Si cetteinvitation n’avait pas tout l’effet désiré, l'autorité interviendra pour les y contraindre ;
8° Il sera demandé au gouvernement l'autorisation d'employer, de suite à l’achat des objets ci-dessus les fonds restés libres sur Je budget de l’an XIII, sauf à compléter l’excédent des dépenses lors de l'exercice de l’an XIV (1).
Pendant la formation de la compagnie des gardes-pompiers- secoureurs, un immense incendie consuma, le 4 nivôse an XIV (25 décembre 1805), une maison située au pied du rocher de Cor- neille. Voici le procès-verbal dressé à cette occasion par MM. Dugone, maire, et Bollon, adjoint (2).
« Le mercredi, 4 nivôse an 14 (25 décembre 1805), FA la ville « du Puy, cheflieu du département de la Haute-Loire, sur les « 4 heures du soir, un violent incendie s’est manifesté dans la mai- «Son appartenant aux demoiselles Gaïlhard-Couteaux, comme « ayant succédé à feu M. Pouderoux, prêtre, ladite maison située « dans la partie la plus haute et la moins accessible de la ville, au « pied d’un rocher dit de Corneille, qui la limite au nord, section « À, n° 54, le vent souflant de l’ouest.
« Sur l’avis qui en a été donné, les autorités civiles et militaires « se sont de suite portées sur les lieux; le tocsin d’allarme a sonné, « la générale a été battue dans toute la ville.
« Malgré les obstacles presque insurmontables qu’opposait la « montée rude, la rigueur du froid et les rues étroites, courtes et « mal percées par où il fallait passer, /es pompes ont été dirigées « vers le lieu de l'incendie par les particuliers qui s’étoient déjà « présentés à la mairie pour être admis dans le corps des gar- « des-pompiers-secoureurs qui va être formé, et elles ont été « employées aussi utilement que la situation des lieux a pu le « permettre.
« Les secours ont été prompts et distribués avec ordre; les
(1) Archives municipales, (2; lbid.
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«habitants, les ouvriers surtout, ont montré le plus grand zèle «et le plus grand empressement, malgré les chutes fréquentes «et réitérées que le verglas occasionnoit dans des rues toutes en « pente, rapides et fort étroites. Les citernes, qui étoient la seule «ressource pour l’eau dans cette partie de la ville naturellement «privée de sources quelconques, ont été ouvertes de tous côtés, « des vases ont été prètés pour suppléer aux panniers dont le « nombre étoit, insuffisant pour former les chaines nécessaires à « la fourniture de l’eau qu’exigeoit le service des pompes.
« Mais, malgré la plus grande activité possible dans les secours, «la violence du feu étoit telle qu'on reconnut l'impossibilité « absolue de sauver la maison d’où l'incendie étoit venu et qu'on «a été obligé de diriger les secours de manière à garantir les «maisons adjacentes, l'Hôpital général surtout, qui n’en est séparé «que par une rue fort étroite, et qui auroit infailliblement été «incendié, malgré tous les secours possibles, ainsi que plusieurs «autres maisons, si la neige dont les toits étoient couverts n’avoit «servi à éteindre les charbons ardents à mesure qu'ils y tom- « boient.
« Les flammes ont donc malheureusement dévoré la maison « Gailhard-Couteaux sus-énoncée, en partie celle de M. Bertrand- « Rousson, même section À, n° 52, et fortement endommagé « celle de M. Arnaud, prètre, vicaire de Notre-Dame, section sus- « dite, n°51, et ce n’a élé que vers les neufheures du soir, etaprès « plusieurs abattis, que toute crainte de nouvelle communication « du feu a entiérement cessé. On s’est alors retiré, en laissant néan- « moins sur les lieux une garde pour la sureté des effets, avec les « pompes et quelques uns des aspirans pompiers pour veiller sur « le feu amorti et écrasé jusqu’au bas de la maison.
« De tout quoi nous maire et adjoints, soussignés, avons fait et « rédigé le présent procès-verbal qui sera couché au registre des « actes dela mairie et envoyé à M. le Préfet, avec prière de vou- «loir bien faire vérifier et estimer légalement les pertes et les « dommages occasionnés par l'incendie, à l'effet d'accorder et de « faire obtenir à ceux qui ont eu le malheur de les éprouver les «indemnités auxquelles leur infortune et leur détresse leur « donne droit de prétendre. Fait au Puy à l'hotel de ville les jour, « mois et an susdits. »
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Dans sa réunion du 5 nivôse an XIV (26 décembre 1805), le conseil municipal du Puy arrèta définitivement la formation dela compagnie des pompiers-secoureurs, chargea le maire de l’or- waniser, et lui adjoignit pour cette opération M. O’ Farrell, ingénieur en chef, et M. Billuer, ingénieur ordinaire du dépar- tement et membres dudit conseil. Il fut convenu que la compa- snie serait composée de 34 hommes, savoir : 1° un capitaine et un lieutenant ; 2° deux sergents ; 3° quatre caporaux: 4° 26 pom- piers et un ou plusieurs tambours de la ville. Ïl était alloué 200 francs au capitaine, 150 francs au lieutenant, 100 francs à chacun des deux sergents, 65 francs à chacun des quatre capo- raux, enfin 50 francs à chaque garde-pompier (1).
Un arrêté du préfet, en date du 20 janvier 1806, approuva la création de cette compagnie dont les membres furent installés le 2 février suivant.
La rédaction d'un règlement concernant l'uniforme de la com- pagnie, sa police, sa discipline, l’ordre du service, etc, confiée à MM. O’ Farrell, Billoer, Dugone, maire, et Bollon, adjoint, fut terminée le 21 juin 1806. Ce réglement compte 51 articles : nous reproduisons ceux qui ont trait spécialement aux incendies.
Service lors des incendies.
XXX. Aussitôt qu’un incendie viendra à se manifester, et à la premiére alerte, tous les gardes-pompiers se rendront de suite. en casque, au dépôt, pour sortir les pompes et leurs agrès, et les diriger de suite, vers le licu de l'incendie.
XXXI. Le capitaine, l'architecte et les quatres gardes-pom- piers-sapeurs, munis de leurs haches, au lieu d'aller au dépôt, se rendront en hâte à l'endroit où le feu se sera manifesté : ils examineront l’état des choses et feront tous les préparatifs nêces- saires. De suite, le capitaine reviendra seul à la rencontre de la compagnie ; il dirigera sa marche, fera placer les pompes cet
(1; Consulter pour de plus amples renseignements la brochure in-& de 18 pages, imprimée en 1807 chez J.-B. La Combe, sous le titre de : Gurdes-Pompiers de la ville du Puy, chef-lieu du département de la Haute-Loire, |
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s'emparera de la maison incendite dans laquelle personne, autre que les pompiers et les propriétaires ou locataires, ne pourra entrer, sans une mission expresse de l'autorité.
X XXII. Les gardes-pompiers ne pourront désemparer, même aprés l'extinction du feu et la cessation de tout danger et de toute crainte de communication, qu’en vertu d'un ordre du maire, à eux transmis par leur capitaine. Cet ordre ne sera donné que lorsque les pompes, agrès, paniers et autres accessoires auront été réunis, reconnus et comptés.
XXXIIT. Il est défendu aux gardes-pompiers d’accepter du vin de qui que ce soit, lors des incendies. Le capitaine pourvoira à leurs besoins à cet égard, lorsqu'il le jugera nécessaire, après en avoir néanmoins référé au maire.
Récompenses et gratifications.
XXXIV. Indépendamment de l'indemnité ou solde affectée annuellement aux gardes-pompiers, il sera accordé des récom- penses à ceux qui se seront distingués par quelque action d'éclat et de dévouement.
XXX V. Il sera constamment accordé douze francs à celui qui sera arrivé le premier au dépôt des pompes, et six francs au second. Lorsque plusieurs gardes-pompiers se seront rendus au même instant, la gratification sera partagée entre eux, par égales portions.
XXX VI. Les dispositions de l’article précédent ne sont point applicables au garde-pompier qui sera de service à l'hôtel de ville, ainsi qu’il est dit ci-après, article XLIII.
Compagnie auxiliaire.
XX XVII. Indépendamment de la troupe de ligne, sur le zèle de laquelle la ville se repose toujours, il sera formé et choisi, parmi les habitans domiciliés et propriétaires, une compagnie auxiliaire de 50 hommes, qui aura ses officiers et sous-ofliciers.
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XXX VIII. Ses fonctions seront de garder les passages et avenues, d’écarter la foule, de protéger et de faciliter les manœu- vres des pompiers, de faire former les chaînes pour le transport de l’eau, d'utiliser les individus en état de travailler, de faire res- pecter les propriétés, et surtout de surveiller les démeublements.
XXXIX. Chaque membre de cette compagnie se rendra en armes, au premier signal, au lieu de l'incendie, et se rangera sous les ordres de ses officiers. [l y en aura cependant toujours douze, désignés d'avance par le capitaine, qui, au lieu de courir au feu, se rendront au dépôt, pour protéger la sortie des pompes et agrès, et les escorter jusqu’au lieu de l'incendie, où ils se réu- niront à leur compagnie.
Réunion des autorités.
XL. MM. les maire, adjoints et commissaire de police se réuniront, en cas d'incendie, dans un local voisin, le plus à por- tée de recevoir les rapports qui devront être faits de l'état des choses, et de transmettre plus promptement les ordres néces- saires. Ce poste sera indiqué par une écharpe suspendue exté- ricurement, et à l'endroit le plus apparent : la porte en sera gardée par deux membres de la compagnie auxiliaire.
XLI. Le zèle qu'ont toujours montré, lors des incendies, MM. les ingénieurs des ponts et chaussées, donne tout lieu d'espérer qu’ils voudront bien se réunir aux autorités, dans ces circonstances malheureuses, pour les aider de leurs conseils et surveiller la direction des secours.
XLII. Le capitaine des gardes-pompiers et l’architecte de la ville, après avoir vérifié les lieux et fait les premières disposi- tions qu'ils auront jugées convenables, viendront rendre compte à l'assemblée de l’état des choses et prendre les ordres du maire qu'ils transmettront à qui de droit : ils renouvelleront ces rap- ports toutes les fois que les circonstances l'exigeront.
Précautions et secours généraux.
XLIIT. Depuis le premier de novembre jusqu’au 31 de mars, inclusivement, il y aura pendant la nuit un garde-pompier, par
LE FEU AU PUY 49
tour de rôle, de service à l'hôtel de ville; il y veillera, et se tien- dra toujours prêt, pour qu’en cas d'incendie les dispositions préliminaires soient plutôt faites.
XLIV. Au premier avis, il chargera le concierge de faire avertir le maire, les adjoints, le commissaire de police, ainsi que le capitaine des gardes-pompiers et celui de la compagnie auxi- liaire, en commençant par ceux dont la demeure sera plus à la proximité de l’hôtel de ville.
XLV. Chaque jour de spectacle, deux gardes-pompiers, un officier ou sous-officier, à tour de rôle, seront de service à la salle, et se placeront sur le théatre, en arrière des coulisses ; ces deux pompiers et leur chef auront leur entrée gratis.
XLVI. Ils seront munis de deux petites pompes, et de tout ce qui sera jugé nécessaire par l'officier ou sous-officier qui com- mandera. Deux cornues pleines d’eau seront placées auprès d'eux. Le propriétaire de la salle et le directeur des spectacles sont tenus, sur leur responsabilité, de l’exécution de cette dispo- sition.
XL VIT. I] sera nommé un nombre suffisant de ramoneurs auxquels on pourra faire quelque avantage pour les fixer pen- dant toute l’année dans la ville. Ils auront le privilège exclusif de ramoner les cheminées : ils les visiteront toutes les fois qu'ils en seront chargés par l'autorité compétente et dont ils exhiberont l'ordre par écrit aux propriétaires ou locataires qui ne pourront ni en empècher, ni en retarder l’exécution, sous les peines de droit.
XLVIII. Aussitôt l’alerte donnée, ces ramonceurs se rendront au lieu de l'incendie, où ils seront sous les ordres du capitaine des pompiers : ils auront droit, suivant les circonstances, aux récompenses accordées par les articles 384 et 35.
XLIX. Pendant la durée des incendies qui surviendront la nuit, tout propriétaire ou locataire sera tenu d'éclairer au moins le premier étage de sa maison.
L. Les puits et citernes particuliers seront à l'instant ouverts et à la disposition de l’autorité. Il sera dressé à cet effet un état exact, par section, numéro et noin, des propriétaires et locataires de toutes les maisons qui en contiennent.
LI. I] sera ouvert au secrétariat de la mairie un registre pour
4
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y recevoir les déclarations des particuliers qui voudront se pour- voir, à leurs frais, de paniers ou seaux pour incendie : ils les feront marquer à leur gré et les garderont chez eux.
LIT. Aussitôt que le tocsin où la générale annoncera que le feu s'est manifesté quelque part, ou à la première alerte, les proprié- taires des paniers les porteront ou les feront porter pleins d'eau aux lieux de l'incendie, afin de pouvoir donner plus promptement les premiers secours. Si quelques uns de ces paniers venaient à se perdre lors des incendies, la ville les remplacera.
‘LIT. L'établissement d’une compagnie de gardes-pompiers et d'une compagnie auxiliaire ne dispense pas les autres habitans de porter, dans ces tristes et malheureuses circonstances, tous les secours dont ils sont capables. C'est un de ces services mutuels dont la société et les lois imposent à tous l'obligation 1la plus stricte (1). ‘
Napoléon [°* sanctionna par un décret rendu à son quartier- général de Mersebourg, le 19 octobre 1806, l'établissement des pompiers du Puy. Voici le décret :
« Au quarticr-général de Merscbourg, le 19 octobre 1806. « Napoléon, empereur des Français et roi d’Italie, sur le rapport « de notre ministre de l'Intérieur; notre Conseil d'État entendu, «nous avons décrèté et décrétons ce qui suit :
ARTICLE PREMIER
« [1 sera établi dans la ville du Puy, département de la Haute- « Loire, une compagnie de pompiers, qui sera organisée confor- « mément au réglement ci-Joint, arrèté par le conseil municipal « de ladite ville.
@ IL. — Il sera formé sur le traitement annuel accordé à chacun «des individus composant ladite compagnie une retenue de cinq « pour cent, qui sera déposée dans [a caisse d'amortissement, « aussitôt que la somme excédera trois cents francs, afin de for- « mer, avec les intérèts annuels, un fonds de retraite pour les
Em
(1) Gardes-pompiers de la ville du Puy.
LE FEU AU PUY 51
« pompiers qui seraient obligés de cesser leur service à raison de « leur âge ou d’infirmités contractées dans l'exercice de leurs « fonctions.
IT. — Notre ministre de l'Intérieur est chargé de l’exécution du « présent décret. |
« Signé Napoléon. , , . & « Par l’empereur : le secrétaire d'Etat « Signé, HugesB. Maret(1). »
Aux termes de Particle 37 du réglement précité, la municipa- lité organisa, le 16 mars 1807, une compagnie auxiliaire de 50 bommes choisis parmi les propriétaires et chargés de maintenir l'ordre et de faire respecter les propriètès lors des incendies. Ces auxiliaires des gardes-pompiers avaient leurs officiers el sous-officiers. MM. Bertrand-Rousson et Guigon, propriétaires, remplirent les fonctions de capitaine et de lieutenant, M. Tho- mas-André, horloger, celles de sous-licutenant. Au nombre des fusiliers, on comptait MM. Assézat, notaire, Calemard-Latour et Beaud de Brives, propriétaires, Belledent et Giron, avoués, Morel, docteur en chirurgie, Munier, officier de santé, Clet, imprimeur, Paris-Mathicu, orfévre, Pichot, expert, Tardy,phar- macien, etc., etc. (2)
L'article 50 du même réglement portait : « Les puitset citer- nes particuliers seront à l'instant ouverts et mis à la disposition de l’autorité. [l sera dressé à cet effet un état exact, par sec- tion, numéro et nom des Pire aires et locataires, de toutes les maisons qui en contiennent.
En exécution de cet fut dressé, le 16 mars 1807, l’état, en forme de tableau, des puits et citernes de la ville, et l'on constata l'existence de 159 puits et de 53 citernes.
L'installation des gardes-pompiers est consignée dans un pro- cés-verbal du 2 février 1806 déposé aux archives de la mairie du Puy. En voici le contenu :
« L'an 1806 et le dimanche, deuxième jour du mois de février,
1} Gardes-pompiers de la ville du Puy. (2) Incendies, extrait des registres de la mairie du Puy, chef-lieu du départe- ment de la Haute-Loire, Au Puy. J.-B. La Combe, 1807. In 8 de 20 pages.
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en la ville du Puy, chef-lieu du département dela Haute-Loire, «et en exécution des dispositions de l’article 2 de l’arrèlé de « M. le Préfet du 20 janvier dernier, dont il sera parlé plus en « détail ci-après, il à été procédé à l'installation du corps des « gardes-pompiers, ainsi qu'il suit :
« En conséquence de la lettre circulaire adressée par M. le « Maire à chacun des membres de ce corps, le 27 janvier der- nier, ils se sont rendus sur les dix heures du matin à l'Hôtel de ville où étaient déjà réunis M. Dugone, maire, M. Bollon, « premier adjoint, MM. O’ Farrell et Billoer, membres du con- « seil et de la commission par lui formée pour ce qui a rapport aux pompes à incendie, et le secrétaire en chef de la mairie. « Aprés s'être assuré, par un appel nominal, que tous les par- «ticuliers élus membres de la compagnie des pompiers étaient « présents, sauf un, M. le Maire a ouvert la séance, et le secré- taire en chef a fait lecture : 1° de la délibération du conseil « municipal du 8 germinal an XIII qui, entre autres dispositions, « détermine la formation d'une compagnie de pompiers et charge « M. le Maire de l’organiser conjointement avec MM. O0’ Farrell «et Billoer, membres dudit conseil ; 2° de l’arrêté pris en consé- «quence par M. le Maire, le 5 nivôse an XIV (26 décem- « bre 1805), portant établissement de cette compagnie et nomi- nation “des membres qui doivent la composer : 3° de l’arrèté de M. le Préfet du 20 janvier dernier qui approuve le précédent, et ordonne que ladite compagnie sera installée un jour de « dimanche par M. Ile Maire qui lui fera prèter serment, et fera reconnaître les officiers et sous-ofliciers ; 4° enfin, de l’arrèté pris par M. le Maire, le 27 du même mois, pour l’enregistre- « ment de celui de M. le Préfet et la convocation des pompiers « aux présents Jour, lieu et heure.
« Aprés cette lecture, M. le Maire, adressant la parole aux « gardes-pompiers, leur à dit :
« Messieurs, il faut en convenir, et nous devons le dire à l’hon- « neur du pays, nulle part dans les incendies les secours ne sont « aussi prompts et aussi abondants que dans cette ville : les «citoyens de toutes les classes, pleins de zèle et portés de la « meilleure volonté, y accourent en foule. Cependant, on ne peut « se le disshnuler, et il n'est pas un de vous qui ne l’aye remar-
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qué, cette foule de secours, cet excès de zèle se trouvant mal dirigés, produisent souvent de la confusion et même du désor- dre. Ce fut pour y remédier, et afin de rétablir l'ordre si nécessaire dans ces moments désastreux, que le conseil muni- cipal, convoqué extraordinairement par M. le Préfet, délibéra, ie 8 de germinal an XIIT, 1° qu’il serait fait l'acquisition d'une pompe à incendie du premier ordre avec tous les accessoires ; 2° qu’il serait créé une compagnie de pompiers, avec solde et uniforme ; 3° enfin, que la mairie serait chargée de l’exécution de ces deux objets, et qu’il lui serait adjoint pour cela une commission prise dans le sein du conseil municipal, composée de MM. O’ Farrell et Billoer.
« Cette commission n’a pas perdu de vue un objet aussi inté- ressant. Elle a fait venir de Lyon une pompe qui, d’après les derniers essais qui en ont été faits, notamment dans le dernier incendie, produira l'effet qu'on en atlendait. Elle a nommé les membres qui doivent composer le corps des gardes-pompiers, et c'est afin de l’organiser définitivement que vous êtes réunis aujourd’hui.
« Gardes-pompiers de la ville du Puy, cheflieu du départe- ment de la Haute-Loire, voilà le nom que portera désormais le corps dans lequel vous allez entrer, ou pour mieux dire que vous allez former.
« Prévenir les incendies par votre vigilance, en arrêter les pro- grés aussitôt qu’ils ont éclaté, conserver la fortune et les pro- priétés de vos concitoyens, arracher parfois aux flammes et à une mort certaine des malheureuses victimes, tels sont Îles devoirs qui vous sont imposés : ah! sans doute, il n’en est pas de plus doux ni de plus satisfaisants pour l’homme vertueux.
« Ces corps, dans toutes les villes où ils existent, jouissent de l'estime et de la considération publique, et c’est non seulement à leur utilité et aux services qu’ils rendent à la société qu’ils en sont redevables : ils la doivent encore plus particulièrement à la moralité, à la bonne conduite et au désintéressement des membres qui les composent ; ils la doivent surtout à l'ordre, à la subordination et à l'exacte discipline qui y régne.
« Celui que nous créons aujourd’hui et dont vous êtes la pierre
« fondamentale, ne le cédera en rien, quoique nouveau, aux plus
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« anciens. Le zèle, l’amour du bien public et les autres qualitès « personnelles qui vous distinguent nous en donnent la certitude.
« Quant à vos chefs, la commission s’applaudit tous les jours « de son choix, ils sont dignes de vous commander. Les talents « qui les distinguent, le zéle qui les anime et dont ils ont fait « preuve tant de fois, doivent vous inspirer la confiance et la « déférence la plus entière à leurs ordres. »
« Cela fait, la compagnie et les membres de l’autorité étant « descendus sur la place de l'hôtel de ville, il a été fait un roule- « ment de tambour après lequel M. le Maire a dit :
« Gardes-pompicrs de la ville du Puy, vous jurez obéissance « aux Constitutions de l'empire et fidélité à l’empereur ; vous pro- « mettez de rempliravec exactitude, zéle et courage, les fonctions « qui vous sont confiées, et d’obéir aux chefs qui vous seront « donnés. »
« Alors les membres de la compagnie ont successivement levé « la main droite à Dieu et prononcé individuellement ces mots : «Je le jure. »
« Les tambours ayant ensuite battu un ban, M. le Maire a dit:
« Gardes-pompiers de la ville du Puy, vous reconnaîtrez en « qualité de capitaine commandant M. Joseph Reynaud, que «J'ai l'honneur de vous présenter, et vous lui obéirez dans tout « Ce qui concerne le service pour lequel vous êtes institué. »
« Aprés un nouveau ban pour chaque présentation, M. Reynaud « a présenté successivement, dans la même forme et avec les « mêmes Injonctions, à la compagnie qu'ilcommande: 1° M. Louis « Girard-Gendriac-Paris, en qualité de lieutenant ; 2° MM. Augus- « tin Girard-Gendriac-Rabaste et François Benoit, en qualité de « sergents ; 3° M. Joseph Margerit, en qualité de caporal-fourrier, « et MNT. Louis Rabaste, Bernard Bouchardon, Pierre Rocher «et André Bernard, en qualité de caporaux.
« Enfin M. le Maire à annoncé au corps des gardes-pompiers «qu'il était définitivement organisé en compagnie régulière et, « dés à présent, installé dans les fonctions relatives à son insti- «tution Ïl lui à aussi annoncé qu'on allait s’occuper incessam- «ment de régler son uniforme, sa tenue. sa police, sa discipline « et l’ordre du service auquel il sera oblisé, tant pendant l’année « et ordinairement, que lors des incendies,
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« Aù moyen de quoi la cérémonie se trouvant terminée, l’on « s'est séparé, et les membres de l'autorité étant . rentrés. à « l'Hôtel de ville, il a été fait et rédigé de tout te.dessus le présent « procès-verbal qui a été transcrit au registre des actes de 14 « mairie, signé par MM. lés Maire et adjoint, MM. les membres « de la commission, MM. les capitaine et lieutenant, et contre- « signé par le do en chef de la mairie, au FANARES jour « mois et an susdits.» la
«: La compagnie de os fut pour la première fois passée ‘et reyue sur la place et promenade. du Breuil ‘par le Cofps - müni- cipal, le 28 décembre 1806. D'intéressants détails relatifs à cêtte cérémonie sont consignés dans le procès-verbal ci-après: © ©:
« L’an 1806 et le dimanche 28 du mois dé décembre, ‘à 9 heures « du matin, en la ville du Puy, chef-lieu du département de la « Haute-Loire, et dans une des salles de l'Hôtel de ‘ville où étaiènt « réunis en costume MM. Dugoné, maire, Bollon, ‘adjoint-ä-la « mairie, O'Farrell, ingénieur en chef du département, Billoer, «ingénieur ordinaire, membre du conseil municipal et de.l4 com: a mission formée pour l'établissement dés pompes et des’ pom- « piers, Tardi, commissaire de policé, et Gaubert, secrétaire em a chef de la mairie, se sônt présentés MM. Reynaud et Girard- a. Gendriac, capitaine et lieutenant de la compagnie des pompiers: « de cette ville, lesquels ont dit, qu'en exécution des ordres à « eux donnés d’après l’arrèté de la mairie du 22 do ee mois, cé « corps avait été convoqué et était en.ce moment stationné su? « la place et promenade du Breuil. | | 2 : « En conséquence les fonctionnaires ci-dessus dénommés sé sont ‘transportés, avec. lesdits capitaine et lieutenant, sur 14 « place sus-énoncée où ils ont trouvé Ia compagnie des gardes- « pompiers en uniforme et en grande parade, ayant avec elle les « trois poinpes montées sur deux trains, les paniers, échelles, « crochets, scies, haches et autres outils ou'agrès employ és lors « des incendies... MM. les Maire, adjoint et commissaire, ont « passé en revue Ja compagnie et ont fait l'inspection de tous les « objets d’habillement, d'équipement et d'armement qu'ils ont « trouvés parfaitement en régle. Ils ont ensuite examiné et vérifié «les trois pompes et leurs agrés qu'ils ont aussi trouvé en bon « état et propres à servir sur le champ, si le cas le requérait,
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« La compagnie ayant ensuite formé un cercle au centre duquel « étaient MM. les fonctionnaires publics, il a été fait un roule- « ment de tambours suivi d’un ban, et M. le maire s'adressant « aux gardes-pompiers leur a dit : « Il va vous être donné lec- « ture d’un décret impérial qui établit votre compagnie et qui « est une marque bien honorable pour notre ville et pour chacun « de vous de la sollicitude de Sa Majesté qui, du milieu des « camps, des champs même de ses triomphes et de sa gloire, « cinq jours après la bataille d’'Iéna, à très peu de distance de « Berlin, a bien voulu s'occuper de vous, donner une institution « émanée de son autorité immédiate, et vous ménager des « retraites au besoin. Ce doit être pour vous le motif le plus fort « d'encouragement et la récompense la plus flatteuse de votre « zèle. »
« Alors Île secrétaire en chef de la mairie a fait la lecture à « haule et intelligible voix du décret impérial.
« Cette lecture, écoutée attentivement et avec le plus vif intérèt « de la part tant des gardes-pompiers que de nombreux specta- «leurs, a été suivie d’applaudissements et d’acclamations. Les « cris de Vive l’empereur ! ont retenti de toutes parts.
« Après un roulement de tambour, la compagnie s’est formée « sur deux rangs. Les membres de la mairie et de la commission « s'étant placés au milieu, et les tambours en tête, le cortège ainsi « formé s’est transporté à l'hôtel de la préfecture dans la cour « duquel la compagnie est entrée, pendant que les fonctionnaires « ont été introduits, avec le capitaine et le lieutenant, dans cette « salle et admis à l'audience de M. le Préfet à qui M. le Maire a « adressé la parole d’abondance et à peu près ainsi qu’il suit :
« M. le Préfet, au nom de la ville et de son administration, « nous nous rendons auprès de vous pour avoir l'honneur de vous « présenter la compagnie des gardes-pompiers, nouvellement « établie dans cette ville sous vos auspices. Ce n’est que d’aujour- « d’hui qu’elle est complétée et équipée. Ce n’est que d’aujour- « d’hui qu’elle est vraiment instituée et définitivement organisée « par le décret impérial dont nous venons de lui donner solennel- « lement connaissance. Nous nous empressons donc de vous en « offrir les prémisses, et nous vous prions d’en agréer l'hommage. « Ce corps, si intéressant par son objet, et qui, par vos soins,
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« vient d'obtenir l'honneur d’une institution impériale qui lui « assure l'existence et la stabilité dont les établissements de ce « genre ont besoin pour atteindre le but qu’on se proposait en les « formant, ce corps s’efforcera de mériter de plus en plus votre «appui et la protection spéciale de Sa Majesté, en continuant de « déployer ce zèle, ce dévouement et cette ardeur infatigable « dont il a déjà donné des preuves, quoique à peine formé. Mais, « M. le Préfet, il désirerait, et nous joignons nos vœux aux siens, «que vous voulussiez bien, en lui continuant votre bienveillance, «en faire la revue. »
« Après avoir témoigné de la manière la plus affable et la plus «affectueuse combien il était sensible à cette demande, M. le « Préfet s’est empressé de se transporter, avec M. le secrétaire « général et MM. les fonctionnaires dénommés ci-dessus, sur « la place dite du greffe, située tout près de l’hôtel de la préfec- «ture et où la compagnie avait été conduite. Il en a été fait la «revue la plus exacte, vérifiant tout, examinant tout avec le plus « grand détail, et cette attention digne d’un magistrat qui s’inté- «“resse vivement à tout ce qui peut être avantageux à ses admi- « nistrés et surtout à des établissements qui, comme celui dont «il s'agit, sont d'une utilité générale et d’une nécessité si indis- « pensable.
« Pendant le cours de cette opération, M. le Préfet a adressé la « parole en particulier à plusieurs gardes-pompiers sur diverses « parties de leurs manœuvres lors des incendies, et a fait voir «qu’il n'était pas à beaucoup près étranger à la théorie. Il a « déclaré être extrêmement satisfait de la bonne tenue de la « compagnie et, adressant la parole à tous les membres en géné- « ral, il leur a fait sentir la dignité de leurs fonctions, l’impor- «tance des services qu’ils sont appelés à rendre, l'indispensable « nécessité de l’ordre, de la subordination et d’une bonne disci- « pline dans leur corps. I] a ajouté qu’il était persuadé que, bien « loin de se relacher en rien du zéle et du dévouement désinté- «ressé qu'ils avaient montrés dans plusieurs circonstances mal- « heureuses, ils redoubleraient d’exactitude, d’empressement et « d'activité pour se rendre toujours plus dignes de la protection « de Sa Majesté, de la confiance des autorités locales, de l'estime «et de la reconnaissance de leurs concitoyens.
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« On ne se flatte pas d’avoir rendu icitout ce qu'a dit M. le Pré- « fet, on n'en donne qu’une bien faible esquisse, qu’une idée trés « imparfaite. Ce magistrat a été écouté avec la plus grande atten- « tion et un profond silence qui n'a été interrompu que par des « marques sensibles d’aprobation et des cris de : Vrre l’empe- « réur ! : «La compaynie, ayant ensuite fait quelques évolutions, a défilé devant M. le Préfet, et l’a accompagné à son hôtel avec « MM. les Maire, adjoint et commissaires ; et, après avoir pris « congé de ce magistrat, le cortège est retourné à l'Hôtel de « ville, dans le mème ordre qu’il était venu, et l’on s’est séparé.
« On doit observer en finissant que, partout où la compagnie «des gardes-pompiers s’est montrée aujourd’hui, l'affluence des & citoyens qui s’empressaient d'accourir pour la voir était si « considérable, qu’elle n’a pas toujours été libre dans ses mou- « vements. On témoignait hautement la satisfaction avec laquelle « on voyait formé un établissement désiré depuis longtemps, et « qui-donne enfin à chacun, en cas de malheur, l’assurance d un «a secours assuré, prompt et efficace. « Et plus n'ayant été procédé, le présent procès-verbal a été fait, clos et signé au Puy, à l'Hôtel de ville, le use jour 28 de décembre 1806.
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DUGONE, maire.
Par M. le maire, le secrétaire en chef de la Mairie, GAUBERT.
. «Liste des gardes-pompiers :
1° Deux ofliciers.
MAI. Reynaud (Joseph), horloger, capitaine. Girard-Gendriac-Paris (Louis), artiste, lieutenant.
R&° Deux sergents.
Benoit (François), armurier. Margerit (Joseph), sellier,
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_8° Quatre caporaux.
Bernard (André), charpentier. Bouchardon (Bernard), char- pentier.
Rabaste (Louis), tanneur. Rocher (Pierre), cordonnier
4 Vingt-six gardes-pompiers.
Arnaud (Jean), charpentier.
Auger (Michel), fontannier.
Bérard (André), charpentier.
Bérard (Jean-Baptiste), char- pentier.
Breysse (François), maçon.
Chabrier (Joseph), charpen- tier.
Chomelix (Jean-André), char- pentier.
Conforts (Antoine), charpentier.
Delors (Pierre), charpentier.
Giron (Claude), charpentier.
Grégoire (Etienne), charron.
Maisonneuve (Claude), chau- fournier.
Méchain (André), cordonnier.
Plantin (Jean), maçon. Rikler (André), tonnelier. - : , Rival (Louis), menuisier. Rivet (Claude), charpentier. Rivier Lapierre (Jcan-André), charpentier. | Romeuf (François), charpen- tier. , | Rostaing (Vital), charpentier. Saby (Benoit), charpentier. Séjalon (Barthélemy), maçon. Simon (Pierre), charpentier. Solvain (Joseph), charpentier. Tremoulières (Augustin), me- nuisier. | Valeyre (Gabriel), cordonnier.
Malgré le dévouement et le courage des gardes-pompiers, le tocsin et la générale retentissaient fréquemment aux oreilles des citoyens du Puy. Des imprudences répétées, le manque de sur- veillance, le défaut d'attention provoquaient l’explosion d’'incen- dies dans la ville. Une lettre du maire, en date du 2? mars 1807, rappelle aux habitants les mesures de sécurité prescrites par ses prédécesseurs. Voici cette lettre :
Le Maire de la ville du Puy à ses concitoyens,
« Depuis quelques années les incendies se sont multipliés dans «cette ville d’une manière effrayante. La mairie, sous les aus- «pices de M. le Préfet, et secoudée par le conseil municipal, a
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« employé tous les moyens que les localités pouvaient permettre, « pour arrêter le cours d’un pareil fléau.
« Une compagnie de gardes-pompiers a été établie : le zèle, le « dévouement des chefs et des membres qui la composent, vous « sont déjà connus.
« Une compagnie auxiliaire, choisie parmi les propriétaires, «est chargée, lors des incendies, de surveiller les démeublemens, « faire former les chaînes pour le transport de l’eau et d'utiliser « les individus en état de travailler.
« Une grande pompe, et tous les agrès nécessaires ont été « ajoutés aux faibles ressources qui nous restaient, lors de ces « malheureux événemens. Ces mesures d’utilité publique ont « reçu la sanction de Sa Majesté Impériale.
« C’est à vous, citoyens, à seconder, par vos efforts mutuels, ce « que la mairie a déjà fait pour le plus grand bien de cette com- « mune. |
« Un registre est ouvert au secrétariat pour y recevoir les « déclarations des particuliers qui voudront se pourvoir, à leurs « frais, de paniers ou seaux à incendie. Ces paniers seront leurs « propriétés ; ils les garderont chez eux; ils les porteront ou « feront porter pleins d’eau, au premier signal, au lieu où le feu « se sera manifesté, afin de pouvoir donner plus promptement les « premiers secours : si quelques-uns de ces paniers venaient à se « perdre dans ces circonstances, la ville les remplacera à ses frais.
« Mais si la mairie n’a rien négligé pour arrêter les progrès « des incendies, c’est à vous, citoyens, à les prévenir par une pru- « dence soutenue, par une surveillance journalière et presque « minutieuse.
« Que les cheminées, surtout celles des cuisines, des fours, des « forges, soient ramonées plusieurs fois dans l'année.
« Ne vous permettez jamais d'entrer avec des pipes allumées, « des lumières à chandelle ou à huile, dans tout local qui contien- « drait du foin, de la paille, du charbon, du bois, de la garne, de « la brousse, à moins que ces lumières ne soient renfermées dans « des lanternes bien closes.
« Que les boulangers et autres, qui sont dans l’usage d'éteindre « de la braise pour la revendre, ne la déposent que dans des « endroits voûlés, et entièrement à l’abri du feu.
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« Que les habitants aient soin de fermer les fenètres ou lucarnes « de leurs galetas et de tout local qui renfermerait des matières « faciles à s’embraser.
« Surtout vous, propriétaires, portez sans cesse un œil attentif « sur un abus bien funeste à cette ville. Des personnes, par une « imprudence coupable, ne craignent pas de mettre dans leur lit « des brasiers, des chaufferettes ou des tuiles brulantes pliées « dans un ou plusieurs linges. On dépose souvent, sans la moin- « dre précaution, et pendant la nuit, ces brasiers ardens, ces « chaufferetles, sur une table ou sur un plancher. Surveillez ces « usages abusifs, et, sous aucun prétexte, ne les tolérez Jamais.
« Qu'aucun feu ne soit allumé dans les rues, dans les places « publiques ; qu'aucune fusée ou pétard ne soit jamais tiré dans « l’enceinte de la ville : la loi le défend. Péres de familles, secon- « dez le vœu de la loi par vos exhortations et l’autorité pater- « nelle.
« N'oubliez jamais que les incendies sont presque toujours « occasionnés dans cette commune par défaut d'attention ou par « des imprudences impardonnables.
« Rappelez-vous que ces terribles accidens peuvent dans «quelques instans vous faire descendre de l'opulence dans la « plus affreuse misère.
« Que l'expérience du passé serve de leçon pour l'avenir; que « tous les habitans apportent la surveillance la plus scrupuleuse « pour prévenir ce terrible fléau : qu'ils n’oublient jamais que «lorsqu'il vient à se manifester, tous, sans exception quel- « conque, doivent porter les secours dont ils sont capables ; que «c’est un de ces services mutuels dont la société impose à tous « l'obligation la plus stricte, et que celui qui ne le remplit pas « est puni par la loi et par le mépris de ses concitoyens.
Au Puy, à l'Hôtel de viile, le 2 mars 1807.
DuGonE, maire (1). Après la mort de M. Reynaud, capitaine de la compagnie des
(1). Archives municipales.
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pompiers, M. de Bastard, préfet de la Haute-Loire, écrivait, le 8 janvier 1819, au maire du Puy :
« Monsieur le Maire,
« La mort de M. Reynaud, capitaine du corps des pompiers de « cette ville, paraît avoir fait tomber en désuétude l'usage de « répéter périodiquement, et à des époques assez rapprochées, les « manœuvres de la pompe. Il en résultait le double avantage « d'entretenir les pompiers toujours parfaitement au fait de cet «exercice, et celui de réparer et tenir en état les machines et « agrès destinés à éteindre les incendies.
« Je ne puis trop vous recommander de veiller à ce que ces « manœuvres soient reprises et régulièrement répétées, et les pompes et leurs accessoires visités et réparés, s’il y a lieu. Je vous serai très obligé de me faire connaître le résultat des « ordres que vous aurez donnés à cet effet.
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« Agréez, etc., etc.
Un mémoire qui a pour titre : Un projet d'amélioration ct d’accroissement de secours contre les incendies, adressé, le 12 juin 1821, au maire du Puy, par J.-B. Thioulouse, inspecteur de la compagnie des sapeurs-pompiers de cette ville, débute ainsi :
« Malgré le zèle que vos prédécesseurs ont déployé pour l’or- « ganisation des secours contre les incendies et les quinze années «qui se sont écoulées depuis que ce service a été créé, aucune « espèce d’accroissement ni d'amélioration ne s’y fait remarquer. « Aujourd'hui, comme à cette époque, une pompe compose tout « le dépôt, et il ne parait pas que ia compagnie de pompiers, « chargée de la diriger, ait acquis l'instruction nécessaire pour « remplir ce devoir avec succès. Enfin, on ne peut se dissimuler « qu’il n'existe dans ce précieux établissement une pénurie et «un engourdissement qui, Lôt ou tard, pourraient devenir funes- «tes, si cet état de choses n'avait déjà attiré votre attention et « votre sollicitude.
« Animé par ces considérations et le désir d’être utile à mes « concitoyens, je m'empresse de soumettre à votre sagacité ce
DU & nans— "ON SRE = — BB CSS CNE
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« que mes faibles connaissances dans cette partie m'ont suggéré. «….. N'ayant pas moins en vue l’économie que l'utilité, «je vais tâcher de démontrer que, sans excèder les sacrifices « pécuniaires que la ville peut s'imposer à ce sujet, on peut former « une collection de pompes à incendie très analogue aux localités «et qui, par conséquent, offrirait de grandes ressources contre « ces déplorables événemens. Pour parvenir à ce but, Je commen- « cerai de placer en premiére ligne la pompe double existant dans « le dépôt. Ce n’est pas que j'entende accorder à cette pompe des « qualités supérieures à celle qui va lui succéder immédiatement ; « au contraire, j'ai la certitude que lorsqu'il serait possible de « comparer leurs effets physiques, elle n’obtiendrait que le second «rang; mais cette préférence lui est dévolue en raison de sa forme « volumineuse et embarrassante. Au surplus, je ne la rapporte ici « que pour présenter le tableau de la collection dont il s’agit ; et « comme les pompes qui la composent varient entre elles par « leurs dimensions, leurs formes et leurs produits, que Sous Ces « divers rapports elles sont susceptibles de recevoir des desti- nations différentes, qu’enfin rien n’est plus essentiel à observer « que l'ordre et la régularité dans l'application de ces secours, il « nous paraît convenable, pour prévenir toute confusion, de dési- « gner chaque pompe par un nom. En conséquence, nous désigne- «rons par le nom d'Amphitryte la pompe que nous venons de « signaler, qui se trouve représentée en perspective el dans l'état « de repos par la figure 1" de la planche ci-jointe.
« La figure 2° de la même planche représente, sous Îles mêmes « points de vue, une pompe double de 4 pouces 1:2 de diamétre « que nous nommerons Téthys; c'est une de celles qui seraient à «acquérir ............... Cette pompe est montée sur une « espèce de traîneau ou patin que l’on place à volonté sur un char- « riot à deux roues pour faciliter son transport. De cette maniere « trois hommes suffisent pour la conduire rapidement partout où « le besoin le requiert. Arrivée au lieu de l'incendie, on la des- « cend de dessus son charriot, sans que ectte manœuvre exige un « plus grand nombre d'hommes. Alors sa légéreté permet de l’in- « troduire dans les corridors, allées, basses-cours, jardins, et « même aux divers étages d'une maison pour la rapprocher du « principal foyer, afin de l’attaquer plus vivement...
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« Ces deux pompes, étant bien servies, pourraient sans doute, dans beaucoup de circonstances, produire de merveilleux effets; mais devant être particulièrement destinées à agir con- tre le principal foyer, 1l ne conviendrait point d’en détourner leur action pour subvenir à des besoins qui peuvent naître au même instant dans les bâtimens voisins du feu. Il est donc très nécessaire qu’elles soient accompagnées d’autres pompes qui, sans être d’une aussi grande dimension, puissent néanmoins arrêter denouveaux malheurs. Nous trouvons le moyen d'établir ce précieux renfort dans les débris des deux anciennes petites pompes qui existent au dépôt, desquelles on n’a pu jusqu’à pré- sent obtenir aucun service, parce qu’elles sont montées sur un mauvais système, La plus grande, qui peut avoir environ 3 pou- ces, nous paraît susceptible d’être remontée sur les mêmes prin- cipes que la précédente en lui conservant sa forme double. Plus légère que la Téthys, on pourrait la manœuvrer jusques sur les toits, et son jet s’élèverait de 50 à 60 pieds. Il est facile de sen- tir que cette pompe serait d’une grande ressource dans notre ville où la plupart des maisons ont un accès difficile, des escaliers étroits et rapides........... .. Cette pompe pour- rait recevoir le nom d’Océanie.
.« Les inconvénients que nous venons de citer sur les construc- ions généralement vicieuses des maisons de la ville du Puy, nous engagent à placer ici..... la pompe simple, de 4 pou- ces 1,2, représentée par la figure 4, sous le nom d’Aréfhuse. Elle serait à acquérir. C’est principalement sous le rapport de sa forme que nous la présentons et qu’elle ferait le complé- ment de la collection, attendu qu’il se trouve bien des cas et des positions qu'il n’est pas possible de déterminer ici où une pompe double ne peut être mise en manœuvre. Elle serait donc destinée à prévenir ces difficultés. D’ailleurs, la hauteur et la vélocité de son jet peuvent, dans toutes les circonstances, ren- dre d'éminents services... Les figures 5 et 6 représentent deux petites pompes simples et portatives que nous nomme- rons les Naïades. Pour faciliter leur transport, on les entre- pose sur un petit haquet en forme de brouette. Ainsi placées, un homme peut en conduire une très facilement. Ces deux nym- phes seraient créèes des débris de la plus petite des pompes
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« appartenant à la mairie, qui est d’une trop faible dimension pour «être conservée dans sa forme double. En la divisant on aurait « deux petites pompes qui, quoique simples, lanceraient l’eau de « 36 à 40 pieds de haut... On pourrait aussi les destiner au « service du théâtre, lors de son ouverture. Aucune autre espèce « de pompes ne saurait mieux y convenir... De ces six pompes, « deux seulement seraient à acquérir. Les autres proviendraient, « ainsi que nous l'avons déjà observé, de celles que la commune « possède, arrangées sous de meilleures formes. Ce moyen serait «sans doute bien plus avantageux à la mairie que celui de faire «la vente des débris de ces machines... Ensuite, si parmi «les mesures de prévoyance que peut dicter votre sagesse, M. le « Maire, la nécessité d’un second dépôt à la Haute-ville est recon- « nue, nous trouvons dans le nombre et le choix de ces machines «de quoi le composer facilement. A notre avis, l’Aréthuse et «une Vaïade rempliraient parfaitement ce but, sans que cette «soustraction n’eùt rien de bien préjudiciable au dépôt géné- «ral... Il ne suffit pas d’avoir une pompe, il faut encore qu’elle «soit construite d’après les vrais principes, sans quoi la pompe «manque au besoin, et l’on a le chagrin de voir incendier sa « maison avec le remède à la main. |
« Quant à l'exécution de celles dont il s’agit, je ne chercherai «point à protester de mes capacités à cet égard. C’est à l'œuvre «que l’on connaît l'ouvrier. Je prierai seulement M. le Maire « d'être persuadé qu'étant vivement pénétré des considérations «qui en prescrivent l'usage, je ferai tous mes efforts pour me « rendre digne de sa confiance (1). »
Sans entrer dans l'examen de ce mémoire, nous ne pouvons cependant nous dispenser d’en signaler un point important : Thioulouse dénote la nécessité d’un second dépôt de pompes à la Haute-ville. En cas de sinistre dans ce quartier élevé, quelle difficulté, même aujourd’hui, pour y amener des pompes et que de temps perdu! N'y aurait-il pas un sérieux avantage à laisser en permanence soit au Séminaire, soit à l'École nor- male, une ou deux pompes, dont le fonctionnement immédiat par le ‘personnel de ces établissements, sauvegarderait non seule-
(1) Archives municipales.
[#1]
66 - MÉMOIRES
ment ces édifices, mais encore les casernes, l’'Évéché, l’Hôtel- Dieu et les maisons des particuliers ? |
. Concentrer dans un dépôt unique, qui n’est pas à l’abri du feu, tous les engins de sauvetage constitue, à notre avis, un danger facile à éviter par la création d'un double dépôt. Cette grave question doit, tôt ou tard, appeler l'attention de nos édiles. . En 1830, notre cité disposait de trois pompes: /a Lyonnaïse, la Parisienne, la ville du Puy, et de 635 paniers ou seaux, dont le nombre fut porté, en 1831; à 689; mais à la suite d’un incendie survenu dans la rue Pannessac, le 26 janvier 1834, plusieurs de ces récipients, déjà vieux, ayant élé mis hors de service, la municipalité vota, le 13 février suivant, une somme de 800 francs pour en acquérir 200 autres (1). - Trentc-quatre titulaires et douze surnuméraires formérent d'abord l'effectif de la compagnie des sapeurs-pompiers. En 1865, elle comptait quatre-vingts hommes, savoir : un capitaine, un lieutenant, un sous-lieutenant, un sergent-major, deux ser- wents, un sergent-fourrier, sept caporaux, trente-neuf sapeurs titulaires, vingt-cinq sapeurs surnuméraires et deux tambours. + Un arrêté du maire du Puy, en date du 5 juillet 1866, adjoi- gnit cinq hommes de plus à la compagnie, et le 12 mars 1868, un autre arrêté du même magistrat porta l'effectif total à cent hom- mes répartis de la manière suivante :
CAPITAINE, 4 45 déesse À TAMDOUrTS:: Sousse basse 2. Lieutenant.............. 1. Sapeurs titulaires... . .... 40. Sous-lieutenant. ......... 1. Sapeurs surnuméraires ap- Sergent-MAJOT. . ec... 1; DOINIÉS sen éaterss 20. SéLOONIS rares .. À. sapeurs surnuméraires Sergent-fourrier. . ...... 1. non appointés (2)...... 83. CAPDOPAUX enter lO: —— Total....... 100
Let‘ avril 1878 sont élus : capitaine, M. Florentin Chacornac ;
(1) Archives municipales. (2) Une solde annuclle est aujourd'hui allouée à tous les sapeurs titulaires et surnu- méraires.
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lieutenant, M. Auguste Rocher, et sous-lieutenant, M. Louis Séjalon.
Un décret du Président de la République, rendu le 16 décem- bre 1885, a nommé capitaine, M. Charkes-Joseph-Gustave Kaëp- pelin, ancien capitaine au 86° de ligne, chevalier de la légion d'honneur ; lieutenant, M. Auguste Rocher, et sous-lieutenant, M. Félix Reymond.
Les fonctions d’adjudant sous-officier ont été, par arrêté du maire pris le 12 avril 1890, conférées à M. Mathieu-Gaillard, sergent-major de Ja compagnie.
Par suite des améliorations récentes introduites dans le corps des sapeurs-pompiers et notamment de l'acquisition de nouveaux engins, la ville du Puy n’a rien à envier aujourd’hui aux cités voisines. Son matériel d'incendie comprend, en effet :
1° Cinq pompes, dont deux aspirantes etfoulantes, ainsi dénom- mées : la Borne, le Dolai:on, la Loire, l'Allier, le Puy. Ces cinq pompes ont pour leur service 24 garnitures ou conduits en Cuir d’une longueur de 8 à 10 mètres chacun ;
8° Deux chariots de dévidoir garnis de conduits en toile, l’un de 200 et l’autre de 300 mètres de longueur ;
3° Quatre échelles à crochets et une autre dite é{alienne;
4 Un chariot ou fourgon de sauvetage, contenant un sac de sauvetage et un filet (1) ou drap de sauvetage ;
9° Trois ceintures de sauvetage munies de leurs cordages ;
6° Trois descenseurs de différents modèles :
1° Une corde à nœuds et plusieurs cordages simples dont se munissent les sapeurs pour assurer leur retraite en cas de danger ;
8° Un brancard pour le transport des blessés ;
9% Un sac à air et ses accessoires pouvant fournir de l’air pen- dant 12 à 15 minutes. Cet appareil est utilisé dans les feux de Caves ou autres lieux dont l’air est vicié ;
10° Deux lampes de sûreté, dites lampes de mineurs, permet- tant de pénétrer dans des endroits remplis de gaz explosifs.
Le dépôt des pompes contient en outre 6 à 700 seaux en toile
(1) 1 y a dix ans, l'emploi de cet appareil eût préservé de la mort les sept personnes qui périrent dans l'incendie de la rue Saunerie-Vieille (17 décembre 1882).
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pour l’organisation des chaînes, plusieurs échelles ordinaires, des crochets, des harpons, etc., etc. |
* Depuis quelques années l'installation d’un téléphone reliant le poste de police de la caserne Romeuf à une pièce de la mairie du Puy, où veille chaque nuit un sapeur-pompier, permet, en cas d'incendie, l’organisation de prompts secours.
« C’est, dit le journal La Haute-Loire (1), la rapidité de la mise sur pied des secours à la caserne qui a fait émettre le vœu que, dans les villes de garnison, le service d'incendie soit assuré par la troupe, et il y a certaines casernes de grandes villes qui ont, en effet, un service de pompes toujours sur les lieux et en fonction le premier, comme au Puy, le service de la -pompe de la gare. C’est tout naturel avec un personnel sans cesse sous la main. »
L'article 171 du décret du 4 octobre 1891 sur le service des places, porte :
« Lorsque l'avis d’un incendie parvient à une caserne, les hommes de piquet sont mis immédiatement sur pied, moilié en travailleurs, moitié en armes. L’adjudant-major de semaine fait prévenir à leurs logements les officiers de service et, sans atten- dre des ordres, il dirige le piquet sur le lieu de l'incendie (2). »
Que le clairon d'alarme sonne dans nos rues, aussitôt nos pom- piers courent au feu et l’attaquent avec entrain. Insouciants du danger, entraînés par une ardeur qu'il faut presque toujours modérer, ils bravent les plus grands périls. Citer les noms des sauveteurs intrépides, officiers ou soldats, de ce corps d'élite, serait chose facile ; mais il y aurait lieu d’en mentionner un trop crand nombre, et nous craindrions d’en omettre (3).
Témoin de leurs vaillants efforts, la population du Puy tient
(1) Numéro du 16 février 1892.
(2; Journal La Haute-Loire du 16 février 1892.
(3) Une mention spéciale, insérée au livre d'ordre de la compagnie, est conçue en ces termes :
« Florentin Veysseyre. sergent, qui compte plus de soixante ans d'âge et qua- rante et un ans de service, est admis à la pension de retraite à la date du 1er juil- let 1886. Décoré de la médaille d'honneur pour avoir sauvé une personne qui allait périr dans un incendie, en 1854, cité plusieurs fois à l'ordre du jour de la compagnie pour sa belle conduite dans les incendies. »
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en haute estime nos sapeurs-pompiers et rend hommage à leur zèle, à leur discipline et à leur courage.
On lit au livre d’ordre de la compagnie qu’au concours de manœuvres de pompes à incendie qui a eu lieu à Saint-Étienne, les 15 et 16 avril1888, « une section de la compagnie des sapeurs- pompiers du Puy, participant à ce concours, a remporté, malgré une préparation trop hâtive, le troisième prix de manœuvre et le deuxième prix destratégie, en première division ».
Depuis sa création jusqu’à ce jour, le corps des sapeurs-pom- piers a eu pour capitaines : MM. Reynaud, Thioulouse, Margerit, Thomas, Bellut, Chacornac et Kaëppelin.
A. LASCOMBE.
TESTAMENT D'ANTOINE DE LA TOUR, BARON DE SAINT-VIDAL
16 JUILLET 1589
Lorsque nous publiâmes, dans le tome VI des Tablettes histo- riques du Velay, quelques pièces relatives à la famille de Saint- Vidal, nous ne connaissions que des extraits, donnés par M. de Vinols (1) et M. Mandet (2), du testament d'Antoine de La Tour, baron de Saint-Vidal, tué au pont d’Estroulhas, le 25 janvier 1591. Depuis, notre confrère, M. César Falcon, nous ayant communiqué une copie de cet acte, nous avons jugé utile de le reproduire en son entier dans les Mémoires de la Société agricole et scientifique de la Haute-Loire. Ce document, déjà ancien et d'une haute valeur historique, se rattache, en effet, à l’homme de guerre qui, au temps de la Ligue, joua dans nos montagnes le plus grand rôle et s’acquit la répu- tation d’un chef intrépide dans les nombreux combats qu'il livra, pendant plus de vingt années, soit en Velay, soit en Gévaudan.
À. LASCOMBE.
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Testemant solempne de moi, Anthoine de La Tour, viscompte de Beaufort, seigneur et baron de Sainct-Vidal, Mons, Sainct- Quentin, le Villar, Montvert, Montusclat, Goudet et Barges, en
(1) Histoire des guerres de religion dans le Velay pendant les règnes de Char- les IX, Henri IIT et Henri IV, par J.-B. Louis de Vinols, baron de Montfleury. pages 219 et 220.
(2) Histoire du Velay, par Francisque Mandet, t. V, pages 445 et suivantes.
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Vellay, Ceneret, Montferrand, Recolettes, Laval, de Saint-Cheli, de Tar et Cultures en Gevauldan, chevallier de l’ordre du roy, capitaine de cinquante hommes d'armes de ses ordonnances, gouverneur et lieutenant général pour Sa Majesté ausdits pays de Vellay et Gevauldan et grand maitre de l’artillerye de France. Au nom de Dieu soict. — Ayant plusieurs fois considéré en moy mesme que nous Sommes ious nalz en Ce monde, non pour y vivre eternellement, mais pour mourrir une fois, et, par le moyen de ceste mort, parvenir à la vie future, quy est perdurable, à laquelle doibt tendre et aspirér tout fidelle crestien, qui a mis et eXpouzé son espérance en la béatitude eternelle que nous a esté acquize par la mort et passion de nostre seigneur Jesus-Christ; et d’aultant qu'il n’a rien plus asseuré que ladicte mort et rien plus incertain que l'heure d’icelle; recognoissant cella, et ne voullant, après moy, laisser à mes successeurs aulcune occasion de divorse et querelle pour raison des biens que Dieu m'a don- nès, ains paix et amitié perpettuelle, je faicts et ordonne mon testemant et dernière disposition solempne de mon corps ét de mesdicts biens, en la forme et manière que sensuict, mectant au preallable muny du signe de la saincte croix, disant : au nom du Père, du Filz et du benoict sainct Esprist. _ Premiérement, je veulx et ordonne que Ihorsque mon âme sera séparée de mon corps, que mondict corps soit enterré au thumbeau que je veulx estre construict et édiffié dans le convent des Cordelhiers de la ville du Puy, en la chappelle de mes ences- tres et predecesseurs, qui est au costé droict du grand autel, laquelle chappelle je veulx estres enffoncée en dedans de cinq ou six pas jusques à la murailhe contre laquelle on pouzera l’aultel de ladicte chappelle, au-dessus duquel et dans la murailhe je veulx ledict thumbeau estre dressé. Et où le dit thumbeau ne seroict dressé auparadvant mon decez, je veulx mondict corps estre mis dans une caysse de plomb, revestue de bois, et repousé au lieu le plus comode, dans ladicte esglize, qui sera advisé par mon herettière universelle, après nommée, à laquelle je prye et recommande de promptemant faire trevalhier à ladicte construc- tion de ladicte chappelle et de mondict thumbeau et de le faire fere, comme je luy ay faict entendre estre de mon intention, Pour après y remuer mondict corps. S'il advenoict que Dieu me
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voullut appeller hors de la présante ville, veulx que mondict corps soit appourté par les pretres de toutes les esglizes parro- chielles de mes terres de ce pays de Vellay, accompaignés de tous les pouvres du lieu et mandemant où je seray deceddé ; que à ces fins seroict appellés et... ensemble les aultres que seroient en la suitte de mondict corps, à raison de trois sols che- cun, et ce despuis ledict lieu où je seray deceddé, soict à Sainct- Vidal, le Villar, Mons ou aultres lieux dudict pays, jusques qu'ils seront parvenus à l’une des croix quy sont les plus proches des quatre advenues de ladicte ville. Et là, actendroict que mes- sieurs de la grande esglize Nostre-Dame, et tous les aultres pretres, religieux et religieuzes de toutes les eglizes de tadicte ville, tant dedans que dehors, soient venus pour prendre mon- dict corps et le pourter, la face descouverte, despuis la porte qu’il entrera en ladicte ville jusques en ladicte esglize Nostre- Dame, au corps de croix où je prie monsieur l’evesque, qui sera pour lhors, ou un vicaire et tous les autres messieurs les chanoines de ladicte esglize, laisser entrer mondict corps et y demeurer pen- dant le temps qu’une messe de mort à haulte voix se dira au grand autel par mesdicts sieurs, et deux à basse voix, à mesme temps _ ausdicts deux autels des deux coustés, l’une du Sainct-Esprit et Vaultre de Nostre-Dame. Comme aussy je prie et charge très expressemant madicte heretlière, cy après nommée, de leur faire la mesme prière en considération de ce que j’ay employé toute ma vie, et despuis l’année mil cinq cens soixante ung, tous mes moyens, paines et trevaulx pour la conservation de ce pays de Vellay soubz l’obeyssance du roy, et réduict beaucoup de villes et forts, occuppés, tant dans ledict pays de Vellay que aux limittes d'icelluy par les huguenotz héréticques qui tiennent le parti contraire de la saincte esglize catholicque, apostolicque et roumaine, en la prinse desquelles villes et lieux occuppés j’ai perdu un œil, et plusieurs fois y suis esté blessé et offencé en ma personne, en danger de ma vie, comme checun scaict. En mémoire de quoy je prie lesdicts sieurs evesques et chanoines permettre que mes propres armes entières, espée et esperons, avec mon enseigne et guidon, et un tableau de mon esfigie, soient mis et poussés ensemble au costé du grand autel de ladicte esglize con- tre la murailhe de ladicte chappelle du Crucifix.
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Veulx aussy et ordonne que, pandant le temps que mondict corps demeurera en ladicte esglize Nostre-Dame, tous les aultres pretres, relligieux et religieuzes susdicts, tant de mes terres [que] de ladicte ville, soyent et demeurent antour de mondict corps priant Dieu pour mon ame. Et après que ladicte grande messe de mort sera ditte et parachevée, je prie mesdicts sieurs chanoines accompaigner mondict corps, avec tous les susdicts pretres et religieux, Jusques dans l’esglize de Sainct-Agrepve dudict Puy, et à la chappelle de feue madamoiselle de Mons, ma tante, où je veulx que mondict corps séjourne jusques les prépa- ratifs des honneurs de mon enterremant auroict-esté faitz. It teppandant veulx que mondict corps demeure accompaigné, jour et nuict, par douze pretres et deux de mes serviteurs, lesquelz prètres seront nourris et livrés tous les jours à raison checun de dix Sols, oultre leur nourriture. Et pandant le temps que mon- dict Corps y demeurera, seront dictes, tous les jours, trois messes à haulte voix dans ladicte chappelle, à scavoir une du Sainct Esprist, et l’aultre de Nostre-Dame, et l’aultre de mort, pandant lequel temps veulx qu’il y aye, jour et nuict, quatre grandz skrges ardens, de deux livres checun, avec mes escussons et IMOiries autour de mondict corps.
Aussy je veulx et ordonne que, advenant mon deceds dans ce Pays de Vellay, mes entrailhes soient mizes, pourtées et enterrées dans l’esglize parrochielle de Sainct-Vidal, au-devant du grand hotel el au mesme lieu où furent mizes celles de feu Bertrand de la Tour, mon frère, compte et archidiacre de Saint-Jean-de- Lion.
Veux et ordonne aussi que mondict enterrement soict faict au Plustost qu'il sera possible, après mon deceds, appellés mes Parans et mes executteurs testamantaires, cy après nommés, %en cas de leur absence ou empechement, veulx qu’il soict Passé oultre.
Je veulx aussy que mesdicts sieurs de la grande esglize Nostre- Dame du Puy et aultres pretres et religieux de ladicte ville soient Prés assister à mondict enterremant, avec les aultres pretres ds esglizes de mes terres de ce pays de Vellay qui y SeTOnt appellés. lesquelz tous ensemble accompaigneront mon- dict Corps, despuis ladicte esglize Sainct-Agrepve jusques dans
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ledict convent des Cordelhiers, où mon corps sera enterré, comme dict est. |
Et le lendemain de mondict enterremant, je veulx qu’il soict faict la quarantaine et, le jour après ensuivant, soict céllébré le bout de l’an de ma sépulture, à l'assistance de tous les sieurs cha- noines et religieux et pretres, et avec la chappelle ardente et aultre lumière dehors et dedans l’esglize, comme il est accoustumé en tel cas. |
Sera livré ausdicts sieurs chanoines et aultres de ladicte esglize Nostre-Dame, pour checun jour, ce que sera advisé avec eulx par madicte herettière, dans escripte.
Aux relligieux des quatre ordres mendiens, checun desdicts jours, sera distribué scavoir, à ceulx de Sainct-Laurens, deux escus; à ceulx des Carmes, deux escus: à ceux des Cordelhiers, deux escus ; à ceulx de Saincte-Claire, deux escus ; aux relligieuzes de Val, ung escu; aux religieux de Sainct-Pierre le Monesiier, deux escus; aux pretres séculhiers dudict Sainct-Pierre, à checun presant, trois sols; à ceulx de Saint-Pierre la Tour, qui seront présens, trois sols; à ceulx des collèges présans, trois sols; à ceulx de mes terres, cinq sols ; aux estrangiers, deux Sos SIX deniers.
Veulx que durant lesdicts trois jours de mon enterremant trois cens pouvres, tant masles que femelles, assistent cent, checun jour, ou bien lesdicts trois cens lesdicts trois jours, à la discré- tion de mon hercttiére, dans escripte et de mes executteurs testa- mentaires, s’ilz y sont présens; ausquelz trois cens pouvres et à checun d'eulx sera donné quatre aulnes de drap et, oultre ce, aulx masles ung bonnet et aux filhes une aulne toille pour un couvre chef, et checun desdicts trois cens pouvres pourtera ung scierge cire avec mes armoiries, et à checun desdicts pouvres sera aussi donné, checun desdicts trois Jours, ung pain d'ung sol, ou bien l'argent.
Aussi veulx estre distribué cent cestiers bled soigle, lesdicts trois Jours de mon enterremant, quarantaine, au bout de l’an, scavoir, aux pouvres de Sainct-Vidalet de Blanzac, quinze cestiers; à ceulx du Villar et d'Eynac, six sestiers, à ceulx de Montusclat et Montvert, dix cestiers; à ceulx de Mons, Saint-Quentin et de Val, dix cestiers; à ceulx de Beaufort et Barges, six cestiers, et
TESTAMENT D’ANTOINE DE LA TOUR 79 le surplus à ceulx quy assisteront aux aulmosnes, les susdicts trois Jours.
Item, veulx et ordonne une fondation en l’esglize dudict convent des Cordelhiers d’une messe de mort à haulte voix, quy sera dicte à neuf heures du matin, tous les jours de l’année et à perpé- tuité, avecung Salve regina inviolata et Stabal aussi à haulte
voix, à la fin de ladicte messe, oultre l’evangille de sainct Jean qu'est 22 principioetle Profundis que le pretre cellébrant dira à basse voix pour prier Dieu pour les ames de mes predeces- seurs, la mienne et de mes successeurs : pourquoi fere sera distri- bué ausdicts religieux desdicts convens, tous les ans, par quar- lier, de trois en trois mois, par mon herettière, dans escripte ou par mes successeurs après elle, dix escus sol que font quarante éSCuS checune année et, pour le payemant d’iceulx quarante tSCUS, sera constitué rante après d'argent par nous, ou S'y nous ne l’avons faict, par nostre herettière entre les mains d’un mar-
Chant solvable de la ville du Pui, qui sera tenu et se chargera de PAYer ladicte somme de quarante èscus, checune année, et par Uartier, comme dict est.
Z£ern, donne et légue aux sœurs religieuses du convent de Saincte- Claire de ladicte ville du Puila somme de vingt escus, pour ie fois, affin qu’elles prient Dieu pour mon ame et de mes prede- éSSeurs et successeurs, laquelle somme leur sera payée par mon icrettiére, soubz escripte, après mon deceds.
_Z£em, par exprès, je désire, comme le debvoir veult, que damoi- Selle Françoise d'Albon, ma mère, au cas qu’elle me survivra, soict honnorée, servie et respectée, tant par mon herettiére que PAT mes successeurs, après elle, tout de mesme, comme j'ai faict t desire fere toute ma vie, et miculx si c’est possible. Je veulx, Mtends et ordonne lui pourter et randre tout honneur et obeys- fance et humble servitude, s’aider de son bon advis et conseil, (4 l’occasion s'en présentera, et, où il adviendroict que Dieu ne “eulhe qu’elle thumbast en necessitté aulcune, à l’occasion des
éuerres ou aultremant, elle soict par eux nourrie, entretenue ct servie, sellon sa quallité. Item, donne et lègue à Henry de la Tour, dict de Sainet-Vidal,
MOn frère, la somme de deux mil escus sol, pour une fois, outre
€ par dessus le léguat à luy laissé par feu Anthoine de la Tour,
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seigneur de Sainct-Vidal, nostre père,en son dernier testemant, et ce, au cas que je decederoys sans enfans masles, laquelle somme de deux mil escus, audict cas et non aultremant, veulx lui estre payée par mon herettière, soubz nommée, dans trois ans, commancant l’ung, après mon enterremant, et ce, pour tous et checuns les droicts qu’il pourroict préthendre sur tous et che- cuns des biens deslaissés par feu nostre père, soict pour son chef et pour sa légetime, ou supplémant d’icelle, ou droict de substitution, que pour le droict sucessif qu’il pourroict pré- thendre de nous frères, sœurs et aultres quelconques; veulx et ordonne qu’il s’en contampte de ladicte somme de deux mil escus, pour toutes les susdictes préthentions, sans qu'il puisse aultre chose demander ne quereller à mes successeurs sur tous mesdicts biens ni aultremant. Et, au cas que mondict frère ne se vouldroict comptenter de ladicte somme de deux mille escus, oultre sondict léguat, et qu’il vouldroict quereller quelque aultre chose contre mesdicts successeurs, j'ay revocqué et revocque, dès à présant, ledictléguat par moy faict et veulx qu’il soict nul et tenu pour non faict et non advenu. Comme aussy, au cas que je deslaisserois ung ou plusieurs enfens masles, n’entends que ledict léguat sorte à effect : ainsi veulx qu’il se eomptemte de cent escus, pour tous et checuns les droicts qu’il pourroict pré- thendre sur mesdictz biens.
Ilem, veulx et ordonne que toutes et quantesfois qu’il plaira à dame Françoise de la Tour, dicte de Sainct-Vidal, abesse de Bellecombe, ma sœur, venir dans nous maisons avec nostre herettière ou ses successeurs, qu’elle y soict reçeue, chérie et honnorée, tant de nostre herettière que de tous aultres deppan- dans de nous appellés après elle, comme sy estoict nostre propre mere, ordonnant que soyent tenus lui obeyr et en toutes occa- sions que se présenteront pour les affaires de nous maisons, et tous et checuns les biens par nous deslayssés, et prendre son advis et conseil. Et, en cas que sa dicte abbaye, fruicts et reve- nus d’icelle seroient occupés par guerre ou aultre accident, et qu'elle n’en pourroict jouir libremant, veulx et ordonne qu'elle se puisse retirer avec nostre herettière ou nos successeurs avec lesquelz elle sera nourrie et entretenue honnorablemant, sellon Son estat et qualitté et révérée, comme dict est.
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Et sy madicte sœur ne veult ou ne peult s’accorder de vivre avec nostre dicte herettière ou nos successeurs après elle, voul- Jons que lui soict bailhée habitation commode de deux ou trois chambres, et cusine bien meublés et accommodés sellon qualité de tout ce que lui sera nécessaire, et qu'elle jouysse pour ses allimens et entretenemans de la somme de cent trente-trois escus
ung tiers de revenu annuellement qu'elle prendra sur le revenu de la maison ou qu'elle habitera.
Item, je donne et lègue à damoiselle Claire de la Tour, dicte de Sainct. Vidal, ma sœur, veufve de feu sieur de Latourrette, que, en Cas qu’il adviendroict que, à l’occasion des troubles et guerres, Sa maison seroict prinse et occuppée par les huguenaulx, ou aul- tre Voye de guerre, et qu’elle feust expolhiée de ses biens, audict as, elle se puisse retirer avecque mon herettière, dans escripte 0U nos successeurs avecque lesquelz elle sera honnorée, nourrie et entretenue, sellon la quallitié de sa personne et, avecque ce, eulx qu’elle se comptente, sans qu’elle puisse aultre chose demander sur mésdicts biens. | tem, donne et lègue à damoiselle Anthoinette de la Tour, dicte de Sainct-Vidal, ma sœur, femme à noble Louis de Roque- kure, sieur de Villeneufve, que, en cas de necessitté, ou qu’il Adviendroict qu’elle reçeust mauvais trailtemant de son mary, qu'elle se puisse retirer avecque nostre dicte herettière ou nos CCesseurs, par lesquelz j’ordonne qu’elle sera honnorée, nour- rie et entretenue avecque eux honnestemant, sellon sa quallitté
€, avecque ce, veulx qu’elle se comptente, sans pouvoir aultre those demander sur mesdicts biens. tem, pour le debvoir de proximité et pour l’amitié que j'ai ousj ours heue envers feue damoiselle Louise de la Tour, dicte de Sainct-Vidal, ma sœur, femme en son vivant dudict sieur de Servissas, et envers les enfans qui sont dessendus d'elle, veulx et trdonne que Henry Beraud, son filz, et dudict Servissas, que jai retiré et mis à l’estude, y soit contignué aux despens de Madicte herettière et de ma sucesseuresse après elle, jusques à leage de seize ans, qu'on pourra juger à quoy son naturel Saddonnera le plus, soict aux armes ou aux lettres, pour après, luy adcister et ayder en la voccation qu'il prendra, comme ilz adviseront, et tenir l'œil à ce que le droict qu'il a en la maison
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de son père lui soict rendu, s’il estoit deslaissé par sondict père, en bas eage, et, avecque ce, je veulx qu’il se comtenpte, sans pouvoir aultre chose demander sur mesdicts biens.
Ilem, je donne et légue à Ysabeau Menneyre, pauvre filhe qui m'a esté donnée par sa mére, à raison de la charté. ..... des années précédantes, qu'elle soict nourrie et entretenue Jusques qu'elle sera d'eage pour se nourrir, et lhors, trouvant parti commode, je lui donne la somme de cent escus que lui seront payés du revenu des pentions qui ont esté destinées par feu damoiselle Clauda de Mons, ma tante, pour cest effect, que madicte herettière ou aultre ses successeurs seront tenus lui faire payer par ceulx qui ont le sort principal entre leurs mains.
Item, je donne et légue à Annevaude de Sainct-Rambert, que j'ay retiré pour la pauvreté de son mary et pour charité et aumosne, n'ayant de quoy sondict mary de l'entretenir, sa vie et alliments et habitz, tant qu’elle vivra et vouldra demeurer en nostre maison, vivant en femme de bien et d'honneur.
Item, donne et lègue à M° Guabriel Vallat, scindicq de la ville du Pui, nostre baillif de Mons, Sainct-Quentin, pour les agréables services qu'il nous a faicts et espérons qu’il fera et aux nostres à l’advenir, la somme de cent escus que voullons lui estre payée, après mon decedz, par nostre dicte herettière, dans escripte.
Jtem, donne et lègue à M° Anthoine Sauron, pour les services qu’il nous a faictz, la somme de trente-trois escus, ung tiers, oultres ses gaiges, pour une fois, payable par madicte herettière, aprés mon decedz.
Item, donne et légue à M. Vidal d’Yssinghaulx, sa nourriture dans la maison, sa vie durant, pour avoir esté serviteur de feu mon pére et, de mesmes, sera tenu, vestu et habilhé.
Item, je veulx et ordonne que tous mes serviteurs et cham- brieres que se trouveront dans ma maison, Jhors de mon decedz, auroict double gaiges, au feur du temps qu’il m’auroict servi ladicte année de mon decedz et des gaiges qu'ils gaigneront pour une année. |
Jiem, je donne et lègue, par droict d'institution particulhiére, laisse à Gillibert de la Tour, mon filz naturel et légitime, la somme de cinq cens escus, pour une fois, ou lelle aultre somme que sera advisée par madicte herettiére, soubz nommée ; et, oultre
TESTAMENT D'ANTOINE DE LA TOUR 79
icelle, sera tenu le nourrir et fere apprendre aux estudes, jusques
à l’eage de quinze, seize ou dix-sept ans pour le plus, et après
l'accompaigner de quelque gentilhomme vieux, sage et bien complecionné, pour le tenir et avec luy demeurer, avec train et esquipaige honneste à la suitte de la cour, ou bien pour le con- duire par les pays estrangers, avec ledict train et esquipaige, pour voir, se dresser et apprendre les langues, et se faire honneste homme, suivant la trace de ses predecesseurs, se maintenant tousjours en la foy catholicque, apostolicque et roumaine et au service de son roy, vivant aussi en la foy. Et ou mondict filz feroict aultrement, je le prive et destitue de tous et checuns mes biens.
. Ets'il plaist à Dieu me donner ung ou deux filz postumes, je leur
- faictz à checun pareilh léguat que à mondict filz Gillibert, scavoir
est de cinq cens escus, avec semblable charge à madicte heret- tière de les nourrir, eslever et entretenir, sellon leur qualité, en la voccation qu'ils vouldront prendre, jusques à ce qu'ils seront d'eage competant pour estre colloqués en mariage et, lhors trou- vant parti convenable, qu'il leur soict bailhé ladicte somme de cinq cens escus, avec telle autre que sera par madicte herettière, comme dessus est. Et ou quand seroict ung filz ou filhes postu- mes, je donne et lègue, par semblable droict d'institution, à checune d’icelles, la somme de cinq mil eseus, payable par madicte herettière : et ou elles ou l’une d’icelles se mettroict religieuze, je lui donne, par semblable droict d'institution parti- culhière, la somme de cent trente-trois escus et tiers de pention annuelle et, avec ce, veulx qu’elle ou elles se contentent sans pouvoir aultre chose demander sur mesdicts biens, esquelles som- mes faictz mes herettiers particulhers mesdicts enfens postumes ou ses successeurs thors quelles ce vouldront colloquer en mariage aux termes qui seront advisés par mesdicts heritiers.
Item, je donne et légue, par droict hereditaire institution, deslaisse à damoiselle Claire de la Tour, dicte de Sainct-Vidal, ma filhe naturelle et légetime, femme à noble Claude de Rochef- fort, sieur d’Ally et Josserant, la somme de cent escus sol, oultre le doct qui lui a esté constitué en son mariage, en laquelle somme de cent escus je l’institue mon herettière particulhière, sans qu'elle puisse aultre chose demander de mesdicts biens.
80. | ; MÉMOIRES
Item, par semblable droict d'institution, je donne et légue à Marie de la Tour, dicte de Sainct-Vidal, ma filhe naturelle et lègetime, la somme de cinq mil escus, checun escu vailant soi- xante sols, suivant ledict, payable scavoir, à la solempnization de son mariage qu'elle constituera, s’y Dieu plaist, trois mille escus et, deux ans après, mil escus, et le surplus à telz termes et payemans que sera advisé par mon herettière, dans escripte. Et ceppandent, veulx et ordonne que madicte filhe soict nourrie et endoctrinée et entretenue, sellon sa quallité, avec madicte herettière, et àses despans, avec quije faicts et insliltue mon herettière particulhiére ladicte Marie, et veulx qu’elle s’en contente, sans pouvoir aultre chose demander.
Je donne et lègue, et par semblable droict d'institution hérédi-
taire, délaisse à Anne de la Tour, dicte de Sainct-Vidal, ma filhe
naturelle et légetime, pareilhe somme de cinq mil escus que veulx luy estre payée scavoir, lhorsqu’elle sera collocquée, trois mil escus, et, deux ans après, mil escus et le reste à telz payemans que seront déterminés par madicte herettière uni- verselle, avec l’advis de-mes parans et amis : et ceppandant veulx et ordonne que ladicte Anne, ma filhe, soict nourrie, endoc- trinée et entretenue, sellon sa quallité, avec madicte herettière et, avec ce, Je la faictz mon herettière particulhière, sans qu elle puisse aultre chose demander sur mes biens.
Et au cas que mondict fils Gillibert et mesdictes filhes Marie et Anne et mesdicts fils ou filhes postumes, ou l'ung d'iceulx decederoict en pupilarité, en ce cas, Je veux que le léguat de celle ou celles que decederont en’ eage pupillaire revienne et appar- tienne à mon herettier ou herettière universelle, dans escript, lequel et laquelle je substitue, audict cas, au dict Gillibert, Marie, Anne, filz et filhes postumes ou checun d’iceulx qu'y decedera en l'age pupillaire.
Et car l'institution d'herettier est le chef et fondement de tout bon et vallable testemant, à ceste cause, moy, Anthoine de la Tour, faicts, et institue et nomme, de ma propre bouche, mon herettière universelle, ma bien aymée et chaire espouze Claire de Sainct-Poinct, dame dudict lieu et de la Fouret, pourveu qu'elle demeure et se contienne en viduilté, et ce, en tous et chescuns mes biens, meubles, noms, droicts et actions, par laquelle veulx
TESTAMENT D'ANTOINE DE LA TOUR 81
et ordonne tout le contenu en ce mien testemant et dernière dis- position estre entièrement gardé, observé et effectué.
Et au cas que je decederay deslaissant plusieurs enfans mas- les, veulx et ordonne que madicte femme et herettière susdicte soict tenue rendre et restituer à la fin de ses jours, ou en cas qu'elle se vouldroict remarier, ou aultrement, quand bon lui semblera, tous mesdicts biens, sans aulcune distraction, à ung de mesdictz enfans masles, telz que lui plairra eslire et choisir.
Et advenant le cas que je decederois ne laissant que ung seul enfant masle, en ce cas, je veulx et ordonne que madicte femme rande et restitue tous mesdictz biens audict enfant, ou bien sy bon lui semble, à ung des enfans masles de Claire de la Tour, ma Îlhe, femme au susdict Claude de Rocheffort, sieur d’Ally, tel que lui plairra choisir et eslire, venant à la fin de ses jours ou à tonvoller en secondes nopces, ou aultremant, quand bon luy sem- blera, pourvueu que cellui desdicts enfans de madicte filhe d’Alli, qui sera appellé par madicte femme à madicte succession, prene lout incontinant et porte à perpettuité mon nom et armes, et aul- tremant, non.
Et s’il advenoict que moi et ma filhe Claire de la Tour ne lais- Sant aulcungs enfans masles, en ce cas, je veulx que madicte femme puisse eslire ung des enfans masles de ma filhe Marie, Sy elle en a, et ou elle en auroict poinct, et que ma filhe Anne, que bon lui semblera pregnant, comme dict est, tout incontinant el Pourtant mon nom et armes et, en desfault desdicts enfans mas- les, elle eslira celle de mesdictes flhes que bon lui semblera, pour SuCCeder en tous mesdicis biens, soubz ladicte condition que des- sus de prendre et pourter tout incontinant mondict nom et armes.
Et au cas que ledict enfant masle, que sera esleu en la forme susdicte, par madicte femme, decederoict en pupilarité, en ce Cas, je subztitue mesdicts biens aux aultres miens enfans masles estans capables et ydoynes à succeder les uns après les aultres, sellon l'ordre et ranc de leur nativité et, aprés eux, mes filhes SuCCederont au dernier magsle survivant desdicts enfens masles l'ordre de la primogéniture d'icelles la garde les ungs succedant
AUX aultres, à desfaut d’enfans de leurs légetimes mariages.
Bien veulx et déclaire que je n'entendz que les enfans miens ou
de mesdictes filhes, ou leurs dessandans, soict masles ou femelles,
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82 MÉMOIRES
puissent venir ni estre appellés en mesdicts biens, s’ilz se met- tent en religion, ou aultremant, se colloquant en l’estat esclesi- asticque.
Aussi veulx que, après mon deceds, soict faict inventaire de mes biens, meubles, papiers et obligations par la conservation d’iceulx, sans toutesfois que ladicte Claire de Sainct-Poinct, madicte femme et herettière soict tenue du desgat desdicts biens meubles et ustencilles que ce faict par le temps et usaige, lequel invantaire je veulx estre faict par deux notaires, assistés de deux gentilhommes, mes parans et bons amis, que seront choi- sis et esleuz par madicte herettière, seront encore assistés du baille, juge de nostre maison, ou l’ung d’iceulx. Oultre ce, je veulx et ordonne et déclaire que madicte femme et herettière susdicte puisse prendre et percepvoir les fruictz et revenus de tous mesdicts biens et les fere siens, sans contrediction, et sans qu'elle soict tenue en rendre aulcun compte, ains qu’elle en puisse fere et disposer, tant à la vie que à la mort, comme bon lui semblera, pourveu qu'elle ne se remarie, comme dict est.
Veulx aussi et ordonne que ceulx qui hereteront en mon bien, soict masle ou filhe, apres madicte femme, soyent tenus, comme dict est, prendre incontinant et pourter mon nom et armes, et vivre catholicquemant en la religion apostolicque et romaine : comme aussy je prie madicte femme de treuver bon que son bien, nom et armes suive le mien, et, ou ne vouldroienct prendre mondict nom et armes et vivre, comme dict est, catholicquemant, veulx qu'ilz ne participent aulcunement en mesdicts biens, ains que les plus prochains qui viennent en l’ordre de ladicte substi- tution succedent en mesdicts biens, pourtant comme dessus, mon- dict nom et armes et estant catholicques, comme dict est cy des- sus, el aultremant, non. Et, pour la bonne amitié et affection que j'ai tousjours recognue et experimentée en mademoiselle de Sainct-Vidal, ma mére, dame Françoise de Sainct-Vidal, ab- baysse de Bellecombe, ma sœur, madame de Latouretle, aussi ma sœur, monsieur de Lion, monsieur et madame de Chevoires (1), monsieur de Frougières (2), oncle de ma femme, monsieur Dad-
(1) Chevrières? (2) Feugières?
FS © pe pp
TESTAMENT D'ANTOINE DE LA TOUR 83
vie (1), mon frère, par amitié et M° Godeffroi Villars, nostre advocat, je les faicts mes executteurs testamantaires, les priant d'en accepter la charge et fere office de bons parens et amis et ma bien aymée femme Claire de Sainct-Poinct, mon herettière universelle et à mes enfens, comme ilz ont tousjours faict en mon endroict, affin que par leur addresse et bon advis ilz en rendent... de leurs predecesseurs Je veulx aussi et ordonne que madicte herettière universelle, Clire de Sainct Poinct, ma femme, puisse augmenter le léguat susdit de mon fils et filhe Gillibert, Marie, Anne et autres pos- thumes, sy aulcungs y en a, comme bon lui semblera et Je pour- rois faire. C’est mon testemant et dernière disposition que je veulx val- loir par droict de testemant et toute aultre meilheure forme et manière que valloir pourra, soict par donation, cause de mort, codicille ou aultremant, que je veulx estre publié et ouvert, après mon deceds, et non auparadvant, cassant et revocquant tous testemans et disposition que je pourrois cy devantavoir faict, el ordonne que le presant sortira son plain et entier effect, que j'ai faict escripre de la main de Guabriel Vallat.. mot à mot, sel- lon ma volonté, intemption, en ses sept precedantes piéces, papicrs éscript, la presant comprinse, ordonnant qu'il lui soict adjouxté foi, comme s’il avoict esté tout eser ipt de ma main propre, et, en foy de ce, je l’ai signé de mon saing accoustumé au fonds de tou- tes les pages et, sy dessoubz, est celle de mon sceau et cachet, Pour Plus emple fermeté des choses. Faict au Pui, ce seiziesme jour de juilhet mil cinq cens huictante neuf: Sainct-Vidal, ainsin Signé. Et au feulhet servant de couverte audict testemant est es- cript : en presance de nous, Gabriel Blacheyre et Vidal Jacquet, notaires royaulx et tesmoings soubzsignés, establi en personne hault et puissant seigneur, messire Anthoine de la Tour, seigneur et baron de Sainct-Vidal et Cenneret, viseompte de Beaufort, che- vallier de l’ordre du roy, capitaine de cinquante hommes d'ar- mes des ordonnances de France, gouverneur en pays de Vellay et Gevauldan, sénéchal dudict pays, qui a declairé dans la pré- sente carte et papiers clodz estre contenu son testemant et dis-
(1) d’Adiac?
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position de sa dernière vollonté, par lui signée, et nous a requis de le signer icy, avec les tesmoings soubzsignés, lequel testemant veult, entend et ordonne sorte son plain et entier esfect, de poinct en poinct, sellon sa forme et teneur, présens à ce, et, en tesmoings requis et appellés par ledict seigneur de Sainct-Vidal, honno- rables hommes M° Marcellin Rousset, procureur du roy en la cour commune du Pui, noble Claude de Polalhon, sieur de Bouzols en Gevauldan, monsieur M° Jacques Dorga, chanoine, sire An- thoine Allasert, bourgeoix, sire Jacques Barthélemi, marchant, sire Nicollas Rochette, sire Jean Faure, appoticaire de ladicte ville, habittans soubzsignés avec ledict seigneur testateur et nous, notaire, ce sciziesme du mois de juilhet, l’an mil cinq cens quatre vingt neuf, après midi : Sainct Vidal, Rousset présant, Claude Polalhon présant, Jacques Barthélemi, présant, Allazert, moy présant Dorlhac, Rochette, Faure, appoticaire, Blacheyre, Jacquet, notaires, ainsin signés. Et en marge sont escript les mots : J’appreuve ladiction dudict Dorlhac, tesmoing. En foi de ce j'ay encore signé Sainct Vidal. Extraict collationné à l'ori- ginal par moi, commis aux greffes de. la cour de monsieur le séneschal du Pui, Barry, publié le vandredi, quinziesme febvrier mil DCI XI pardevant monsieur Bertrand, juge maige.
(Copie sur papier du xXvue siècle. Collection César Falcon.)
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Les Vellaves
Les Vellaves : Vellavii (César), Vellai (Strabon), Vellates (Pline, qui toutefois semble avoir eu en vue un peuple différent voisin des Pyrénées), Velaunt (Ptolémée), Vellavi (Notice des Provinces), peuple de la Celtique et, à partir de la nouvelle division de la Gaule par Auguste, de la province d'Aquitaine, ensuite, après le remaniement provincial de Dioclétien, de l'Aquitaine Première. Strabon (p. 190) les range parmi les peu- ples aquitains situés entre la Garonne et la Loire et les avoisine aux Helves riverains du Rhône. Ptolémée les place fautivement sous les Auscie.
Leur territoire a peut-être possédé des mines de fer (inscr.); il abondait certainements en forêts et notamment en forèts de pins (id.).
Sur différents points du département de la Haute-Loire exis- tent des monuments mégalithiques : à Saint-Pierre-du-Champ, dans sa partie nord, un roc gigantesque, « ayant la forme d’une grande chaire », s'appelle la Chaise-de-la-Dame et paraît être un menhir; une tradition dn moyen âge le prétend apporté « par les Esprits » ; à Pinols, à l'extrémité occidentale, quatre grands blocs, désignés sous le nom de Tombe-des-Fées, auraient autrefois formé les supports d’un dolmen ; à Saint-Eble, du can- ton de Langeac, d'énormes blocs de basalte, au nombre de douze, dits les Pierres-des-Fées, permettent peut-être de recon- naitre un alignement de menhirs.
| (1) Extrait de la Revue ‘épigraphique du midi de la France, ne 55. — octobre, novembre, décembre 1889. |
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Pour l’époque immédiatement antérieure à la soumission de la Gaule aux Romains, on sait seulement que les Vellaves étaient clients des Arvernes. Dans le soulèvement général dirigé par Vercingétorix, ils sont compris avec eux dans la taxe des 35,000 hommes à fournir à l’armée levée pour la délivrance. d’Alise (b. G. VII, 75) : Galli, concilio principum indicto,……. imperant parem numerum (c'est-à-dire millia XXXV) Arver- nis, adjunctis Eleuteris, Cadurcis, Gabalis, Vellaviis qui sub imperio Arvernorum esse consuerunt. On ne leur connaît pas de monnaies autonomes; mais des inscriptions de la période impériale ont conservé quelques souvenirs dont l’origine peut remonter aux temps celtiques : un dieu local Adido; une prêtrise du titre de gutvater; quelques noms propres : Dubnocus, Aveta (?) Donnius : forme latinisée du celtique Donnus.
La ville chef-lieu des Vellaves était Revessium (Ptolémée), Revessio (Table de Peutinger : Revessionne), aujourd’hui Saint- Paulien. Dans la Notice, le nom a disparu et est remplacé par celui du peuple avec le titre de civitas : Item in provinciis seplem provincia Aquilanica prima,.…. civitas Vellavorum.
Revessium était sur la route de Lyon à Bordeaux par Rodez, Cahors et Agen, dont les milliaires connus ont été trouvés à Montdouilloux, à Saint-Paulien, à Borne, à Sanssac, à Saint. Jean-de-Nay et sont aux noms des empereurs Sévère-Alexandre, Maximin et son fils Maxime qui vras et pontes vetustate con- lapsas restituerunt, les Philippe père et fils, l’empereur gaulois Postume. Sur celles de ces bornes où l'indication numérale s’est conseryée, les distances sont marquées en milles romains, et Revessium y est désigné sous le nom de civitas Vellavorum, ce qui indique très clairement que toute la Vellavie ne formait qu'une civitas identifiée avec Saint-Paulien.
Deux empereurs encore, autres que ceux qui figurent comme réparateurs des routes, sont rappelés par des inscriptions hono- rifiques, l’une à Polignac au nom de Claude, datée de la cin- quiéme annuité de sa puissance tribunicienne, c’est-à-dire de l'an 45-46 de notre ère, avec mention de son onzième impéra- torat et de son quatrième consulat, qu'il ne géra qu’en l’an 47, mais pour lequel il était déjà désigné dés l'an 46; l’autre aux noms de Trajan Dèce et de l’impératrice Etruscille, inscription
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sur laquelle la cité des Vellaves prend le titre de cité libre : sue et Herenniae Cypresseniae] Etruscillae Aug(ustae) conjug(i) Aug(usti) n(ostri), civitas Vellavor(um) libera.
INSCRIPTIONS PUBLIQUES. — En dehors des inscriptions rela- tives aux empereurs, l’épigraphie est assez pauvre; elle ne men-
tionne aucune fonction publique, si ce n’est peut-être un sacerdos, soit de quelque divinité honorée d’un culte local, soit peut-être du culte impérial des trois Gaules à l’autel du confluent de la Saône et du Rhône. Aucune inscription ne fait connaître à quelle tribu appartenaient les Vellaves qui devenaient citoyens romains.
INSCRIPTIONS MUNICIPALES. — Îl n’en est pas de même des
inscriptions municipales; quelques-unes auraient même une importance exceptionnelle s’il était certain que toutes les fonc- lions qu'elles mentionnent aient appartenu à la cité des Vellaves. Un Donnius.….… ddus, Priscli filius], Vellarus est qualifié Onnibus offficii]s civilibus in civitate sua functus et a[dses- sor ?) ferrar{ia] rum, c'est-à-dire assesseur du juge provincial de la caisse des mines de fer de l'Aquitaine. Un Nonnius, père de deux fils, dont l’un a été flamine augustal et deux fois duumvir, a eu dans l'administration des mêmes mines de fer une fonction que l’état incomplet du texte ne nous permet pas de déterminer, el, outre cela, a exercé une prètrise du titre de gutvater, que nous présumons, d’après unc inscription de Mâcon, avoir été proba- blement la prêtrise de Mars: il a, de plus, été préfet d’une colo- nie, dont le nom devait se trouver dans la partie aujourd’hui Manquante de l'inscription. Un notable fragment d’une inscription très grande, semble parler d'un [omnibus muneribus (ou ofjiciis) et honoribus functus, platronus colleyti] fabrorum tigna- riorufin....].
INSCRIPTIONS RELIGIEUSES. — Deux inscriptions seulement sont COnSacrées à des dieux, l’une au dieu local Adido associé à Auguste : Adidoni et Augusto Sex(tus) Talonius Musicus de Su4 pecunia posuit, sur une pierre encore existante dans Îles MUrS de la cathédrale du Puy, l’autre provenant de la démolition de l’ancien pont de Brives et dédiée à Jupiter opt(imus). Un groupe de trois femmes représentées assises sur un bas-relicf
du musée du Puy pourrait être le groupe habituel des Mères angustes.,
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INSCRIPTIONS FUNÉRAIRES. — Les inscriptions municipales ci- dessus rappelées sont des épitaphes. Les autres inscriptions funéraires nous apprennent peu de choses : nous relevons, à Saint-Paulien, une Iulia Nociturna (le cognomen ainsi écrit), r(arissimi) m(eriti) f(emina), femme d'un Rufinus Marius (le second nom à corriger probablement par mnaritus), à Saint- Paulien encore un Hermadio : HERMA |! DIONIS, qu'une inter- prétation beaucoup trop savante a décomposé en deux mots : Herma « borne limitante », Dionis, « de la propriété d’un « particulier appelé Dion » ; à Céaux d’Allègre, près Saint-Pau- lien, une [ulia Martia, fille d’une Martiola ; au Puy, l’épitaphe (?) en lettres de 20 centimètres d’un Dubnocus : DVBNO CO VE... (VE ou VI. .., probablement le commencement du nom paternel); au Puy encore, un fragment en grandes lettres, auquel une fausse lecture du mot EOR V1 (l'E effacé dans le bas par l'usure de la pierre) a donné une importance factice en y trouvant la mention d'un FORV» du Puy; un autre fragment dans lequel le tombeau est appelé maesoleum ; l’épitaphe d’un Iulius Come- talis, celle d’une femme dont le nom se terminait en ..ossa, louée de sa sagesse et de sa probité, [o]b quius pietalem hoc mofnul]- mentum [...]; à Chazelles, commune de St-Vidal, aux environs du Puy, l’épitaphe d’une femme appelée Licentiossa, peut-être le même nom que ci-dessus ; à Saint-Vidal, celle d’un Domitius ou Domitus, dans laquelle le tombeau est appelé memoriom; à Polignac, près du Puy, l’épitaphe d’un Iullius Marullinus, à qui sa mêre élève un cippe décoré de son buste; celle d’un Martia- nus dont la femme s'appelait Cara, et celle d’une femme appelée Aveta, l’une et l’autre accompagnées de la figure de l’ascia ; à Ceyssac, une longue épitaphe en vers, tellement maltraitée par le temps et surtout tellement mal placée au musée que la lecture en est impossible. C'est une justice à rendre aux organisateurs du nouveau musée du Puy qu’ils ont montré, dans l’arrange- ment des pierres, un remarquable dédain de l’épigraphie romaine; sauf quelques-unes, notamment celles qui paraissaient favoriser
des hypothèses que peut-être on tenait à faire prévaloir, la plu- |
part des inscriptions sont ou en faux Jour ou dans l'obscurité (par exemple, trois bornes milliaires, l'inscription d’Alpinus et celle de Ceyssac, la plus curieuse, la plus chargée de texte et la plus
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difficile à lire de toute la collection), ou même inabordables (la même inscription de Ceyssac et celles dont les faces pourvues de la figure de l’ascia sont invisibles, bien que cependant la place ne fasse nullement défaut). Par contre, une haute stèle en forme de guérite à toiture imbriquée, et dont la face antérieure est entièrement détruite, a reçu, au moyen d'un épais plâtrage, une décoration inventée de toutes pièces; on y voit dans une niche un personnage en pied vêtu à la gauloise et, au-dessus, ue inscription romaine non moins fausse, et cette stèle, ainsi restaurée, occupe au musée une place d'honneur sans qu'aucune mention avertisse le public que le monument présenté à ses regards est un pastiche. Un petit cartouche contenant les lettres FDC, destiné probablement à marquer la limite d’un domaine ou d'un emplacement funéraire, est devenu pour la glorification du Puy à l’époque romaine la mention décurionale ffaciendui) decuriones) c(ensuerunt,), lecture non moins fantaisiste qu’igno- rante, même en l'appliquant aux décurions de Revessium et en y remplaçant le fautif censuerunt par decrevcerunt.
FORME DES TOMBEAUX. — L’épitaphe du vellave Donnius par- venu dans sa cité à toutes les fonctions civiles, celle de l’anonyme parvenu dans la sienne à toutes les charges et à tous les honneurs, celle de Nonnius, préfet d’une colonie que le texte en son état actuel] ne fait pas connaître, celle dont il ne reste qu’un fragment où se lit le mot EORV mn, celle pareillement réduite à un frag- ment où apparaît le mot »2AESOLEVM, celle avec le mot SACERDOTIS, gravées toutes sur de grands blocs d'appareil et en très grandes lettres, ne peuvent provenir, en raison de leur Uéveloppement, que de tombeaux de proportions monumentales qui rappellent le tombeau de Saint-Rémy, ou les tombeaux du Quartier de Trion de Lyon, ou celui du quartier lyonnais aussi de la Vitriolerie. Elles devaient occuper, soit comme sur celui-ci, le fond d'une cella ouverte qui constituait l'étage supérieur de l'édifice, Sol, comme sur ceux de Trion, une des faces d’un massif carré servant de base à un ou mème deux étages à jours Où en maçonnerie pleine. À des tombeaux analogues à celui de Saint-Rémy doivent avoir appartenu divers bas-reliefs recueillis au musée du Puy, parmi lesquels on remarque principalement un repas funèbre, le détroussement d'Hercule par des Amours
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pendant son sommeil et un groupe de Génies jouant sur une sorte de damier : deux joueurs affrontés tiennent sur leurs genoux une tablette oblongue percée de trous alignés en échiquier, les uns vides, les autres occupés par des pions en forme de clous à tête ronde ; chacun d’eux est assisté d’un conseiller qui se tient der- rière lui. Le bras en suspens, l’un des partenaires, celui de droite, à qui c’est le tour, hésite, tandis que son associé lui indique, en la touchant du doigt, la pièce à jouer; l’adversaire, le menton dans la main, paraït réfléchir profondément ; le Génie placé der- rière lui est immobile et regarde. La scène du repas est incom- plète, plusieurs personnages sont assis sur un triclinium devant lequel est dressé un guéridon garni de vases ; à droite, une biche apprivoisée lèche un plat que lui présente un enfant. Dans le tableau du dévalisement, trois Amours soulèvent avec de grands efforts la noueuse massue du héros; un quatrième traîne péni- blement le vase, plus grand que lui.
Un sarcophage d'une extraordinaire grandeur, devenu au neu- viéme siècle seulement (d’après la forme des lettres et d'après son exclusion du recueil des Znscriplions chrétiennes de la Gaule antérieures au VIIE siècle, de M. Le Blant), le tombeau de l’évêque Scutarius, mort depuis peut-être déjà environ trois cents ans, présentait, dans un encadrement de moulures au- dessous d'une corniche répondant à une base non venue jusqu'à nous, une épitaphe romaine, effacée à l'époque sans doute de cette seconde appropriation. L'espace compris entre cette cor- niche et le bord sur lequel reposait autrefois le couvercle, est décoré de riches guirlandes, qui, partant des angles, aboutissent au milieu à une large rosace sculptée de haut relief et dont le centre, profondément évidé, était sans doute rempli par un orne- ment de marbre ou de bronze. Cette magnifique auge, que devait abriter un mausolée somptueux, est en pierre et ne mesure pas moins, quoique dépourvue de son socle, 90 centimètres de haut, et 2 mètres 50 de long. La sculpture semble pouvoir remonter au premier siécle.
Déjà il a été question d’une élégante stéle d'environ 2 mètres de haut, à double toit de feuilles imbriquées et à faces latérales richement décorées, qui, dans son état primitif, devait présenter une statue en pied dans une niche surmontée d’une épitaphe,
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l'une et l’autre aujourd’hui remplacées par une statue et une inscription fausses.
L'épitaphe de Ceyssac est une stèle assez grande, à fronton
cintré, aujourd’hui détruit en partie, sur la face droite de laquelle est représenté en bas-relief un laboureur parcourant un champ sillonné, l’aiguillon dans la main droite et tenant de l’autre le manche d’un araire terminé, non par un soc, mais par une four- che à deux dents ; autre particularité bizarre, on ne voit ni l'arbre de traction de l’araire, ni les bœufs qui le tiraient. La sculpture est bonne et appartient à un bon temps. _ Aprés cela, ne se montrent plus que des pierres sans ornements ou des stèles de plus ou moins petites dimensions et de plus ou moins mauvais goût, sans en excepter celle de Marullinus pour- vue de son buste en méplat dans un cintre surmonté d'une sorte de fronton flamboyant à faces latérales concaves, ni celle à fron- {on pointu d’Aveta, où l'inscription est contenue, la première ligne dans un cintre, le surplus dans un cartouche carré et esl aCCOmpagnée, sur la face latérale droite, de la figure de l’ascia. Une ascia occupe aussi le côté droit de l’épitaphe de Martianus sur Une pierre sans ornement, et affecte la forme singulière d’une Massèête pointue des deux bouts et emmanchée à angle droit par le milieu. Un cippe, devenu anonyme par l'impossibilité de lire le nom qui est gravé, est pourvu d'une base et d’un couronne- ment terminé en fronton triangulaire; la corniche, faite de trois bandes en retraite les unes des autres, s'interrompt dans son milieu pour décrire un cintre.
Le Puy.
De bonne heure, un endroit, dont on ignore la condition et méme le nom, paraît avoir eu de l'importance. Là existait dès le P'émier siècle ou dès le second au plus tard un temple peut-être ‘élèbre dans la région; là et dans les environs, à Polignac, à Saint-Marcel, à Espaly, à Brives, à Ceyssac, à Driaude, ont été iouvées les principales inscriptions : celle au nom celtique Dub- 0CuS, celle dédiée au dieu local Adido et à Auguste, toutes
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celles qui viennent d’être mentionnées comme épitaphes de per- sonnages municipaux. À une époque tardive indéterminée, pos- térieure à la transformation de la cité en évêché, postérieure aussi à la rédaction de la Notice des Provinces, postérieure même à l’époque du vr° siècle où écrivait Grégoire de Tours, qui l’ap- pelle simplement locus en opposition avec la ville principale qu’il appelle wr'bs, cet endroit se substitua comme chef-lieu et comme évêéché à Saint-Paulien. Sans doute, en ces temps cala- miteux, il offrait par sa situation plus de garanties de sécurité que l’ancienne capitale; la force de cette situation, peut-être accrue encore par des ouvrages de défense, lui fit donner, con- formément à un usage alors général, le nom grec Anticium : « l’Invincible », que personne sans doute ne songera sérieusement à tirer de la langue celtique. L’orthographe actuelle Mont-Anis, qui est le nom du monticule sur lequel est bâtie la vieille ville, dérive évidemment de ce nom grec, mais sous une forme vicieuse qui demanderait à être corrigée en Mont-Anice. La physionomie caractéristique de ce monticule lui a valu aussi, mais en le lui appliquant d'une manière spéciale, le nom générique de Po- dium : « le Puy », qu'il porte encore.
Le TEMPLE DU Puy. — Un temple, dont il reste une partie du soubassement encore en place et de nombreux débris de sculp- tures dans les murs de la cathédrale élevée sur ses fondations, avait été construit avec une certaine magnificence. Une frise d'environ O0 m. 70 de haut qui en décorait extérieurement les murailles dans leur partie supérieure, ne peut être, à cause de l'excellent art qu’elle révèle, qu’une œuvre de l’un des deux pre- miers siècles et du premier plutôt que du second. On y voit, pour- suivis par des lions ou errant tranquillement ou même au repos, des cerfs, des biches, des onagres, des chimères, des sangliers à moitié sortis de leur bauge; des arbres, quelques personnages, un paysan conduisant un âne, un chasseur accompagné de son chien; sculptures exécutées en général avec ampleur et une remarquable vérité, et qui, vues à distance, devaient produire un grand effet. Ce temple était peut-être consacré aux dieux Adido et Auguste d’après une inscription encore existante au-dessus d'une porte latérale de l’église, mais gravée en lettres beaucoup trop petites (0 m. 04) et trop grèles pour avoir pu décorer comme
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épigraphe la façade d'un monument de proportions tant soit peu considérabies.
LA cOLONIE DU Puy. — Séduits par l'abondance et la beauté des sculptures provenant du temple du Puy et par l'importance des inscriptions découvertes au Puy et dans ses environs en plus grand nombre qu'à Saint-Paulien, des savants du pays, plus fami- liarisés avec le moyen âge qu'avec l'antiquité romaine, se sont crus autorisés à attribuer au Puy le titre de colonie qui se lit sur un fragment d’une inscription du 1° ou du rr° siècle. La cité des Vellaves aurait formé, selon eux, deux cités distinctes ayant pour chefs-lieux, l’une Revessium, c’est-à-dire Saint-Paulien, l’autre le Puy avec le titre de colonie. Cette prétention a malheureuse- ment contre elles tous les documents littéraires et épigraphiques jusqu’à présent connus; aucun de ces documents ne souffle mot d'une colonie chez les Vellaves. Strabon, qui écrivaitsous Tibére, ne parle que d’une cité des Vellaves; Pline, dont la description géographique est empruntée aux commentaires d'Agrippa, garde un complet silence sur les Vellaves, peut-être parce qu'il les englobait avec les Arvernes, qu'il dit être liberi ; Ptolémée, con- lemporain des empereurs Hadrien et Antonin le Pieux. ne nomme non plus qu’une cité des Vellaves avec Revessium pour unique chef-lieu. Il en est de même des itinéraires et des milliaires; chez ceux-là comme chez ceux-ci, la cité des Vellaves c'est Revessium, ainsi identifié avec la cité entière ; aucun milliaire n'indique une colonie sur le territoire vellave, et cependant, si une colonie y eût existé, elle aurait dû être un point routier plus marquant même que Revessium. Sur un monument qu'elle élèveà l’empereur Trajan Déce et à l’impératrice Étruscille, à Saint-Paulien, la céve- las Vellavorum se qualifie elle-mème lrbera, « cité libre », ce qui serait en formel désaccord avec la condition de la cité, si elle avait été une colonie romaine. L’épitaphe du vellave Donnius in- dique expressément sa Carriére municipale remplie 7x civitate SE, « dans sa Cité », non pas dans sa colonie, erreur inconceva- ble dans le cas où la cité des Vellaves eût eu le titre de colonie.
En résumé, la revendication du titre de colonie pour le Puy est ue Pure conjecture sans autre fondement qu’une interprétation arbitraire d’une inscription incompléte, par conséquent dépourvue d'autorité pour la solution de la question, car la patrie du per-
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sonnage était certainement nommée dans les lignes aujourd’hui absentes. Ce qui paraît être vrai, c'est que le Puy étant peut-être, à cause de son temple, un centre renommé de dévotion, et, à cause de son site, un séjour plus attrayant et plus agréable que celui de Revessium, l'endroit, auquel il faut joindre ses environs, semble avoir été préféré par l'aristocratie, mais sans que pour cela il ait supplanté celui-ci comme chef-lieu de la cité, si ce n’est à une époque tardive du vi: siècle. Jusque là, le Puy ne peut avoir eu d’autre condition que celle de virus. La « colonie » du Puy, le « forum » du Puy, les « décurions » du Puy, l'origine celtique du mot Antcium et sa prétendue dérivation d’'Adido ne sont, en dépit de tous les raisonnements et de tous les artifices laborieuse- ment et ingénieusement accumulés en leur faveur, rien de plus que des imaginations nées d’un patriotisme local exagéré et n'ayant d'autre fondement que des apparences trompeuses.
Epilaphe d'un personnage qualifié « préfet de sa colonie ».
Le Puy. — Moulage au musée. Grande pierre oblongue con- tenant une partie d’une inscription dont le commencement et la fin occupaient deux autres pierres non retrouvées, placées primi- tivement l’une au dessus, l’autre au dessous ; encastrée dans le mur de Ja cathédrale auquel « est adossé le grand clocher ». — Hauteur O0 m. 60, longueur 3 m. 90.
FERRARIAR GVTVATER PRAEFECTVS COLON QVI ANTE QVAM HIC QUIESCO LIBEROSMEOS VTROSQ VIDINONN FEROCEM FLAM‘IIVIRVMMS
Copie dessinée de M. Allmer.
….. ferrariarum, gquivaler, praefectus coloniae, qui ante quain hic quiesco liberos meos utrosque vidi Nonn(iusn.) Fero- cem flaminem, duumvirum bis, [et Nonnium 1].
«.…. des mines de fer, gutvater (de Mars ?), préfet de la « colonie, j'ai, avant de reposer ici, eu la satisfaction de voir l’un _« de mes deux fils, Nonnius Ferox, flamine et deux fois duumvir, « l'autre... ».
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Il est extrêmement regrettable que cette inscription ne soit pas entière; sa mutilation nous prive des renseignements qui préci- sément eussent eu pour nous le plus d’intérèt. Nommé avec tous ses noms et avec rappel du nom de son père et du nom de sa cité, le personnage dont elle était l’épitaphe avait eu dans les mines de fer de la province une fonction qu’il ne nous est plus possible de déterminer, soit celle de conductor, « fermier », soit, comme le vellave de l'inscription que l’on va voir, celle d'adsessor, « assesseur dujuge provincial des mines »; il avait été, outre cela, revêtu d'une prètrise désignée par le titre de gutvater, et qui, d'après une inscription de Mâcon: flaminis Auqgusti, plriml] oyeniri dei Moltini, guitvatr{i] Mart(is), pourraitavoir été la prè- trise de Mars ; de plus encore, il avait été préfet de sa colonie : praefectus coloniae, c’est-à-dire la colonie indiquée comme étant sa patrie dans les premières lignes aujourd'hui manquantes. L'ins- cription suivante,qui, ayant à désigner la cité des Vellaves par son titre officiel, l’appelle simplement c?vitas, non pas co/ontia, fait voir clairement que la colonie ici mentionnée ne peut pas être Revessium. Encore moins y a-t-il à penser au Puy, plus tard Anicium, auquel un amour trop ardent du clocher a cherché à : appliquer, en contradiction avec tous les documents littéraires et épigraphiques, le titre de colonie du présent texte; le Puy est devenu, à la vérité, en remplacement de Revessium, le chef-lieu de la cité, mais non avant le vr° siècle, et l'inscription est de l'un des deux premiers siècles. |
Notre personnage avait deux fils, et ici encore la perte présu- mable de la fin du texte rend la lecture incertaine : Nonnç(inum) Ferocem ou Nonn(um) Ferocem? Dans ce dernier cas, l'un des fils se serait appelé Nonnus, l’autre Ferox, et chacun d'eux au- rait été flamine et deux fois duumvir; cependant, le texte ne porte pas le mot ef, et ayant employé le pluriel pour wtrosque, il aurait dû mettre également au pluriel les fonctions mentionnées et dire flamines, duoviros bis; il y a à remarquer aussi qu'on abrégeait volontiers les noms gentilices, lorsque, par exemple, ils étaient généralement connus ou lorsqne, déjà exprimés en toutes lettres dans la première partie d’un texte, le mème nom se représentait dans la partie suivante; mais au contraire, dans les inscriptions de bonne épigraphie, on n’abrégeait jamaisles cognomens : enfin il
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serait assez bizarre que les deux fils eussent rempli un cursus ho- norum exactement pareil et avec la même particularité de renou- vellement du duumvirat. Pour toutes ces raisons, il nous paraît pré- férable de lire VNonnium) Ferocem; il s'agirait d’un seul des deux frères, flamine et deux fois duumvir, tandis que lés noms et la carrière honorifique de l’autre auraient fait suite sur une troi- sième pierre non venue jusqu’à nous. S’il en était ainsi, le nom des fils nous fournirait celui du père, et nous saurions d’une ma- nière sûre que le défunt s’appelait Nonnius.
Remarquer le mot germanique gut-vater, « saint père », em- ployé, au r°" ou au n° siècle, en Gaule, comme titre sacerdotal.
C’est à tort que Renier et à sa suite Desjardins (Table de Peu- Linger, p. 44)et Aymard ont considéré l'inscription comme entière et lu les premiers mots de la première ligne : Ferrar(ius) Arqut (us) Ater.….. La lecture de Mandet (Hrst. du Velay, I, p. 310), ferrariar(um) Gutuater(narrm) n'est pas moins fautive.
Le tombeau de Nonnius, composé de grands blocs d’appareil, devait représenter une construction monumentale, sans doute analogue aux grands tombeaux de Trion, à celui du Vellave ano- nyme qualifié de sacerdos, à celui de Donnius et à celui encore du personnage municipal anonyme de l'inscription qui figure à la page 98.
Epitaphe d'un Vellave assesseur du juge provincial des mines de fer.
Le Puy. — Au musée. Bloc quadrangulaire sans ornements, « autrefois engagé dans une des murailles de la petite cour, près « du clocher de la cathédrale » (Mandet). — Hauteur O0 m. 54, largeur 0 m. 90. J/DDI*‘' DONNI' PRISC//// VELLAVI OMNIBVS orficet S* CIVILIBvVS: IN civiTate 5 SVA' FVNCTO‘' A‘ FERRAR?& RVM:‘G'IVL : PATERNVS® AMIC VS S IBIQVE VIVS' D‘ PROPRILS PONENDVM CVRAVIT ET: deu
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Copie dessinée de M. Allmer : le second D de... DDI très in- certain.
Diis Manibus Donnii..…. ddi, Donnii Prisci(?) flii, Vellarr, omnibus officiis civilibus in civitate sua functo, a(dsessori ?) ferrariarum, G. Iulius Paternus, amicus, sibique vivus denariis propriis ponendum curavit et dedicarit.
« Aux dieux Mânes de Donnius.... ddus, fils de Donnius Pris- « cus(?), de la cité des Vellaves, promu dans sa cité à toutes les « fonctions civiles, assesseur des mines de fer, Gaius Julius Pater- «nus, son ami,-a, de son vivant et de ses deniers, élevé et « dédié ce tombeau, destiné aussi à lui-même. »
L'insuffisance de l’abréviation A... FERRAR:aRVM ne per- met pas de savoir d’une manière certaine de quelles fonctions Don- nius à été pourvu dans l’administration des mines de fer. D’après les exemples fournis par le service des mines (Voyez Hirsch- feld, Admin. rom., p. 76, note 1), deux mots seulement : arca- rius, et adsessor, se présentent pour la compléter. La fonction d’arcarius, ordinairement remplie par un esclave, ne saurait con- “enir ici; celle d'adsessor peut, au contraire, se justifier par l’ins- cription célèbre connue sous le nom d'inscription de Thorigny, qui, au sujet d’un éminent personnage municipal de la cité des Viducasses, contemporain de Sévère Alexandre, s'exprime en ces termes : adsedit etiam in provincia Lugd(unensi) Valerio Floro trib(uno) mil(itum) leyrionis) IT Auglustae), judici arkae ferrar[iarum..]. Ce juge provincial de la caisse des mines de fer, qui avait sous sa juridiction les mines de la province Lyon-* naise, était donc assisté dans ses fonctions par des assesseurs municipaux au courant des us et coutumes des différentes con- trées où se trouvaient les mines. Donnius aura été, pour la cité des Vellaves, l’assesseur du juge des mines de fer de la province d'Aquitaine.
Il est à remarquer que le personnage de cette épitaphe, qui était certainement vellave puisque le texte le certitie, y est dit “parvenu à toutes les fonctions civiles x civitale sua », et non pas 27 colonia sua, titre qui, cependant, aurait dù être employé au lieu de celui de civifas, au cas où réellement le chef-lieu de la Commune des Vellaves eût été une colonie.
Voir l'inscription précédente.
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Fragment.
Le Puy, — Bloc quadrangulaireextrait des murs de la cathé- drale et déposé au musée; présentant un fragment, incomplet de tous côtés, d’une inscription en très grandes lettres. — Hauteur 0 m. 68 ; largeur 0 m. 75. Hauteur des lettres 0 m. 16.
°. -e S'EORV....
capes
Copie dessinée de M. Allmer: Les lettres de la première ligne réduites à leur extrémité inférieure et incertaines , la seconde et la dernière une L ou un E ; l'E de EOR Va effacé dans le bas et présentant l'apparence d’une F.
nee heredes(t)eorum ........
L’E du mot eorum offrant, par suite de l’usure de sa partie infé- rieure, la figure d’une F, on n’a pas manqué delire forum : le forum du Puy let on est arrivé à trouver que l'inscription décorait « au- trefois le haut du pilier sur lequel on affichait, au Puy, les lois et les règlements concernant la police des foires et des marchés : « senatus consulto aut leGE IL{is qui adeVNT HOc civitatiS FORVm...... ». Il y a malheureusement beaucoup à rabattre de cette lumineuse restitution due à l'imagination de Delalande et acceptée depuis sans contestation. Rien que la grandeur des lettres aurait dû cependant suflire pour faire comprendre qu’il ne s’agit pas ici d’un sénatus-consulte ou d’une loi, ni moins fautivement d'un simple décret des décurions, mais suivant toute vraisem- blance d'une épitaphe qui, entiére, se développait sur une large étendue et appartenait sans doute à quelque tombeau de propor- tions monumentales, du genre de ceux dont 1l a été question déjà plusieurs fois, à propos de personnages de l'aristocratie munici- pale, tels que Donnius et autres parvenus à tous les honneurs de la cité, et tel aussi très certainement que l’anonyme de notre frag- ment. Ces grands et somptueux tombeaux, qui se sont montrés nombreux à Lyon, que nous avons signalés à Saintes, que nous
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retrouvons maintenant chez les Vellaves, que nous retrouverons bientôt chez les Gabales et qui se rencontrent un peu partout en pays celtique, font bien voir à quel point ces riches seigneurs gaulois, maîtres de domaines souvent vastes comme des cantons, patrons de clients et de serviteurs, se comptant, dans le cours du r°' siècle, encore par milliers, étaient des gens autrement considérables que les mesquins petits propriétaires de la Nar- bonnaise, descendants la plupart de vétérans anciennement colo- nisés, et dont les tombeaux, à la seule exception de celui de Saint-